Six mois après l’éruption du volcan Nyiragongo dans l'est de la République démocratique du Congo, l’émanation de gaz nocifs suscite l’inquiétude des médecins en raison des risques de maladies respiratoires pour les deux millions d'habitants de Goma.
L'éruption du volcan Nyiragongo, le 22 mai 2021, a fait au moins 32 victimes selon le bilan officiel et forcé des centaines de milliers de personnes à fuir leurs foyers à Goma et dans les environs.
Bien que la lave ait cessé de couler, les secousses sismiques continuent et représentent un sujet d'appréhension pour la population.
“La ville de Goma est construite à côté de deux montagnes volcaniques, de temps en temps, la fumée de la montagne se répand dans la ville et cela sent l'œuf pourri”, a constaté le Dr Mathieu Yalire qui dirige le département de géochimie de l'Observatoire volcanologique de Goma.
Le Dr Mathieu Yalire se rend au sommet du Nyiragongo au moins deux fois par mois. Il surveille ce volcan depuis dix ans ; ce qui, selon lui, a affecté sa santé.
“Quand je suis allé à l'hôpital, le médecin m'a dit que je fumais. Je lui ai répondu que je n'avais jamais fumé de cigarettes depuis ma naissance. Lorsque je lui ai expliqué ce que je faisais dans la vie, il s'est empressé de me faire remarquer que la fumée de la montagne affectait mon système respiratoire et finissait par abîmer certaines parties de mon corps”, a-t-il raconté.
Comme d’autres médecins de Goma, il craint que l’inhalation de gaz toxiques et les cendres de l'éruption n'aient causés des maladies respiratoires et oculaires. Les experts estiment que beaucoup ignorent qu'ils pourraient souffrir d'infections respiratoires aiguës et chroniques qui ne sont pas visibles.
Selon Dr Eric Kihambu qui travaille à l'hôpital Kyeshero, de nombreuses personnes pourraient avoir des dépôts de cendres volcaniques et d'autres polluants dans leur corps sans le savoir.
“Nous leur avons conseillé de prendre des mesures barrières, mais aussi de renforcer les mesures hygiéno-diététiques en utilisant des masques ou en achetant des lunettes parce que cette cendre provoque aussi des lésions sur les yeux”, a-t-il dit.
Farida Mawabiriza vit dans un camp temporaire pour les sinistrés du volcan.
Elle a été témoin de trois éruptions volcaniques, notamment la plus récente, en mai dernier.
“J'ai eu un problème de poitrine. J'avais beaucoup de douleurs dans la poitrine et l'estomac. J'avais l'impression que les cendres que j'avais inhalées étaient à l'intérieur de moi”, se souvient cette femme de 62 ans.
Aujourd’hui, sa santé physique s'est améliorée. Elle reste néanmoins traumatisée par cette expérience qui l’empêche de dormir “Je suis saisie par la peur car je pense toujours que le volcan va exploser à nouveau”, déplore-t-elle.
Le Dr Kiambo ajoute qu'outre les gaz toxiques du Mont Nyiragongo, les niveaux de dioxyde de carbone et de méthane dissous dans le lac Kivu voisin suscitent également des inquiétudes.
Si l'activité volcanique s’intensifie, le lac pourrait libérer dans l'air les gaz qu'il contient, ce qui aurait des conséquences catastrophiques sur la santé des habitants de la ville.
Le personnel de l'observatoire volcanologique dit avoir besoin de plus de ressources pour surveiller la montagne, en particulier des équipements modernes qui permettraient d'alerter plus tôt en cas d'activité.