Le directeur général de la compagnie aérienne nationale évalue le chemin parcouru depuis son arrivée à la tête de Camair-Co le 22 août 2016, entreprise en redressement selon un plan proposé par l’américain Boeing et validé par le gouvernement.
Sur le Boeing 767 dénommé « Le Dja », le plus important appareil de la flotte, cloué au sol depuis plusieurs mois.
On se pose la question de savoir s’il peut encore voler. On peut dire aujourd’hui que le débat a évolué, parce que l’avion a volé pour arriver en Ethiopie. Dans le processus de remise à niveau du Boeing 767, je voudrais rappeler qu’en termes d’équipement c’est un appareil qui appartient au gouvernement camerounais et sur lequel repose le capital de la compagnie. Puisque c’est un trésor. A un certain moment, il y a des gens qui ont pensé qu’on pouvait le transformer en avion-cargo. C’est un avion qui n’a volé qu’à près de 17% de son potentiel. Nous avons pensé donc dire à l’Etat qu’il y a un potentiel-vie qui permet de maintenir cet appareil en exploitation.
Cependant, pour remettre un avion en exploitation, il y a trois choses que nous devons faire sur Le Dja dont deux sont indispensables, la révision ou grande maintenance et la remise à niveau de nos moteurs. Un avion sans moteur n’est pas un avion. Il y a des décisions qui ont été prises pour les moteurs du Dja qui méritent d’être recyclés.
LIRE AUSSI: Ambazonie: révélations choc d’un soldat déserteur dans une lettre
Nous allons le faire au courant de l’année prochaine. Donc, les moteurs ont été déposés, certains ont été loués. Les moteurs qui sont accrochés sur cet avion aujourd’hui ne sont pas les nôtres. Dans tous les cas, il faut qu’on les remette aux gens qui en sont propriétaires. C’est une décision qui a été validée par notre tutelle financière. Nous avons fait une requête dans ce sens et le gouvernement a accepté que ces moteurs soient retournés. Il faut donc qu’on réhabilite nos moteurs. Pour ce faire, il faut analyser les conditions dans lesquelles sont ces moteurs.
Sur le choix de l’Ethiopie pour accueillir Le Dja, et non le Cameroun.
Vaudrait mieux que l’avion soit en Ethiopie qu’à Douala. Parce qu’en termes de conditions climatiques, l’altitude d’Addis- Abeba est meilleure pour pouvoir garder un avion en panne. C’est la raison pour laquelle vous verrez dans le désert d’Arizona beaucoup d’avions parqués, parce qu’au regard du climat, il y a des zones appropriées pour garder les avions.
L’avion n’est pas gardé, il y a des documents de l’avion que la compagnie attendait de Boeing qui sont déjà livrés à Addis-Abeba. Maintenant, il y a un chronogramme de travaux à faire sur cet avion. Il y a la réhabilitation des moteurs et la grande maintenance qui sont indispensables. Il y a un autre projet qui est à la limite facultatif. Si on a les moyens on peut le faire, c’est les travaux du produit intérieur de l’avion. Il faut le remettre à niveau, c’est possible. Mais, cet avion va faire quels travaux après ?
Nous pouvons le remettre en état et nous faire beaucoup d’argent. Aujourd’hui, nous avons des contrats qui sont en veilleuse avec les Nations unies pour le transport des troupes à travers le monde. Si on avait cet avion en état, on pouvait se faire beaucoup d’argent, environ un million de dollars par mois (Environ 520 millions Fcfa). Le problème ne se pose pas à ce niveau, la décision managériale jusqu’à date est de conserver cet avion et de ne pas céder à une autre tentation.
Sur le personnel de 568 personnes pour une flotte de six avions. Combien de personnels faut-il pour un avion, de l’administration à l’exploitation ?
Nous sommes actuellement 568 employés. Est-ce le bon nombre ? Je n’en sais rien. Tout simplement parce que j’ai sûrement des collaborateurs qui ont besoin d’être formés. Certains, selon leurs propres déclarations, ne savent même pas pour quelles raisons on les a envoyés dans tel ou tel autre département. Ils se sont retrouvés dans la compagnie et je souffre de pouvoir retravailler sur leur profil pour pouvoir rendre leurs performances optimales. Pour le ratio avion-employés, j’espère qu’on en parle pour la dernière fois, ça n’a rien à voir. Cette équation ne peut être liée qu’au niveau d’utilisation de l’avion.
