Cela fait suite à la suspension de l’énergie électrique par Eneo pour impayées de 380 millions par la Mairie de ville de Garoua.
Marché reconstruit de Garoua. C’est le bruit assourdissant des groupes électrogènes qui accueille depuis quelques jours les usagers qui fréquentent cet important espace marchand situé en plein coeur de la ville de Garoua. Depuis quatre semaines les commerçants des deux principaux marchés de la ville de Garoua sont privés d’électricité. Une situation qui n’est pas sans conséquence pour ces commerçants, notamment pour les vendeurs de vivres frais et réparateurs des téléphones, ou encore les couturiers.
Plusieurs ateliers de couture sont d’ailleurs fermés, les propriétaires ne disposant pas de groupes électrogènes ont préféré se déporter dans les quartiers avec leur matériel. «Vous voyez toutes les boutiques fermées ? Eh bien les occupants se sont installés dans le quartier provisoirement. Sans électricité, pas moyen de faire tourner les machines et tout le monde ne dispose pas de moyens financiers pour s’acheter un groupe électrogène», nous explique Moussa Mamoudou, tailleur au grand marché reconstruit.
À l’origine de cette situation, la suspension d’énergie opérée par Eneo pour impayés par la Communauté urbaine de Garoua. Pour les commerçants, c’est un véritable imbroglio. Eux qui payent leur consommation d’électricité directement auprès de la communauté urbaine depuis 2019, ont du mal à comprendre cette situation. «Nous payons les factures de notre consommation d'énergie électrique auprès de la communauté urbaine. Qu’on nous dise la vérité», insiste Mohmadou Djaouro.
Cette vérité nous avons décidé d’aller la chercher auprès de la communauté urbaine de Garoua. En l’absence du maire de la ville, nous avons pu cependant avoir accès à certaines informations. S’agissant des impayés réclamés par la société Eneo à la ville de Garoua, ils couvrent la période partant de 2016 à ce jour, et ils se chiffrent à 380 millions. Nous apprenons également que 80% du montant de cette dette est liée à la consommation de l’énergie électrique dans les 02 principaux marchés de la ville de Garoua, le grand marché Beac et le marché reconstruit. Des marchés pour lesquels la communauté urbaine affirme n’avoir aucune compétence sur le plan administratif et technique pour gérer le recouvrement des factures auprès des commerçants.
Dans un courrier daté du 30 septembre et adressé au directeur régional d’Eneo, la communauté urbaine de Garoua fait savoir qu’elle se désengage de tout abonnement dans les marchés et ne payera à l’avenir aucune facture liée à la consommation d’énergie électrique dans les marchés. Par ailleurs, un ordre de virement d’une montant de 28.000.000 de francs, représentant une avance de paiement au profit d’Eneo, a été transmis au Trésor Public du Nord pour suite des procédures de paiement. La communauté urbaine a enfin sollicité le rétablissement de l’électricité dans les marchés, mais Eneo n’a pas bougé le petit doigt jusqu’ici.
Les commerçants ont quant à eux dans une lettre adressée au gouverneur de la région du Nord, pris l’engagement de s’abonner et de payer directement leur facture auprès d’Eneo, mettant ainsi un terme au principe du compteur unique qui était en vigueur dans les deux marchés. En attendant un retour à la normale, les présidents des deux marchés n’ont pas d’autre choix que d'inviter leurs camarades commerçants au calme. «La communauté urbaine nous a donné des assurances que le problème allait connaître une issue favorable bientôt et en plus Garoua n’est pas la seule ville concernée. Nous devons faire confiance aux autorités malgré le contexte difficile pour nous», nous explique Ibrahima Dabo, président des commerçants du marché reconstruit.
Alors que les pertes s’amoncèlent pour les commerçants, une lueur d’espoir pourrait venir des recommandations issues d’une rencontre qui s’est tenue le 05 octobre dernier à Yaoundé entre le ministre de l’eau et de l’énergie, le directeur général d’Eneo et l’association Commune et Villes Unie du Cameroun. Parmi les recommandations données par le ministre de l’eau et de l’énergie, figure la levée immédiate de toute suspension d’énergie opérée par Eneo dans les communes, l’organisation d’un pointage contradictoire entre les communes et Eneo pour arrêter de commun accord une facturation juste dans un délai de 60 jours.