Il y a quelques jours, John Fru Ndi annonçait son retrait définitif de la vie politique camerounaise s’apprête d’ailleurs à céder la tête de son parti, le Social Democratic Front (SDF). L’opposant historique Paul Biya était encore curieusement début janvier, au palais d’Etoudi lors du traditionnel passage de présentation des vœux à Paul Biya. Mais sa succession qui se préparait depuis à la tête du parti a du plomb dans l’aile. La guerre est violente sur fond de questions d’argent et de pouvoir. Jeune Afrique fait des révélations incroyables sur cette guerre fratricide.
Pour Jeune Afrique, c’est l’argent le véritable nœud de la guerre au niveau du SDF. « L’argent est un sujet tabou au sein de la plupart des formations politiques camerounaises. C’est aussi une arme politique, qu’adversaires ou ambitieux n’hésitent pas à manier pour se neutraliser. Elle est désormais utilisée au sein du Social Democratic Front (SDF), dont les militants sont depuis plusieurs mois témoins de l’impitoyable guerre de leadership qui déchire ce parti emblématique de l’opposition à Paul Biya – emblématique, mais sur le déclin.En ce début 2023, c’est l’avocat Moustapha Ngouana qui a donc pointé du doigt l’opacité qui entoure les finances du SDF. Ngouana est membre du Comité exécutif national (NEC) de la formation. Il appartient aussi au G27, le groupe qui s’est constitué autour du député du Littoral Jean-Michel Nintcheu pour contrer John Fru Ndi, le fondateur et président national du SDF que les frondeurs accusent d’avoir pris fait et cause pour Joshua Osih dans la lutte pour sa succession », introduit Jeune Afrique.
« Ngouana est allé jusqu’à affirmer que les finances du SDF étaient plombées par une gestion opaque et désastreuse. Dans son viseur, John Fru Ndi, qu’il accuse de s’être « enrichi » sur le dos du parti. « Depuis qu’il est à la tête de notre formation politique, il vit sans vergogne des subventions de l’État et des cotisations des militants », a chargé Ngouana, avant de dévoiler une série d’éléments qui, selon lui, seraient la preuve de la « boulimie financière » du chairman.L’avocat reproche aussi à John Fru Ndi, 81 ans, de percevoir « une rémunération fixe » au détriment du personnel administratif, de disposer d’un personnel payé par le SDF, d’avoir grâce à lui « amélioré sa fortune, son gîte, son couvert et ses moyens de locomotion », somme toute, de vivre « sur une bête qu’il a fini par confondre avec son porte-monnaie ». Conséquence, toujours selon Ngouana : « le SDF n’a pour siège qu’un vieux bâtiment en planche menacé de ruine », situé dans le centre de Yaoundé, alors même qu’il « a reçu près de 5 milliards [de F CFA] de subventions de l’État en 20 ans. », renchérit Jeune Afrique.
« Les affirmations de Ngouana ne sont pas dénuées de tout fondement. Depuis le congrès de 1992, le président national du SDF dispose d’un salaire jadis payé par les militants de la diaspora (cette année-là, la toute première élection présidentielle pluraliste organisée au Cameroun avait permis à Fru Ndi de se hisser à la deuxième place, à quelques points seulement de Paul Biya, exploit jamais réédité depuis).En 1997, alors que le parti faisait son entrée à l’Assemblée nationale, cette rémunération avait été portée à 600 000 F CFA (941 euros), puis à 1 million en 2002, date de l’instauration du financement public des partis politiques, qui bénéficie aussi au SDF. Fru Ndi, l’ancien libraire qui a longtemps incarné l’opposition à Paul Biya, dispose de plusieurs résidences, dont une à Yaoundé et une autre à Bamenda. Il est aussi propriétaire d’un vaste ranch, blotti dans les vertes montagnes du Nord-Ouest mais dont la crise anglophone l’a contraint à s’éloigner, et de plusieurs autres biens et propriétés. Il est cependant difficile de lier leur acquisition aux finances du SDF. Quant aux Vanguards, cette garde rapprochée reconnaissable à leur tenue blanche et verte, ils sont certes financés par le parti et bien présents dans les différentes résidences de Fru Ndi, mais ils sont également mis à la disposition de tous les élus », poursuit Jeune Afrique