Ces médias sont le terrain où s’échangent des avis très divergents dans un débat particulièrement clivant.
#RéseauxSociaux Depuis deux mois, les réseaux sociaux connaissent une agitation particulière dans le « 237 », l’indicatif téléphonique local. C’est véritablement à partir du 21 novembre 2016 que la toile camerounaise s’est embrasée avec les images des manifestations dans la ville de Bamenda. Les clichés des violences policières s’étaient partagés abondamment.
Deux mois plus tard, l’intensité du « buzz » n’a pas faibli, chaque jour qui passe semblant même être le paroxysme d’une longue poussée de fièvre digitale. L’actualité brûlante dans les régions du Sud-Ouest et Nord-Ouest est érigée en tête d’affiche sur les réseaux sociaux, ces espaces devenant des domaines où les tenants des camps en présence marquent leurs territoires. Facebook est ainsi la plateforme par excellence où se joue en temps réel une véritable guerre de l’information.
Les francophones divisés
Bien avant l’arrestation des leaders du Consortium de la société civile anglophone, Tapang Ivo Tanku et Mark Bareta se sont positionnés sur la toile comme les hérauts de la fronde envers « La République », les deux mots désignant le régime de Yaoundé. Le premier influenceur publie au quotidien un état « minute by minute » de la situation dans les grandes villes de l’ancien Cameroun occidental. Chaque jour, ses nombreux abonnés peuvent découvrir des images de rues désertes suites aux « villes mortes », instantanés dont la vocation est de démontrer que la population est phase avec les revendications. Ces dernières oscillent, au vu des commentaires des utilisateurs de Facebook abonnés à la page, entre le fédéralisme et la sécession.
Le point de jonction étant l’affranchissement des Camerounais anglophones du gouvernement central jugé la plupart du temps négativement. Les réactions sont déclinées dans une écrasante majorité dans la langue de Shakespeare. Les publications de Tapang sont assez partagées tout comme celles de son « frère de lutte » Mark Bareta.
C’est lui qui a été l’un des premiers à faire fuiter le discours du chef de l’Etat à la nation le 31 décembre dernier .Bien avant 20 heures, il indiquait à son public qu’il n’y a rien à attendre des promesses du président Biya. L’activiste porte également sa voix via son site d’information en ligne bareta. press. Le portail donne l’occasion à diverses personnalités d’étaler leurs arguments en faveur du « peuple » de l’autre rive du Mungo.
A côté de ces deux figures à la notoriété établie, l’ancienne journaliste en service à Canal 2 International Angie Forbin tient également une place importante. Les anglophones sont soutenus sur les réseaux sociaux par des francophones qui pensent que la gestion actuelle du pays laisse à désirer. Pourfendeurs du Renouveau et déçus du système se distinguent. Dans ces catégories, on retrouve des « figures » du Facebook camerounais : le père Ludovic Lado, Jean-Marc Soboth, Rémy Ngono, Patrice Nganang, Brice Nitcheu, Jean de Dieu Momo, Boris Bertolt, Mohamadou Houmfa et Junior Zogo entre autres.
Ce dernier, l’un des meneurs du Code (Collectif des organisations démocratiques et patriotiques des Camerounais de la diaspora). a partagé une vidéo du récent concert de Lady Ponde dans la salle parisienne de La Cigale. La chanteuse y lance un « Je suis Bamenda » tonitruant repris en choeur par la foule. Même le bassiste de renommée mondiale Richard Bona a donné son point de vue en déclarant :
« Fédération n'est pas Séparation. Votre President aime la suisse. Moi aussi d’ailleurs (à mes frai) Pourtant un État Fédéral. La "Paix et la Stabilité" sont des conditions préalables pour la promotion et le développement d'un pays... Pas besoin d'être un Rocket Scientist... Même une tête de guitare le sait Négocier vous dépasse. Vous voyez le complot partout.
C'est bien la preuve que vous êtes des Politiciens de Pacotille... Votre système nourrit le colon sauf le camerounais (Anglo et Franco). » Jean de Dieu Momo a lui de son côté soutenu que le seul drapeau véritable est celui en vigueur durant le fédéralisme avec les deux étoiles. Une opinion pas toujours partagée dans la bulle numérique. Car côté francophone, les thèses fédéralistes/sécessionnistes ne sont pas dominantes. L’unité nationale reste un leitmotiv pour de nombreux internautes.
Ce courant a ainsi accueilli l’arrestation des leaders du Consortium avec un certain soulagement, espérant que la grève allait prendre fin pour favoriser la reprise des cours. Les vidéos où l’on voit des jeunes élèves et un gendarme molestés durement par des manifestants en furie ont choqué, au point de faire dire à des internautes que les violences des « extrémistes » ont été dévoilées au grand jour.
Daniel Claude Abate, l’homme d’affaires et militant du Rdpc, est très actif dans le « Le Cameroun est formidable vivons seulement. » Ses publications ne manquent jamais de fustiger les « ambazoniens. » Le groupe « La section camerounaise de Facebook » est aussi une tribune où les arguments du gouvernement sont relayés tout comme « MamAfrika.Tv » d’Allain Jules, défenseur engagé de la forme actuelle de l’Etat.
Sur Twitter, Patrice Amba Salla a livré sa pensée. L’ancien ministre des Travaux publics, l’un des rares caciques du régime à « tweeter » indiquait le 19 janvier : « La pertinence d’un idéal souligne à double trait l’impératif d’une démarche stratégique et tactique. Liberté de manifester, de réclamer le fédéralisme, de barricader les routes nationales mais interdiction de penser le contraire à l’autre !! »