La haute juridiction a ajourné l’examen du pourvoi de l’ancien secrétaire d’Etat, accusé d’un détournement présumé de 168 millions de francs perpétré à la commune de Yokadouma du temps où il était maire. Le siège et le parquet général s’opposent sur le calcul des délais. Le cas Abono Moanpang divise la Cour suprême.
Le 13 mars 2018, Paulin Abono Moanpang est apparu gonflé à bloc lorsqu’il a comparu à la barre de la Section spécialisée de la Cour suprême. L’ancien secrétaire d’Etat aux Travaux publics et ex maire de la commune de Yokadouma (2002-2007) affichait une mine pleine de motivation d’en finir avec l’affaire de détournement de deniers publics qui l’oppose à l’Etat du Cameroun (commune de Yokadouma).
Mais, à peine le dossier appelé, les formalités d’usage remplies, Isaïe Ngatcha, le représentant du ministère public, va promptement solliciter une déprogrammation du dossier (sortie du rôle), «pour permettre au parquet général de produire ses conclusions dans le dossier», dira-t-il. La Cour a fait droit à la doléance du «vieux» magistrat.
Un report de cause qui a surpris plus d’une personne dans la salle d’audience quand on sait que l’échange des écritures entre les parties dans ce dossier est achevé depuis février 2014. Et, depuis cette date, toutes les conditions sont réunies pour un examen final de la section spécialisée.
Selon les informations recoupées par Kalara auprès d’une source à la Cour suprême, le problème est ailleurs. En effet, indique notre source, le parquet général est opposé aux conclusions du conseiller-rapporteur qui propose à la Cour, comme solution, de déclarer le pourvoi de l’ex maire irrecevable en la forme, pour défaut tardif de son recours.
En effet, le conseiller rapporteur se serait appuyé sur le texte de loi de 2011 créant et organisant le Tribunal criminel spécial (TCS), modifié et complété en 2012. Selon ce texte, les parties, en matière de détournement de deniers publics, ne disposent que d’un délai de 48 heures à compter du prononcé du verdict d’une décision pour se pourvoir en cassation.
Or, lorsque la Cour d’Appel de l’Est a rendu l’arrêt attaqué par l’ex secrétaire d’Etat xxxx, le TCS n’était pas encore fonctionnel. Il ne l’a été qu’en octobre 2012. C’est donc sur la base du Code de procédure pénale, qui laisse un délai de 10 jours aux parties pour attaquer une décision pénale, toute nature confondue, que l’ancien secrétaire d’Etat a fondé sa démarche. Une position qui serait celle du parquet général qui, dans ses premières conclusions, appelle à la recevabilité du recours en la forme.
Pour éviter un clash en public, le parquet général a préféré que l’examen du dossier soit purement ajourné. Paulin Abono Moanpang devra encore prendre son mal en patience pendant des mois, voire des années, le temps que le siège et le parquet général de la Cour suprême aplanissent leur dissonance et trouvent la bonne formule dans son dossier.
En rappel, Paulin Abono Moanpang répond d’un détournement présumé de 168 millions de francs perpétré à la commune de Yokadouma du temps où il était maire. Depuis 2009, il est embastillé à la prison centrale de Bertoua après sa condamnation à 12 ans d’emprisonnement écopé devant la Cour d’Appel de l’Est en 2012. Un arrêt dont le recours en contestation divise aujourd’hui les hauts magistrats de la Cour suprême.