De plus en plus de jeunes choisissent de tenter leur chance dans des embarcations de fortune pour rejoindre l’Europe. Certains y arrivent, mais d’autres périssent sur le chemin. Ce jeune, conscient des dangers et malgré l’interdiction de sa mère, a pris la route. Il raconte.

Ma mère n'avait pas voulu que je fasse ce voyage et me l'avait fortement déconseillé. Elle me disait : "Mon fils, quand une porte se ferme, Dieu t'en ouvre une autre".

J'avais perdu mon boulot et je ne voyais plus de porte s'ouvrir pour moi, et la voir souffrir de ma situation me mettait mal à l'aise. J'avais toujours rêvé du meilleur pour elle, elle qui m'a tout donné. Je le lui rendais bien quand je travaillais ; elle ne manquait de rien.

J'ai vu mon ancien patron avec ses habits froissés, le regard perdu et surtout à pied. Je crois qu'il a vendu sa voiture, donc le travail ne reprendra pas de sitôt. Avec un groupe d'amis, on a décidé de traverser la Méditerranée pour nous retrouver sur les côtes européennes, peu importe le pays, pourvu que nous quittions l'Afrique qui ne nous donnait plus rien.

On voulait passer par la voie légale en demandant le visa, mais on n'avait pas de garanties. Sans le dire à personne, encore moins à ma mère, j'ai traversé tout le désert pour me retrouver en Libye, non sans difficultés. Sur une vingtaine de personnes au départ, nous sommes arrivés ici à 3. Une pensée pieuse aux disparus dans le désert ; on ne pouvait rien faire pour les sauver, le risque était trop grand et on le savait avant de prendre la route.

Maintenant, me voilà sur la plage à contempler la mer et à me dire que dans 2 jours, je serai dans un bateau de fortune pour réaliser mon rêve d'aller en Europe et d'avoir une vie meilleure. Maman, je ne sais pas si tu liras cette missive, mais au cas où tu apprendrais que je ne suis plus de ce monde car englouti par la mer, sache que je t'aime et que c'est pour toi que j'ai entrepris ce voyage malgré ton refus. Priez pour moi.