La visite du président français au Cameroun est une opportunité à saisir pour revisiter la coopération bilatérale et renforcer le partenariat stratégique entre les deux pays.
Les relations entre le Cameroun et la France sont à la fois anciennes et multiformes. Sur le plan formel, la coopération bilatérale remonte à l’accession de notre pays à la souveraineté internationale en 1960. Depuis lors, les liens se sont raffermis et diversifiés à travers la politique, le commerce, l’investissement, des visites au plus haut niveau, le dialogue permanent sur des sujets d’intérêt commun.
Ce partenariat est ancré sur un faisceau dense de paramètres liés à l’histoire, à l’économie, aux nombreuses connections culturelles, sans oublier la dimension diplomatique qui sert de moteur aux relations internationales. Sur le plan historique, la relation bientôt centenaire, s’est beaucoup consolidée, malgré les vicissitudes du passé.
On ne s’étendra pas davantage sur le rôle de pionnier joué au milieu du siècle dernier par quelques ressortissants français de renom dans des domaines comme l’éducation, la santé ou l’aménagement du territoire. La multiplicité et la densité des contacts à tous les niveaux et dans tous les domaines ont fini par élever la coopération franco-camerounaise au rang de partenariat stratégique, avec des ramifications sur les plans politique, économique, sécuritaire, diplomatique, etc.
Au regard de la configuration de leurs économies et de leur niveau de développement respectifs, les deux pays ont des raisons objectives pour renforcer un partenariat qui tire largement profit des facteurs liés à la compétitivité et à la complémentarité. Du fait de sa position exceptionnelle au fond du Golfe de Guinée, le Cameroun est la porte d’entrée vers les marchés du Tchad, de la RCA, voire du Congo.
Avec 35% du PIB de la sous-région, il dispose de nombreux atouts pour séduire les investisseurs : ressources agricoles, pétrolières et minières, main d’œuvre dynamique et bon marché, environnement fiscal incitatif, etc. La croissance qui avoisine les 5% traduit un regain d’activités tiré par le lancement des grands projets d’infrastructures. Le Cameroun reste le premier partenaire économique de la France en Afrique centrale hors pétrole.
En 2013, les échanges franco-camerounais ont connu un accroissement de 4,8 %, mais la marge de progression reste grande. En dehors des hydrocarbures, les exportations sont constituées principalement des fruits (banane), du cacao et de ses dérivés. A l’inverse, le Cameroun importe principalement des produits agricoles, des produits pharmaceutiques, des machines industrielles et du matériel informatique. Puissance industrielle et financière de premier plan, la France dispose de la technologie et des capitaux pour accroître sa présence économique et améliorer ses parts de marché.
Bien qu’étant toujours le premier investisseur au Cameroun, la France s’est fait damer le pion, au niveau commercial, par le Nigeria et doit faire face à l’offensive chinoise. Ceci dit, le partenariat économique reste dynamique. La présence française est visible avec plus d’une centaine de filiales d’entreprises et environ 200 entreprises appartenant à des ressortissants français et employant plus de 30.000 Camerounais.
Des noms comme Bolloré Logistics, Castel, CFAO, Cimencam, Sgbc, Orange, Razel, Total, font depuis toujours partie du paysage. Sur un tout autre plan, le Contrat de désendettement et de développement (C2D) s’est révélé un outil innovant de la coopération franco-camerounaise. A ce jour, il a déjà permis le financement de nombreux projets dans l’agriculture, la santé, l’éducation, l’environnement, les infrastructures urbaines et routières, la formation professionnelle.
Sur le plan politique, l’avancée est tout aussi remarquable. Il existe un dialogue actif au niveau des gouvernements, mais aussi à travers des nombreuses missions d’échanges interparlementaires. Au cours des trente dernières années, trois chefs d’Etat français ont foulé le sol camerounais alors que le président Paul Biya a effectué plus d’une dizaine de déplacements officiels en France.
Parmi les plus récentes visites des personnalités françaises au Cameroun, on peut mentionner celles du président de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone, du ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, du ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve. Sur le plan diplomatique, les deux pays coopèrent étroitement.
Les positions de Paris et de Yaoundé sont globalement similaires sur les grands sujets de l’actualité stratégique internationale. Qu’il s’agisse du combat contre le terrorisme dans la zone sahélienne, de la lutte contre l’insécurité maritime ou des stratégies concertées pour mettre hors d’état de nuire la secte Boko Haram. Par ailleurs, l’appui du Cameroun a toujours été précieux à la France lors des délibérations au niveau du Conseil de sécurité des Nations unies.
Par la voix de son ministre des Affaires étrangères, la France a, maintes fois, réaffirmé son « engagement aux côtés du Cameroun » pour combattre les djihadistes, tout en promettant son soutien au niveau du Conseil de sécurité en vue du déploiement d’une force interafricaine. Partant du principe que le partenariat économique a besoin de paix et de sécurité, la France et le Cameroun ont renforcé leur coopération militaire, notamment avec les accords de partenariat de défense signés le 21 mai 2009 à Yaoundé.
Au plan culturel, les deux pays sont membres de la Francophonie et mènent dans cette instance une coopération active dans les domaines de l’éducation, de la formation, de la promotion de la jeunesse ou du développement durable. Fondée sur le cœur et la raison, l’alliance franco-camerounaise est appelée à évoluer pour s’adapter aux mutations de l’environnement international et aux exigences de la mondialisation triomphante qui fait du multilatéralisme et de la concurrence des données incontournables dans les relations entre Etats.
Au-delà de certaines contingences, il faut regarder vers l’avenir, explorer des nouvelles niches d’opportunités en vue de booster les échanges et le flux d’investissements pour franchir un nouveau cap. Dans les prochaines années, l’intérêt réciproque commande de diversifier le dialogue entre les élites politiques, les acteurs de la société civile et les opérateurs économiques.
Pour ne pas donner l’impression qu’il s’agit d’un partenariat à sens unique, les deux pays gagneraient à favoriser une présence économique réciproque sur leur sol. En dépit de quelques soubresauts, le partenariat stratégique entre le Cameroun et la France est appelé à se consolider, en ouvrant des nouvelles perspectives pour l’avenir.