L’Université Lumière de Lyon en France vient d’honorer ses nouveaux Docteurs. C’était au cours d’une cérémonie riche en couleurs organisée au Grand Amphi de Lyon 2. Le fait marquant de cette cérémonie de remise des diplômes de Doctorat c’est que parmi les quatorze lauréats de la promotion, se trouvait une camerounaise, l’hon. Fotso Fostine. De son retour, Dr Fotso Fostine s’est confiée à nous. Elle parle prioritairement de son choix de l’environnement comme sujet de thèse.
Je commencerais par vous adresser au nom de toute la rédaction, nos sincères félicitations Docteur. Vous êtes de retour de Lyon avec un Doctorat en Droit Pénal de l’Environnement. Qu’est ce qui a pu motiver votre choix de l’Environnement et pourquoi l’étude comparative des systèmes français et camerounais en matière de droit de l’environnement ?
Merci pour l’intérêt que vous accordé à ce sujet. Je dirai simplement que depuis un certain temps, l’on a constaté que la nature subissait des atteintes inacceptables. L’environnement était malade. Malade des atteintes qu’il subissait, mais malade surtout du silence que la loi avait face aux différentes dégradations. C’est pour cette raison que les législateurs français et camerounais ont mis sur pied un arsenal législatif important permettant d’assurer une meilleure répression des atteintes à l’environnement. De manière littérale, la notion d’environnement est en perpétuelle mutation. Dans les années 1970, le droit de l’environnement est entendu au sens de la protection du cadre de vie. C’est ce qui a conduit le législateur français à adopter la loi N°76/ 729 du 10 juillet 1976 portant sur la protection de la nature et la protection de l’espèce. Cette loi structure ainsi l’environnement en 03 composantes : la nature (espaces, espèces animales et végétales, équilibre biologique) les ressources naturelles (l’eau, l’air, la terre) et les sites des paysages (l’urbanisme, la forêt...). La loi Camerounaise N° 96/12 du 05 Août 1996 portant loi-cadre relative à la gestion de l’environnement prend la peine d’intégrer dans son campus toutes ces données. De manière générale, deux courants de pensées gouvernent la définition de l’environnement. On rencontre d’abord les tenants de la conception stricte qui voient en l’environnement le sens des éléments naturels ensuite la seconde conception beaucoup plus large soutient que l’environnement se rapporte à la santé, au social, voire à l’esthétique. De nos jours, de nouveaux concepts sont apparus autour du terme environnement comme les notions de biosystème, de biodiversité, de développement durable, de développement soutenable. A cet ensemble, s’ajoutent des activités périphériques comme l’amélioration de la qualité de l’environnement, la gestion des risques technologiques, l’organisation et la mise en œuvre des interventions en cas de catastrophe naturelle ou le développement d’activités de substitution (énergie renouvelable, transports collectifs, etc.…).
Néanmoins, l’environnement est susceptible de subir des atteintes d’une gravité inestimable. Ces atteintes peuvent être constituées par la pollution de l’eau, de l’air, du sol, la dégradation des milieux naturels et des écosystèmes, les déchets, les nuisances sonores et olfactives. Quand ces atteintes surviennent, elles sont dûment constatées et un régime de sanctions appropriées leur est réservé. La présente recherche met en exergue plusieurs intérêts indéniables. Théoriquement, elle permet de mieux cerner la répression du droit de l’environnement en droit français et camerounais pour le rendre plus compréhensible aux praticiens du droit. Vous comprenez qu’il était judicieux pour nous de travailler autour de ce sujet afin d’attirer l’attention sur un certain nombre de choses.
Concrètement et de manière pratique, à quoi pourra servir cette recherche ?
