Le paysage médiatique camerounais a connu une mutation silencieuse ces dernières années. Les figures emblématiques qui animaient jadis les débats télévisés se sont progressivement effacées, laissant place à un vide que les nouvelles générations peinent à combler.
C'était une époque où chaque intervention télévisée était un rendez-vous attendu. Mouthe Ambassa, avec sa rhétorique affûtée, Maître Pensy et sa célèbre phrase "vous ne pouvez ni me vaincre ni me convaincre", ou encore Atangana Manda, qui ne manquait jamais de rappeler son niveau académique "minimalement bac+7", ont marqué leur temps par des joutes oratoires mémorables.
Claude Abate, l'homme qui se prévalait de son passage à la "London Business School", s'est retranché sur les réseaux sociaux, délaissant les plateaux qui l'ont fait connaître. L'honorable Martin Oyono, dont la voix critique au sein même du RDPC résonnait fort, s'est tu, aujourd'hui souffrant.
Plus surprenant encore est le cas de l'honorable Bengono, dont la sortie controversée proposant une "solution hitlérienne" à la crise anglophone avait défrayé la chronique, et qui ne fait plus que de rares apparitions médiatiques.
Cette disparition collective interroge. Le décès d'Ateba Eyene, autre figure marquante de cette génération, semble avoir sonné le glas d'une certaine façon de faire le débat politique à la télévision camerounaise.
Aujourd'hui, le paysage audiovisuel camerounais présente un visage paradoxal : une multiplication des chaînes et des émissions de débat, mais une uniformisation troublante des formats. Le dimanche, pas moins de vingt chaînes diffusent simultanément des débats entre 11h et 12h, reproduisant le même schéma du lundi au vendredi en soirée.
Cette standardisation pose question. Ce qui apparaît comme une diversification de l'offre médiatique pourrait, en réalité, n'être qu'une "vaste entreprise de distraction" savamment orchestrée. La multiplication des émissions similaires, loin d'enrichir le débat public, semble le diluer dans une forme de conformisme bien pensé.
La disparition de ces grandes voix du RDPC des écrans, conjuguée à cette uniformisation des débats, marque peut-être la fin d'une époque où le débat télévisé, malgré ses imperfections, conservait encore sa capacité à surprendre et à faire réfléchir.