Le soir du 04 novembre 1982, le Cameroun a connu un véritable coup de tonnerre lorsque celui qu’ils appellaient affectueusement « le père de l’indépendance » rendait sa démission en personne sur la radio nationale.
De Douala à Yaoundé, de Ngaoundéré à Garoua sa ville natale, c’était la surprise générale en même temps que la consternation. La décision d’Ahmadou Ahidjo, après 25 ans de pouvoir sans partage, avait pris de court tout le Cameroun.
Il avait décidé de prendre congé du pouvoir et le confiait à son dauphin adoubé, Paul Biya, encore premier ministre. Une démission qui faisait de lui le deuxième président africain après Senghor à rendre son tablier alors que rien ne l’y contraint.
A l’époque, il déclarait que « Paul Biya mérite la confiance » et a invité « toutes les Camerounaises et tous les Camerounais à lui accorder, sans réserve, leur confiance et à lui apporter leur concours ». Mais la lune de miel entre lui et son successeur sera de très courte durée.
Très tôt, le torchon va brûler. Moins de quatre ans après sa démission, le bâtisseur de l’État camerounais sera accusé de tentative de putsch contre Paul Biya et condamné à mort par contumace. Il sera contraint à l’exil à Dakar où ses cendres reposent toujours.
Selon ses proches, il est mort détruit détruit par le chagrin.
Ci-dessous le discours de démission d’Ahmadou Ahidjo le 04 Novembre 1982 :
«Camerounaises, Camerounais, mes chers compatriotes,
J’ai décidé de démissionner de mes fonctions de Président de la République du Cameroun. Cette décision prendra effet le samedi 6 novembre à 10 h. En cette circonstance capitale, je voudrais du fond du cœur remercier toutes celles et tous ceux qui, depuis bientôt 25 ans, m’ont accordé leur confiance et apporté leur aide dans l’accomplissement de mes lourdes tâches à la tête de l’Etat.
Je voudrais tout particulièrement remercier les militantes et les militants de notre grand Parti national, l’U.N.C. de leur soutien total, constant et inébranlable.
S’il reste beaucoup à faire dans la grande et longue œuvre de construction de notre cher et beau pays, nous avons ensemble accompli après l’indépendance, la Réunification et l’Unification, des progrès considérables dans tous les domaines.
Notre pays dispose d’atouts importants. L’unité nationale consolidée, des ressources nombreuses, variées et complémentaires, une économie en expansion continue, des finances saines, une justice sociale en amélioration, une population laborieuse et une jeunesse dynamique, de solides et fructueuses relations d’amitié et de coopération en Afrique et dans le monde.
J’invite toutes les Camerounaises et tous les Camerounais à accorder, sans réserve, leur confiance et à apporter leur concours à mon successeur constitutionnel M. Paul Biya. Il mérite la confiance de tous, à l’intérieur et à l’extérieur. Je vous exhorte à demeurer un peuple uni, patriote, travailleur, digne et respecté. Je prie Dieu Tout-puissant afin qu’il continue à assurer au peuple camerounais la protection et l’aide nécessaires à son développement dans la paix, l'unité et la justice.
Vive le Cameroun. »