Pratiquement, cette recherche se veut en outre un apport à la sécurité juridique et à la protection de l’environnement que ce nouveau droit incarne. Elle apparaît d’ailleurs à un moment plus que jamais déterminant où la mondialisation impose au monde et aux deux Etats choisis, la sécurité et la transparence dans la gestion des problèmes environnementaux, pour accroître la confiance et la sécurité sanitaire de la population. L’étude permettra de fournir un éclairage aux citoyens des deux Etats sur le degré de la sécurité juridique environnemental. Scientifiquement, elle permet la redéfinition du concept du droit de l’environnement. Cette réflexion apparaît à un moment où la problématique de la protection de l’environnement trouve un écho favorable dans le monde et plus précisément en France et au Cameroun. Le problème de la répression des atteintes à l’environnement alimente sans doute la quasi-totalité des discours politiques et économiques et crée donc un nouveau champ de recherche que nous voulons contribuer davantage à défricher à travers cette thèse. Cette étude permettra de tisser des passerelles pour aboutir à une certaine uniformisation des deux systèmes juridiques. Ce travail permet la redéfinition du concept de l’environnement. Fondamentalement, l’étude entend proposer un encadrement de la protection de l’environnement en vue de la sauvegarde du bien être des personnes physiques et morales. L’étude ainsi amorcée va permettre d’opérer un décryptage en relevant aussi bien la pertinence que l’insuffisance des dispositions gouvernant la répression des atteintes à l’environnement dans les deux Etats. Pédagogiquement, elle met en relief un aspect instructif et éducatif indéniable vis-à-vis des acteurs dans les deux Etats, y compris des acteurs économiques, de tous ceux qui interviennent dans la protection de l’environnement, en l’occurrence les autorités judiciaires et les experts. Le but recherché vise à dresser un bilan de l’état actuel de la répression des atteintes à l’environnement dans une branche du droit de la troisième génération qu’est le droit de l’environnement. Sur le plan juridique, cette recherche offre aux juristes environnementalistes des deux pays de connaître des dispositions en vigueur dans chacun des systèmes en étude en matière de lutte contre les dégradations. Elle permet également de connaître les lacunes que présente chaque système juridique en vue de susciter des reformes, pour permettre des améliorations. Sur le plan diplomatique, elle favorise le rapprochement entre les deux pays par l’intermédiaire des colloques et séminaires et de toute autre action visant à renforcer la coopération dans ce domaine. Au vrai, la préoccupation fondamentale qui s’est posée était celle de savoir si les différents textes pénaux édictés par les législateurs camerounais et français permettent de lutter efficacement et effectivement contre les atteintes à la nature dans les deux espaces ?
A cette question fondamentale, nous avons émis l’hypothèse selon laquelle les textes existent dans les deux systèmes, mais, demeure encore insuffisant tant sur le plan législatif que sur le plan de sa mise en œuvre (judiciaire) et, par conséquent, devrait être améliorée. Pour répondre à cette question posée, l’idée d’étudier la répression des infractions relatives à la protection de la nature dans chacun des deux systèmes, paraissait bien séduisante, cependant, cette idée avait l’inconvénient d’être menée certes en deux parties, mais séparément, ce qui aurait sans doute exposé l’étude à des critiques. Cette approche avait en revanche l’avantage d’éviter certaines difficultés, cependant, elles avaient le désavantage de n’être pas favorable à un examen cohérent et intégral de la question. Par conséquent, cette approche a logiquement été rejetée. Il nous fallait donc trouver une approche qui combine les avantages de celles qui avaient été rejetées en évitant autant que faire se peut les inconvénients.
Il se trouve que votre thèse se trouve déjà en Librairie. Ce qui expliquerait la qualité du travail. Quelle méthode de travail avez-vous adopté pour parvenir à ces fins et quelles leçons à tirer ?
A la lumière des méthodes : comparative, analytique, synthétique et exégétique, nous avons choisi une option en faveur de l’amélioration des règles destinées à la répression des infractions relatives à la nature. Ce qui nous a amené à adopter un plan binaire qui met en exergue l’organisation de la répression des atteintes à l’environnement dans les systèmes juridiques français et camerounais (première partie) et l’efficacité relative de cette répression (seconde partie). Pour ce qui est des actes répréhensibles, plusieurs infractions ont été identifiées (leur typologie est justifiée par le fondement qui les confirme clairement). Pour ce qui est des organes en charge de la répression, l’on a noté d’une part le rôle important joués par les organes juridictionnels au côté desquels, on retrouve la prolifération des autres organes dits spécifiques qui contribuent tant bien que mal à la protection de la nature, bien que ce soit une protection préventive ! Malheureusement, on peut regretter l’incurie de l’organe judiciaire du Cameroun, au vu du grand nombre d’atteintes constatées dans cet espace, qui hésite toujours à mettre en mouvement une action publique pour voir sanctionner les atteintes à la nature ! De là, il s’ensuit que non seulement les textes prévues en la matière doivent être révisées, mais les acteurs en charge de la répression doivent jouer leur rôle sans état d’âme. Cette répression demeure encore insuffisante et perfectible. Insuffisante pour la simple raison qu’elle fait face à plusieurs obstacles : l’inapplication stricte des textes en vigueur, les incohérences relevées dans les textes, l’absence de formation et surtout de spécialisation des magistrats. Sa perfectibilité passe par une profonde et nécessaire réforme judiciaire et législative d’abord mais en sauvegardant les particularités importantes pour favoriser et encourager la coopération législative et judiciair