Comme annoncé il y a quelques jours, le Comité de protection des journalistes (CPJ) a rendu public ce 20 septembre un rapport sur la liberté de la presse au Cameroun.
Ce rapport tend à démontrer comment la loi antiterroriste de 2014 est utilisée pour museler la presse ou l'opposition camerounaise. À cet égard, le cas du correspondant de Radio France International (RFI), Ahmed Abba, emprisonné depuis deux ans, est cité en exemple.
«Il a été accusé d’avoir violé la loi antiterroriste camerounaise et pour nous c’est ça le problème. Parce que c’est une législation antiterroriste qui est utilisée pour imposer le silence aux opposants et réprimer la dissidence au Cameroun. Et c’est tous les journalistes camerounais qui en souffrent. On a interviewé pas mal de journalistes pour rédiger ce rapport et ils nous affirment tous qu’ils craignent le risque d’arrestation ou de clôture de leur publication et qu’il règne là-bas une atmosphère de crainte et d’autocensure», explique Robert Mahoney, directeur adjoint du CPJ.
Selon ce dernier, il faut absolument que Bruxelles condamne publiquement les restrictions à l’encontre des journalistes au Cameroun. «On sait déjà que le cas d’Ahmed Abba est très connu à Paris, à Bruxelles et les autres capitales européennes, mais il faut que les dirigeants européens fassent une déclaration publique et forte, demandant au président Biya de libérer notre confrère. Une pression diplomatique constante c’est le seul moyen, à mon avis, d’assurer sa remise en liberté», estime-t-il.
La réaction du Gouvernement ne s’est pas fait attendre. Sur les ondes du Poste national, cette mi-journée, Issa Tchiroma Bakary, ministre de la Communication, a qualifié ces propos de «condescendants». «Ce discours est un discours condescendant, un discours attentatoire à l’honneur et à la dignité de ce grand pays qu’est le Cameroun. N’êtes-vous pas surpris que ce monsieur ose demander à Bruxelles, Paris et autres d’exercer des pressions sur le Président Biya pour qu’il libère quelqu’un qui a été pris en flagrant délit de soutien aux terroristes ? Puisqu’on a trouvé par-devers lui des équipements qui attestent de sa connivence avec les terroristes».
Pour le porte-parole du Gouvernement, «non seulement nous rejetons ces accusations, nous disons que notre nation n’a jamais accepté une puissance tutélaire quelle qu’elle soit. Le Cameroun n’a jamais été un Etat bananier, il ne saura jamais être ravalé au rang d’un Etat bananier. Le Président Biya obéit toujours à sa conscience et à la volonté de sa nation. Aujourd’hui toute sa nation est solidaire dernière lui, derrière son armée pour la protection de notre nation, la protection de nos institutions, la protection de l’intégrité territoriale de notre nation».
«Je les mets au défi de me prouver qu’un seul journaliste, dans l’exercice de son métier, a été inquiété encore moins arrêté du fait de la loi anti-terroriste. Au même titre, qu’ils me disent quel homme politique a été inquiété du fait de cette loi dans l’exercice de responsabilité politique. Non, c’est des propos mensongers, des propos diffamatoires, des propos attentatoires à notre honneur. Ces propos, nous les rejetons, nous ne les acceptons pas», a conclu Issa Tchiroma Bakary.