Il y a des compagnies qui ont 1200 avions et d’autres 400. Un seul avion peut faire huit fois l’autre, quant à la capacité. Tout dépend du nombre de sièges dans l’avion. Il faut aussi voir le niveau d’utilisation d’un avion. Nous avons deux MA60.
Quelle est la moyenne d’utilisation des avions à Camair-Co aujourd’hui ?
Il arrive des moments où on pense que les problèmes de la compagnie c’est les avions. Le problème de Camair-Co aujourd’hui ce n’est pas les avions. Les avions que nous avons, nous les utilisons à environ 65% de leurs potentiels.
Un avion est fait pour voler. Nous avons la capacité, nous avons deux avions qui arrêtent de travailler à partir de 22h, parce que nous n’avons pas de pilotes. Nous avons besoin d’une vingtaine de pilotes. Le ratio qui doit être utilisé, en principe, est lié à la fois au nombre d’avions et au niveau d’optimisation dans les heures de vol. Les compagnies qui utilisent beaucoup leurs avions - un avion sur près de 18h/24- ont les ratios les plus élevés. Et ça dépend du type d’avion. L’équation qui est intéressante pour Camair-Co dans cette phase de restructuration, c’est l’équation de la gestion de ses dépenses par rapport aux revenus d’exploitation.
LIRE AUSSI: Ambazonie: un site de fake news pro-Biya pour tronquer l'actualité
Si nous avons le carburant à près de 25% de nos recettes, le carburant doit être la première dépense. Les ressources humaines doivent être la seconde dépense et la formation la troisième, nous sommes autour de 20% de nos revenus.
La maintenance est plus élevée que la formation. Nous avons pu arriver à ce ratio en octobre 2017 où la masse salariale était très élevée, nous avons pu la ramener actuellement en deçà de la partie de nos revenus qui va dans le carburant. Pendant que nous allons dans la phase de développement, il est très important de maîtriser notre gestion et nos charges. Lorsque nous deviendrons autonomes en maintenance, et que nous commencerons à offrir des services aux autres compagnies, la formation va prendre le dessus.
Sur l’acquisition du Bombardier Q400 acheté avec des fonds propres de la compagnie qui aurait provoqué des arriérés de trois mois de salaire.
Camair-Co n’a pas eu trois mois d’arriérés de salaire. Depuis le mois d’octobre 2017, il y a eu un retard de salaire en mai. Ces salaires ont été déclenchés deux semaines après la date initiale. Après, le reliquat a été payé progressivement. C’était un retard de quelques semaines. Au moment où nous parlons, il n’y a pas d’arriérés de salaire à Camair-Co.
Le problème n’est même pas au niveau des salaires, le plus grave c’est que ces salaires ne valent rien aux yeux des banquiers. Aujourd’hui, les banquiers viennent nous rencontrer pour nous dire comment est-ce qu’ils vont nous soutenir pour apprécier la tendance que nous sommes en train de faire.
Au sujet du Q400, si nous pouvons avoir l’ingénierie de créer de la valeur ajoutée, au lieu de tendre la main aux Finances, en faisant entrer un avion en service, avec des fonds propres, c’est important.
Nous pouvions décider, avec ce que l’Etat nous a donné, de rester au même niveau, faire des vols vers Garoua, etc. Avant, nos avions faisaient plusieurs semaines à terre. Depuis le début de cette année, aucun avion n’a été immobilisé pendant plus de 48h, parce que nous avons payé le support équipement.
Sur le non-règlement des factures par les membres du gouvernement qui a souvent plombé les activités de la compagnie.
Depuis que je suis à Camair-Co, il n’y a pas eu un seul billet d’avion qui a été imprimé sans être payé. Que ce soit les membres du gouvernement ou pas, personne n’emprunte nos avions à crédit. Les gens qui ont toujours parlé de l’Etatclient doivent avoir un peu de respect vis-à-vis de l’Etat. Sans doute que les autres ont géré autrement, mais depuis que nous sommes là, même le ministre des Transports, l’ancien ou l’actuel, fait des réservations et paie son billet.