Actualités of Thursday, 5 May 2022

Source: Mutations N° 5574

Misère et précarité économique de la presse au Cameroun : voici le diagnostic qui fâche

La presse camerounaise est dans une précarité La presse camerounaise est dans une précarité

Le ministre de la Communication est passé aux aveux à l’occasion de la 31ème édition de la Journée mondiale de la liberté de la presse.

Il convient de reconnaître que, dans sa grande majorité, la presse camerounaise est en proie à une situation économique particulièrement préoccupante. » Cet aveu est du ministre de la Communication (Mincom), René Emmanuel Sadi, le 03 mai dernier, à l’occasion de la célébration de la 31ème édition de la Journée mondiale de la Liberté de la presse. Dans sa traditionnelle déclaration face aux journalistes dans son département ministériel, le porte-parole du gouvernement établit un diagnostic conforme à la réalité vécue par les acteurs de la corporation : la précarité économique des structures médiatiques. Un malaise qui n’est pas sans conséquences sur la qualité des contenus, et donc le rendement des journalistes. Pour la presse, ce marasme « impacte fortement la valorisation de ses ressources humaines, et d’une manière générale, ses performances d’exploitation », poursuit-il. En revanche, le gouvernement dit avoir pris « toute la mesure » de la situation. Parmi les initiatives engagées, René Emmanuel Sadi évoque un dialogue ouvert « en profondeur » avec les corps intermédiaires de la profession, notamment les « regroupements professionnels divers et syndicats de journalistes », ceci afin de « parvenir, dit-il, à une plate-forme commune des problématiques et des solutions susceptibles d’améliorer de façon durable, les équilibres d’exploitation des entreprises médiatiques nationales ». Par ailleurs, la création d’un fonds de développement de l’audiovisuel institué par la loi de 2015 régissant l’audiovisuel favorisera, selon le Mincom, la constitution d’un mécanisme de soutien substantiel aux sous-secteurs concernés. Quant à la presse écrite et cybernétique, le ministre estime que l’appui institutionnel aux médias à capitaux privés s’est « accru » et que « des efforts continueront d’être faits dans ce sens ». Au plan juridique, le membre du gouvernement annonce la « mise en chantier » de la loi-cadre sur la communication sociale, en vue d’une « refonte en profondeur » de ce texte « sur la base des résolutions et recommandations des derniers états généraux de la communication ». Il est question de mettre à niveau les dispositions légales qui encadrent l’exercice des activités médiatiques et des différentes professions de la communication.


700 titres

Relativement à la liberté de la presse proprement dite, le Mincom se gargarise du foisonnement observé dans l’environnement médiatique camerounais. « Le Cameroun compte à ce jour, près de 700 titres dans la presse écrite (…), plus de 150 stations de radiodiffusion sonore, dont une cinquantaine de radios communautaires, environ une centaine de chaînes de télévision et une presse cybernétique florissante et dynamique », énumère-t-il. Une évolution tributaire de la « volonté politique affirmée » du président de la République qui, selon le porte-parole du gouvernement, « a institué à la fois la liberté d’entreprendre et la liberté de publier ». Aussi, observe-t-on « une liberté de ton particulièrement prononcée, sans aucune forme d’influence extérieure en dehors de celle édictée par les règles éthiques et déontologiques, ou par les lois en vigueur ». De manière péremptoire, René Emmanuel Sadi affirme que « les femmes et hommes de médias au Cameroun, exercent leur métier au quotidien en toute liberté et en toute indépendance». Cependant, un certain nombre de dysfonctionnements et de dérives sont à regretter. « Au nombre de ces carences, se trouve en premier la bellicisation et la transformation des plateaux de débats dans les chaînes de radios et de télévisions, en de véritables juridictions qui, au quotidien et au vu et au su de tous, rendent des sentences au bénéfice ou à l’encontre des uns et des autres ». Les cas de diffamation et invective ne sont pas en reste. Pour René Sadi, ces dérapages « sont le fait de nouveaux acteurs impertinents, habités par la volonté délibérée de porter préjudice à la morale et à la décence publiques, ainsi qu’à l’honneur et la considération des personnes et de la patrie ». Pour assainir l’espace public médiatique national, le ministre préconise « une prise de conscience collective par les différents acteurs bénéficiaires des vertus que porte la liberté d’expression et la mise en place d’un véritable cadre d’autorégulation professionnelle ».