Cabral Libii, le député et président du PCRN relance le débat sur le projet d’arrestation avorté de Ferdinand Ngoh Ngoh. Pour lui, son parti va introduire a l'assemblée nationale, une proposition de loi régissant l'organisation et le fonctionnement de la haute cour de justice. « car, l'actualité "kafkaïenne" du mandat d'amener délivré au nom du Sgpr Ferdinand Ngoh Ngoh, s'inscrit dans la vision de la justice de Paul Biya.tout le reste n'est que distraction », a-t-i souligné.
Le mandat d'amener est, selon l'article 14 du Code de Procédure pénale en vigueur au Cameroun, l'ordre donné aux officiers de police judiciaire de conduire immédiatement devant son auteur, la personne y désignée. De plus, ce mandat ne cesse de produire ses effets qu'à la fin de l'audition.
Alors nonobstant cela, les effets du mandat peuvent-ils prendre fin autrement?
Oui! Selon les dispositions de l'article 27 du même code de procédure pénale, tout mandat de justice demeure exécutoire, sauf retrait par le magistrat compétent.
Dans ce cas, il y a lieu de se demander si le mandat d'amener délivré pour le SGPR a été retiré par le magistrat qui l'a délivré ? Si oui sur ordre de qui et surtout pourquoi donner l'ordre de le retirer?
En réalité, qu'il s'agisse du procureur de la République ou du juge d'instruction, l'ordre, s'il y en a un, de retirer le mandat de justice avant son exécution, donc de stopper la procédure judiciaire par une volonté autre que celle du magistrat, ne peut être donné que par la chancellerie qui est le Ministre de la Justice. Lui même ayant pu recevoir l'ordre du Président de la République dont le plus proche collaborateur est concerné par le mandat d'amener du cas échéant.
Si tout ce qui précède montre que la Justice peut librement prendre l'initiative de poursuivre un haut commis de l'Etat en fonction et même en "très haute" fonction, il appert aussi que c'est le pouvoir exécutif qui décide in fine de qui la justice peut poursuivre ou pas.
Sauf que, cela n'a rien de nouveau, c'est la loi telle qu'elle est écrite aujourd'hui. Et des poursuites arrêtées par des "magistrats aux ordres", sur instructions du Président de la République par le truchement des ses ministres, sont connues de tous...
Ce qui est curieux est que beaucoup s'etonnent que la justice ait eu le "courage" de poursuivre le SGPR, réputé tout ou très puissant... Ce courage de la justice plutôt que d'être applaudi, donne plutôt lieu à des supputations de crises institutionnelles.
S'il y a crise institutionnelle au Cameroun, ce n'est certainement pas à l'affaire NGOH NGOH qu'il faut l'indexer. Car, aucun ministre au Cameroun ne jouit d'une quelconque immunité. Tout Ministre même Secrétaire Général de la Présidence de la République, peut faire l'objet d'un mandat de justice à la seule appréciation d'un magistrat dans l'instruction d'une affaire touchant notamment aux actes posés par ce ministre qu'il soit en fonction ou pas.
Si Paul BIYA, et sa majorité de Députés et Sénateurs ne voulaient plus qu'il en soit ainsi, ils se seraient assurés depuis longtemps que la HAUTE COUR DE JUSTICE prévue à l'article 53 de la constitution fonctionne effectivement. Car c'est elle qui est compétente pour pour juger les actes accomplis par ministres dans l'exercice de leurs fonctions y compris pendant qu'ils sont exercice de ces fonctions. Mais il faut une loi devant régir son organisation et son fonctionnement. Cette loi nous l'introduirons et on verra...
Si jamais notre proposition de loi prospère, le Cameroun n'aura d'ailleurs en rien innover. En France, le ministre de la justice en personne Eric DUPOND-MORETTI a été mis en examen le 16 juillet 2021 pour prise illégale d'intérêt. Mais là-bas il est poursuivi par la CJR (Cour de Justice de la République) seule compétente en France pour juger les infractions commises par les ministres dans l'exercice de leurs fonctions.
CL