Jeune Afrique a consacré un dossier édifiant sur Georges Gilbert Baongla. Se présenter comme le fils "autoproclamé" du président de la République lui a permis de se faire quelques amis, mais aussi de se faire bon nombre d'ennemis. Au sein de la famille présidentielle, déjà divisée par les luttes de clans en vue de la succession de Paul Biya, Georges Gilbert Baongla est considéré comme un véritable "trouble-fête". Pour certains, il est une épine dans le pied, note Jeune Afrique
Sa simple existence semble perturber les plans de Chantal et Franck Biya. Cependant, il préfère éviter tout conflit de légitimité avec celui qu'il appelle son "petit frère", et qui est souvent présenté comme le successeur potentiel du président. Au contraire, l'aîné autoproclamé affirme que si Franck Biya devenait président, ce serait à son avantage. Cependant, Georges Gilbert Baongla n'a pas toujours été aussi calme et conciliant, rapporte Jeune Afrique.
Le Magazine panafricain rapporte dans son dossier que qu’au cours d’une émission télévisée, il avait déclaré que lui, Junior et Brenda étaient les seuls enfants de Paul Biya, sous-entendant que Franck ne serait pas le fils du chef de l'État. Certains observateurs avaient alors interprété cette sortie comme une manœuvre de Chantal Biya, soupçonnée de vouloir éliminer Franck. Cependant, rien n'a jamais été prouvé, et depuis, Georges Gilbert affirme avoir renoué avec son "petit frère"
Georges Gilbert Baongla, le fils autoproclamé, a-t-il également rêvé de devenir le successeur ? se demande Jeune Afrique En 2013, il a créé son propre parti politique, le Parti républicain (PR), dans l'espoir de conquérir le pouvoir, si jamais son père lui donnait "l'autorisation" et sa "bénédiction". Il avait même réservé le poste de "président du comité des sages" à son père au sein du parti. Une tournée dans les régions du Littoral et du Nord-Ouest en 2014 avait suscité beaucoup d'attention. Cependant, cela a peut-être rendu Georges Gilbert Baongla trop encombrant, car il estime que c'est à ce moment-là que ses ennuis ont commencé. Certains parlent de problèmes purement politiques, alors que l'intéressé devenait une véritable menace pour le pouvoir de Paul Biya.
Mais c'est autour de 2018 que ses vrais problèmes ont commencé. Le 29 novembre de cette année-là, Georges Gilbert Baongla est expulsé de son logement en raison de 46 mois de loyers impayés. Il conteste cette décision de justice et y voit la main de Jean-Pierre Amougou Belinga, un homme d'affaires et de médias dont les connexions avec le système judiciaire ont fait beaucoup parler à Yaoundé ces dernières années. Georges Gilbert Baongla déplore cette affaire, qu'il considère comme purement politique. Selon lui, la juge a reconnu qu'il ne devait rien à son bailleur, mais a quand même ordonné son expulsion. À cette époque, il ne se retrouve pas sans domicile pour autant, car il séjourne à l'hôtel Mont-Fébé, proche du palais présidentiel, aux frais du cabinet civil du président, sur ordre du chef de l'État. Mais pourquoi accuse-t-il Jean-Pierre Amougou Belinga ?
Il y a déjà un bras de fer entre Georges Gilbert Baongla et cet homme d'affaires controversé. Le premier n'a pas supporté que la chaîne de télévision Vision 4, appartenant à Jean-Pierre Amougou Belinga, nie sa qualité de fils du président. Il a donc porté plainte, demandant aux journalistes Jean Jacques Zé et Bruno Bidjang de prouver qu'il n'était pas le fils biologique du président. Jean-Pierre Amougou Belinga aurait vécu cette plainte comme une humiliation et aurait juré la perte de Georges Gilbert Baongla, pointe Jeune Afrique. Ce dernier a alors été visé par plusieurs plaintes, dont une pour escroquerie et diffamation déposée par Amougou Belinga lui-même. Dénonçant un complot, Georges Gilbert Baongla est arrêté le 29 mai 2019 et incarcéré à la prison principale de Yaoundé le 3 juin. Le 10 juin 2020, le "chouchou de la jeunesse", comme il se présente souvent, est condamné à deux ans de prison ferme et à une amende de 25 millions de F CFA par le tribunal de première instance de Yaoundé. Incarcéré, il perd la présidence de son propre parti.
L'emprisonnement de Georges Gilbert Baongla a affaibli son influence et son pouvoir de nuisance, selon un membre de la société civile. Il retrouve la liberté le 3 juin 2021, laissant entendre qu'Etoudi (le palais présidentiel) est intervenu en sa faveur, sans apporter de preuves. Est-ce la fin de ses ambitions politiques ? Pas du tout. Selon lui, sa condamnation n'est pas définitive car il a fait appel devant la Cour suprême. L'affaire est en cours, et il se considère donc toujours éligible, au grand désarroi de ses détracteurs.Certains affirment que le but recherché était de le rendre inéligible, mais cela s'est avéré inefficace. Depuis l'arrestation de Jean-Pierre Amougou Belinga dans l'affaire Martinez Zogo, Georges Gilbert Baongla a choisi de reprendre l'offensive. Dans ses nombreuses déclarations médiatiques, il n'hésite pas à présenter l'homme d'affaires comme son ancien "garçon de course" ou comme un "prédateur qui finira ses jours en prison". Il prétend l'avoir recruté pour travailler dans son média, Le Démenti, en tant que distributeur de journaux.Georges Gilbert Baongla dispose d'un réseau non négligeable au sein du pouvoir, ce qui en fait selon certains un acteur, voire un arbitre, dans la guerre des clans qui sévit à Yaoundé. Cependant, il se défend de s'impliquer dans ces luttes et se positionne au-dessus de la mêlée. Il affirme que son parti est celui de tous les Camerounais et qu'il ne reconnaît pas les guerres de clans, rapporte également Jeune Afrique.
Il a souvent tiré profit des querelles en coulisses du pouvoir grâce à l'ambiguïté de sa position. Certains leaders d'opinion camerounais affirment qu'il a utilisé sa supposée filiation pour exercer du trafic d'influence. Du fait de la corruption prévalant au Cameroun, de nombreux ministres s'exécutaient lorsqu'il les contactait, se disant : "On ne sait jamais, c'est peut-être vraiment le fils de Paul Biya", explique une source.
Georges Gilbert Baongla prétend avoir été le premier à dénoncer la ligne 94 du budget de l'État, qui a suscité de vives réactions dans le pays ces dernières années. On le soupçonne également d'être à l'origine des ennuis de Jean Louis Beh Mengue, ancien directeur général de l'Agence de régulation des télécommunications (ART), condamné à vingt ans de prison ferme pour détournements de fonds publics en 2021.
Le "fils aîné" du président a su construire son mystère et son influence grâce au silence complice de l'élite politique camerounaise, directement concernée pourtant. Depuis son hôtel à Douala, Georges Gilbert Baongla affirme une dernière fois, sans qu'on sache s'il y croit lui-même, son ambition de succéder à son père et de devenir son héritier politique : "La seule personne qui peut me battre aux élections, c'est Paul Biya."