S’exprimant le 13 juillet 2023 à Yaoundé, à l’ouverture du séminaire de lancement des activités de préparation du budget 2024 de l’État, Louis Paul Motazé (photo), le ministre des Finances, a décrit un « contexte de fortes incertitudes au plan national» et international, qui devrait déboucher sur une baisse importante des recettes pétrolières du Cameroun en 2024. «(…) Les incertitudes qui pèsent ainsi sur l’économie mondiale invitent à la prudence, quant à la prévision d’une hausse substantielle du niveau de ressources propres en 2024, dans un contexte de baisse des cours et d’effritement progressif du potentiel de mobilisation des recettes pétrolières, dont les projections du dernier cadrage budgétaire prévoient, pour 2024, une diminution de plus de 195 milliards de FCFA par rapport à 2023», a révélé le ministre Motazé
Ces prévisions sont cependant à relativiser, eu égard aux fluctuations non maîtrisées des cours du dollar et même du pétrole brut, qui peuvent plutôt évoluer favorablement au cours des prochains mois, du moment où persiste la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Mais, au-delà des recettes pétrolières, la météo financière autour du Trésor public camerounais en 2024 n’est pas non plus des plus clémentes, en ce qui concerne les appuis budgétaires et les emprunts. Les «projections ne sont pas meilleures s’agissant des ressources de financement, qui pourraient elles aussi connaître en 2024 une importante rétraction, en raison de celle des appuis budgétaires et des emprunts intérieurs», a encore indiqué le ministre Motazé le 13 juillet 2023. En effet, le programme économique et financier avec le FMI, qui devrait permettre au Cameroun d’engranger une enveloppe totale d’environ 770 milliards de FCFA au titre d’appuis budgétaires, dont 380 milliards de FCFA mis progressivement à disposition par le fonds lui-même, s’achève au cours de l’année 2024. Avec pour corollaire la fin de ces perfusions financières au profit du Trésor public camerounais, qui, à date, a déjà encaissé une bonne partie de cette enveloppe globale.
L’on se souvient que le 10 février 2023, en installant les dirigeants nommés à la tête de la Caisse autonome d’amortissement (CAA), le gestionnaire de la dette publique, et de la Caisse des dépôts et consignations (CDC); le ministre des Finances avait déjà invité ces derniers à trouver des solutions pour pallier la réduction des appuis budgétaires. «Le Cameroun n’étant pas appelé à être éternellement sousprogramme (avec le FMI), nous devrions nous rappeler que gérer, c’est prévoir, et qu’il nous revient donc à nous tous, et donc à vous aussi, de trouver dès maintenant des ressources de remplacement de ces appuis budgétaires, afin que le Cameroun poursuive sa marche en avant, et que le financement de notre développement se poursuive. Je compte sur vous», avait indiqué le ministre des Finances. En plus de la baisse projetée des recettes pétrolières et de la fin prochaine des appuis budgétaires, Louis Paul Motazé redoute également que les marges de manœuvre de l’État se réduisent davantage sur le marché sous-régional des capitaux, où le Cameroun lève régulièrement des fonds pour compléter son enveloppe budgétaire. En effet, malgré le succès que vient d’enregistrer le Cameroun sur son emprunt obligataire 2023, qui a finalement permis de mobiliser 176,7 milliards sur les 150 milliards de FCFA recherchés initialement, la levée des fonds dans l’espace Cemac devient de plus en plus difficile. La faute à la politique monétaire restrictive mise en place par la Beac pour combattre l’inflation, et qui se traduit par l’assèchement des banques, avec pour conséquence la hausse des taux d’intérêt.