Candidate déclarée à la présidence du MRC face à Maurice Kamto, elle revient sur les tribulations internes que traverse actuellement cette formation politique et réitère son objectif de remettre la base militante au cœur du processus de prise de décision, pour mieux affronter les prochaines échéances électorales.
Le MRC est depuis quelque temps secoué de l'intérieur par des critiques de certains cadres, dont vous. On a même récemment assisté à une démission (Sosthène Médard Lipot) et une exclusion (Me Tamfu). Comment appréhendez-vous ce qui passe actuellement au sein de votre parti ?
Ce qui se passe dans le parti est la raison de mon engagement et de ma décision de briguer le mandat de président. Ces démissions ont commencé il y a bien longtemps et se sont multipliées depuis fin 2019. Il y a celles que l'on remarque, celles de cadres, voire de dirigeants du parti. Mais il y a les silencieux, la base militante, qui font moins de bruit quand ils démissionnent mais dont le départ nous fait plus de mal. On m'a révélé dernièrement le départ de 300 militants dans le département du Moungo.
Ils sont ceux qui donnent sens et justification à notre action. Leur départ est un message de défiance et/ou de découragement que nous devons recevoir, analyser, mais surtout auquel il faut répondre avec force et sérieux. Ma réponse est de leur dire que nous reconnaissons à la fois leurs tribulations face à la dureté du régime, nos erreurs passées, mais aussi que nous nous sommes remis en question, avons analysé nos actions de ces dernières années avec froideur et humilité et appris de nos erreurs.
Que nous voulons aujourd'hui rassembler les amis politiques à travers toute la Nation, réformer notre parti mais surtout restaurer leur confiance en proposant une nouvelle dynamique, portée par des militants donc le parcours est parlant et la force de l'engagement démontrée. En clair, je voudrais que le MRC soit à nouveau un parti où chaque Camerounais qui a soif de liberté, de démocratie, quelle que soit son appartenance ethnique ou religieuse, sociale ou linguistique, puisse se retrouver.
Votre dernière sortie sur les réseaux sociaux n'a manifestement pas plu au secrétaire général, Ndong Christopher Mveh, qui juge vos déclarations « diffamatoires et mensongères », tout en vous menaçant de « poursuites disciplinaires ». Que répondez-vous à cela ?
Il faut commencer par reproduire l'intégralité des paragraphes dont le texte est extrait : « Nous, on ne nous fait pas taire. Nous construisons avec les amoureux de notre chère Patrie une Terre de personnes debout, sans haine, ouverte et sans crainte. Aucune exclusion, aucune manœuvre d'intimidation, aucune opération de boycott de concert, aucun saccage de boutique pendant la nuit, aucune agression d'artiste, aucune campagne de dénigrement dans les réseaux sociaux n'empêchera ça. Ce parti n’appartient pas à Maurice Kamto. Maurice Kamto n'est pas le MRC , le MRC n'est pas Maurice Kamto. Ce n’est pas sa chose dont il dispose comme bon lui semble… Tout mon soutien Maître Tamfu Richard.
On reste debout et on avance ! » Vous le verrez aisément, le passage a été malicieusement extrait (ou peut-être hâtivement sorti) de son contexte pour lui faire dire quelque chose qu'il ne dit pas. Quiconque est familier de l'actualité de notre pays sait que l'intimidation, la violence, sont des pratiques courantes, notamment de la part du régime en place ; elles sont devenues des méthodes pour réduire au silence auxquelles ont recours des Camerounais de tous bords politiques, idéologiques, voire de toutes origines... Personnellement lorsque je dénonce, je tâche de dénoncer des actes, non des personnes. Sans parti pris. Et je n’ai pas non plus l’habitude d’attribuer des actes à ceux qui ne les ont pas commis. Le laisser croire, relève simplement de ma mauvaise foi. Les basses manœuvres sont courantes dans le monde politique.
