Actualités of Thursday, 20 October 2022

Source: www.camerounweb.com

Procès des Prisonniers du Mrc : La défense récuse certains juges de la Cour d’appel

Maurice Kamto au tribunal Maurice Kamto au tribunal

Cette demande adressée à la présidente de cette juridiction est signée par Me H.B. Tiakouang Meli et le Collectif, le 12 octobre 2022 et reçue à la Cour d’appel du Centre le 18 octobre 2022. Amnesty international y a mis une pincée.

« A la veille de l'audience devant la Cour d'appel du Centre à Yaoundé, les avocats des détenus du Mrc sollicitent la modification de la composition de la Cour, celle-ci étant composée de militaires devant juger des civils, ce qui est contraire au droit international » , affiche Fabien Offner, un chercher à Amnesty international dans un tweet, pour mettre un peu de pression de toute évidence. « C’est pourquoi ils sollicitent conjointement, qu’il plaise à Madame le président, de bien vouloir modifier la composition actuelle de la Cour d’appel en charge des cinq procédures ci-dessus reprécises en désignant, à l’exclusion de tout officier de l’Armée, uniquement des magistrats de sièges, autres que M. Emgbang René Florentin, (président), M. Tankoua Gabriel Pascal (assesseur), qui ont déjà connu en d’autres circonstances les faits desdites procédures » , lit-on dans la requête du Collectif des avocats Sylvain Souop. Appelé pour en savoir davantage, Me H.B. Tiakouang Meli a indiqué que la défense a consulté le dossier de la Cour la semaine passée, et elle s’est rendue compte que l’officier de l’Armée, le colonel de l’Armée de l’air Baha Salomon Patrick (assesseur militaire) qui siégeait à l’audience la dernière fois, n’avait aucun mandat judiciaire existant dans le dossier. Il affirme ne pas savoir qui l’a désigné pour venir siéger à la Cour. « Nous nous sommes rabattus vers les textes et nous avons constaté que la composition de la cour n’était pas régulière. Elle n’est pas régulière parce qu’il y a d’abord la présence de cet officier de l’Armée de l’air qui siège aux côtés de deux magistrats de siège de la cour d’appel : M. Emgbang Ondoa René Florentin qui est président et à ses côtés M. Tankoua Gabriel Pascal. Ayant fait un peu des recherches sur la composition de la Cour qui va juger de la recevabilité ou bien sur le fond, nous avons conclu qu’il y avait des griefs à soulever contre cette composition. Nous contestons la présence de cet officier des Forces armées dans la composition de la Cour justement parce que bien que le dossier relève du tribunal militaire de Yaoundé, nous n’avons aucun client qui est un militaire. Ils sont tous des civils et depuis l’instruction de cette affaire, nous contestons la compétence des militaires quant à juger les civils. Et nous sommes confortés dans cette thèse justement parce que justement, nous sommes tombés sur trois arrêtés de la Cour suprême du Cameroun qui dit explicitement que le juge naturel des civils, c’est le juge de droit commun. Or un militaire ne peut pas siéger pour juger les civils. Nous souhaitons l’éviction du militaire qu’il soit officier ou pas dans la composition de la cour et nous apportons des arguments pour justifier que la Cour dans sa conception originelle ne comportait pas de militaires et l’article 20 du texte portant organisation judiciaire, nous conforte dans cette thèse parce qu’il n’y a pas de chambre militaire auprès de la cour d’appel et que c’est par abus que cette chambre existe auprès des juridictions. Sur cette base, nous demandons à Madame la présidente d’enlever Monsieur Baha Salomon Patrick de la composition de la cour. »


Les juges ont connu des faits probatoires de la cause

Il se trouve que les deux autres ont également des griefs. Notamment le juge Emgbang Ondoa qui est le juge qui a statué en matière correctionnelle, dans l’affaire qui confirmait les sanctions prononcées contre Madame Assomou et ses 7 autres camarades. Des condamnations que la défense a jugées illégales et qui ont fait purger 24 mois de prison à leurs clients. « Nous pensons que les juges qui ont connu des faits probatoires de la cause, ne peuvent plus revenir dans un autre pan du dossier » , déclare la défense avant de préciser qu’il s’agit des bonnes règles de l’administration de la justice, pour le bon fonctionnement de la justice, pour sa crédibilité. Le justiciable doit avoir, poursuit-elle, le droit à un procès équitable et dans les normes équitables. Il y a la déontologie judiciaire que chaque magistrat doit respecter. C’est-à-dire lorsqu’il a déjà eu connaissance de l’affaire, il doit lui-même s’en écarter. On estime que s’il ne peut pas le faire lui-même, on attire l’attention de sa hiérarchie là-dessus, explicitent les hommes en robe noire. « Il en est de même pour Tankoua Gabriel Pascal, qui a connu le jugement des affaires d’Habeas corpus, et a forcément connu des faits probatoires de la cause », apprend-on. Il a d’ailleurs connu deux fois et « il entretient des liens pas très catholiques avec nos clients qui l’ont déjà récusé plusieurs fois sans succès » , précise la défense. Bien entendu, rappelle Me Meli, « vous vous souvenez qu’au cours d’une audience, il y a eu une certaine animosité qui s’était installée entre nos clients et Monsieur Tankoua. C’est pourquoi nous pensons eût égard à tous ces éléments, il ne peut pas avoir la sérénité et la distance nécessaires pour se présenter comme juge. Comme le disent bien nos clients, nous pensions bien que là, il y a un adversaire politique qui se retrouve dans le dossier et qui pourra exercer la vengeance politique au lieu d’exercer ses fonctions de manière impartiale » . La défense ne voudrait pas, assure-t-il, qu’une composition irrégulière se prononce sur la forme de l’appel, et que cela s’assimile à un acquiescement qui peut leur être opposé demain. Il faudrait que la cour examine sa propre composition dans le jugement de l’affaire et permette qu’une composition régulière puisse statuer sur la forme et le fond, sollicitent les avocats de la défense. Pour rappel, cette affaire concerne 35 militants du Mrc dont 33 sont en prison. Il s’agit dans l’ensemble de l’affaire Fogue Tedom et 10 autres ; l’affaire Zamboue Pascal ; l’affaire Awassum Mispa et 4 autres ; l’affaire Tefobeau Gérard et 26 autres et l’affaire Kessouo Mbevo Alexis.