La peine capitale existe toujours au Cameroun, même s’il n’y a pas eu d’exécutions depuis trois décennies. L’Œil du Sahel du 18 juillet 2016 indique que la condamnation à mort connait un regain de vitalité dans le pays de Paul Biya avec la lutte contre le groupe terroriste Boko Haram.
Dans un rapport publié le 14 juillet, Amnesty International relève en effet «plus de 100 condamnations à mort, dont plusieurs femmes, à l’issue de procès militaires inéquitables». Au cours de la conférence de presse de presse de présentation dudit rapport, Alioune Tine, Directeur régional d’Amnesty International Afrique Centrale et de l’Ouest a déclaré qu’«Amnesty, fondamentalement, est pour l’abolition de la peine de mort. Et de façon solennelle, nous nous adressons à l’État du Cameroun pour demander l’abolition de la peine de mort. Il y a 19 pays africains aujourd’hui qui ont aboli la peine de mort. Depuis juillet 2004, le Sénégal l’a fait. Le Cameroun a quand même certains plus grands intellectuels du monde. Il faut absolument que le Cameroun suive, montre la voie pour abolir la peine de mort. Nous y tenons fondamentalement et nous œuvrons là-dessus».
À en croire notre confrère, ce dernier a invoqué les conventions internationales ratifiées par le Cameroun. «Par ailleurs, les mécanismes en matière des droits humains établissent catégoriquement que les tribunaux militaires ne doivent pas être autorisés à prescrire la peine de mort», écrit le journal.
Dans la même veine, Amnesty note dans son rapport que, «dans le cas des procès qui aboutissent à une condamnation à mort, le respect scrupuleux des garanties d’un procès équitable est particulièrement important. Et que toute condamnation à la peine capitale prononcée à l’issue d’un procès inique constitue une violation du droit à la vie et à un procès équitable», selon le Comité des Droits de l’Homme de l’ONU.
Pas sûr que le Gouvernement camerounais accède à cette demande, du moins pour l’instant. Lors de la conférence de presse qu’il a donnée le 12 juillet suite à l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal très critiqué, le Ministre de la Justice a affirmé: «La peine de mort dans notre Code pénal est une sanction. Et cette sanction est prononcée par les juridictions. C’est ce que prévoit la loi. S’agissant d’une sanction, je ne sais pas si elle est rétrograde ou si elle ne l’est pas. Dans notre société, on donne toujours l’impression que les droits de la défense sont supérieurs au droit du pays», a déclaré Laurent Esso.
Plus loin, le garde des Sceaux a justifié cette position: «Dans le Code pénal, la peine de mort concerne l’assassinat essentiellement. Vous avez, c’est vrai, une loi contre le terrorisme, mais elle est spéciale. Je ne vois pas en quoi cette loi est rétrograde. Si on ne prononce pas cette sanction, qu’est-ce qu’on en ferait donc? Il y a l’emprisonnement à vie; tout le monde a droit à la liberté.
Donc, les juridictions ne seront pas en mesure de prononcer une peine d’emprisonnement puisque c’est une privation de la liberté. Et la liberté est considérée comme étant une valeur. À quoi serviraient donc les juridictions qui ne peuvent pas prononcer les sanctions prévues par la loi pénale ? La sanction a ce que l’on appelle un caractère dissuasif» a-t-il expliqué.