Ce qui est plus préoccupant, c'est que des cadres dirigeants de mon parti, le MRC , surtout avec la crise à laquelle nous faisons face, s'empressent de saisir la voie de l'antagonisme et du conflit... Nous devrions nous concentrer sur les mesures à prendre pour rassurer les militants et nous préparer à une saine compétition en novembre. Je veux donc croire qu'il s'agit d'un déchaînement de passions passager et que la raison va rapidement reprendre le dessus.
Doit-on entendre à travers votre Tweet que les militants du MRC sont responsables de ces actes et que Maurice Kamto les cautionne ?
Ce Tweet intervient dans une série et ne doit pas être compris hors de ce contexte. D'ailleurs, le saccage de boutiques s'est produit à Sangmélima et l'une des victimes au moins est un militant du MRC . Peut-on sérieusement dire que j'accuse Maurice Kamto d'en être le responsable quand je dis que le parti ne lui appartient pas ? Quel rapport entre la « propriété » du parti et le « boycott » d'un concert ? Non, décidément, il n'y a pas plus sourd que celui qui...
L'on vous accuse de conspirer contre le parti. Ce qui pourrait vous valoir une exclusion, auquel cas vous ne pourriez plus challenger Maurice Kamto présidence du MRC ...
On m'accuse en effet. Des personnes sans nom, sans visage... Moi, conspirer contre le MRC , c’est simplement risible. Quel militant de ce parti qui sait ce que je lui ai sacrifié pourrait croire une telle ineptie ? Je ne répondrai pas aux inepties. Mais pour les militants (peu nombreux j'en suis sûre) que cela pourrait inquiéter, les actes parlent mieux que les (mauvaises) paroles : si j'avais quitté le parti en 2019 et rejoint n'importe quelle formation politique j'aurais certainement été élue députée. Je m'y suis refusée, malgré l’appel des sirènes. Au lieu de cela, j'ai publiquement soutenu la décision annoncée par le Professeur Kamto, qui pourtant m'avait prise par surprise, de boycotter les élections. J'ai été la seule à faire ce choix dès ce jour-là. Pour venir aujourd'hui « conspirer » contre un parti qui ne compte plus ses démissions ? Tout en essayant malgré toutes sortes de manœuvres et de pressions de présenter ma candidature pour en devenir présidente ? Allons... Allons…
Pour sortir, quelle ligne entendez-vous donner au MRC si jamais les militants vous accordent leur confiance pour le diriger ?
Il y a mieux à faire en effet qu'entretenir les querelles internes actuelles. Il convient de proposer une alternative crédible à la direction en place. Pour moi 2025 est une échéance importante pour le parti dans la mesure où elle sera une année d'élections locales : La politique de la chaise vide ne paie pas, le président actuel du parti l’avait dit lui-même en son temps. Et il avait tellement raison que le boycott qu’il a imposé en 2019 place le MRC dans une position impossible, puisque de ce fait, il ne pourra présenter un candidat à l’élection présidentielle de 2025. Mon objectif est de rassembler le parti et le préparer pour reconquérir son électorat de base lors des élections législatives et municipales de 2025. Et ça, ça se prépare en 2023.
Mon projet tient en quelques points :
rassembler le parti autour de ses valeurs, rétablir son implantation nationale et assurer sa représentativité de la diversité camerounaise.
réformer le fonctionnement, pour séparer les fonctions administratives et politiques dans le parti : les élus mettent en œuvre la politique du parti là où ils sont élus, le fonctionnement du parti est assuré par les organes votés par les militants ;
remettre la base au cœur du processus de prise de décision : plus de surprise comme en 2019, c'est la base qui se prononce et le leader suit la base.
remettre le parti au travail : nous devons avoir des propositions politiques claires pour le pays, pour chaque région, pour chaque localité. Nous devons préparer des candidats pour les échéances électorales et nous préparer sur le plan logistique pour contrôler les votes -
s'agissant des présidentielles, réinstaurer les primaires que le Président actuel a supprimées : le choix de notre candidat à la présidentielle doit être le résultat d'une compétition interne. Notre champion doit déjà nous convaincre avant d'aller défendre nos couleurs devant les camerounais.