Actualités of Sunday, 1 September 2024

Source: La Nouvelle n°771 du 2 septembre 2024

Libération des suspects : l'affaire Martinez Zogo prend une tournure spectaculaire

Affaire de l'assassinat du journaliste Martinez Zogo Affaire de l'assassinat du journaliste Martinez Zogo

Le lundi 19 août 2024, a eu lieu au Tribunal militaire de Yaoundé, la 9e audience du procès sur l'enlèvement et le meurtre de Martinez Zogo, célèbre animateur de la radio d'Amplitude FM. Seulement, à en croire un observateur averti qui suit de très près cette affaire, l’on aura très vite subodoré une nouvelle tentative de libération des assassins présumés et leurs complices. Et comment ? Esquisse de décodage.

Les Camerounais qui suivent de façon très particulière cette affaire en raison de l’émotion qu’elle suscite aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays, ont beaucoup de peine à cacher leur tristesse et leur colère. Une colère sourde à l’égard d’un système judiciaire qui semble avoir érigé le déni de réalité et de justice en norme. Ce 19 août 2024 est un jour à marquer d’une pierre noire.

Le Tribunal militaire de Yaoundé a été le théâtre de la plaidoirie éhontée du commissaire du gouvernement pour d'une part retoquer, c’est-à-dire refuser la qualité de partie civile de l'État du Cameroun dans cette affaire et d'autre part, préparer l'opinion nationale et internationale à la célébration envisagée de la libération des acteurs majeurs de cette macabre besogne à savoir : Jean-Pierre Amougou Belinga, PDG du groupe l’Anecdote et Léopold Maxime Eko Eko, ancien DG de la DGRE.

Une décision controversée qui soulève des questions sur l’impartialité et l’indépendance du système judiciaire. Encore plus incroyable, c’est que cette décision a été rendue à la demande du commissaire du gouvernement pourtant censé représenter l’État et par là, la société toute entière. L’État s’est donc vu refuser tout accès à un procès équitable. Pis, il lui sera imputé sans même attendre les déclarations de culpabilité des accusés, la responsabilité de toutes les futures condamnations.

De l’avis de nombreux juristes avertis, cette décision inique trahit l’intime conviction des juges qui, avant même de s’être prononcés au fond, ont déjà dit et jugé que les nommés Jean-Pierre Amougou Belinga et Léopold Maxime Eko Eko n’étaient pas des donneurs d’ordre dans l’exécution des faits d’assassinat ou de torture.

Groupes mafieux. L’État étant civilement responsable, cela signifie purement et simplement qu’il a une responsabilité directe dans le crime commis contre le journaliste d’Amplitude FM, Martinez Zogo. En d’autres termes, les agents de la DGRE avaient été mis en mission par l’État. Quelle hérésie !

Comme quoi, au Cameroun, pays divers et ondoyant devenu « continent », on est capable du meilleur comme du pire. Après avoir échoué dans leur tentative honteuse de faire exfiltrer vers l’étranger, les susnommés le 1er décembre 2023, les commanditaires présumés de l’assassinat de Martinez Zogo encore en liberté, en remettent une couche dans leur stratégie bien huilée de manipulation de l’opinion.

Et ce n’est peut-être pas un hasard si la primeur de l’information sur les décisions scandaleuses rendues par le Tribunal militaire au cours de cette 9e audience, a été réservée à RFI qui ne cache plus sa proximité avec quelques pontes du sérail nommément cités par un des exécutants de l’assassinat odieux de Martinez Zogo.

L'histoire qui suit vient tout simplement nous rappeler que le peuple camerounais se doit de rester aussi vigilant dans cette affaire qu’il ne l’est quand il s’agit de football. Alors qu’on croyait avec le départ du colonel Sikati II Kamwo Gombo, en avoir terminé avec ces comportements de magistrats ripoux pour qui l'argent n'a pas d’odeur, ni de cœur, on se rend à l’évidence que les couloirs du Tribunal militaire sont loin d’être complètement aseptisés.

La corruption continue de dicter sa loi. Mais ces magistrats ripoux semblent oublier que le même argent qui soude les groupes mafieux finit par les assommer. Alors question : comment peut-on plaider pour la libération des acteurs majeurs de ce dossier tout en voulant vouer aux gémonies Justin Danwe et sa bande, pourtant exécutants dans cette affaire ? Manière insensée et cruelle d’en faire des boucs émissaires parfaits, remettant ainsi au goût du jour cette célèbre citation de Jean de la Fontaine : « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir ».

Conclusions sulfureuses. Non, non et non ! Monsieur le commissaire du gouvernement et consorts, en vous laissant embarquer sur cette voie, vous avez péché par corruption en bande organisée, recel de favoritisme et de corruption active, etc. Vous tentez ainsi de piétiner la loi avec vos airs suffisants. Vous semblez avoir perdu de vue la notion d'imputabilité qui engage la responsabilité de toute personne qui a eu connaissance d'un acte délictuel commis. L'acte criminel a toujours ses concepteurs et ses exécutants.

Il serait malvenu de croire que vous l'ignorez. Vos conclusions sulfureuses ne passeront pas. Le projet que vous mitonnez échouera. Soyez-en sûrs. La vague est en train de monter, évitez qu'elle vous emporte. Dans ce pays où circule de plus en plus le virus de la haine, sachez que le petit peuple vous regarde. Vous qui croyez avoir le vent en poupe. Vous feriez mieux de méditer tous les jours ces paroles de Montesquieu : « Les juges ne sont que la bouche qui prononce la parole de la loi ».