Politique of Sunday, 5 July 2015

Source: Journal du Cameroun

Rachel Sonkin, Une voix féminine du futur au Social Democratic Front

SDFSDF

Coordinatrice nationale des femmes socialistes du Cameroun, elle n’exclut pas de jouer les premiers rôles dans les années à venir au sein du plus important parti de l’opposition camerounaise.

Elle s’appelle Rachel Mado Awum Nkeing, épouse Sonkin. Coordinatrice nationale des femmes socialistes du Cameroun, une sorte d’équivalent de la fonction de présidente de l’Organisation des femmes au RDPC, elle se verrait bien s’occuper des tâches plus importantes au sein du Social Democratic Front et du Cameroun. «Quand on est en politique, on est prêt à assumer les fonctions que le président de l’organisation veut bien vous confier», affirme-t-elle.

Avec la démission d’Elizabeth Tamadjong du poste de secrétaire générale de la formation politique de Ni John Fru Ndi, son nom circule parmi ceux qu’on voit dans la short list des potentiels successeurs. Surprise, elle précise tout de même qu’ «une chose est sûre, on ne naît pas secrétaire général, on le devient». Même si «en tant que femme, je n’étais pas contente de sa démission. Je trouve que c’est une dame de fer. C’est une femme qui avait toutes les compétences. On ne peut pas se réjouir du départ d’une femme pareille».

Le 26 mai 2015, à l’occasion de la célébration du 25ème anniversaire du SDF à Dschang, Rachel Sonkin a profité de l’absence de son époux, le sénateur du SDF Etienne Sonkin, pour se mettre en scène. Elle a prononcé un discours sans concession vis-à-vis du pouvoir, en présence du préfet de la Menoua, Joseph Bertrand Mache Njonwet. «Nous demandons à Paul Biya et à tout son gouvernement de démissionner. Il a échoué. Il est incapable de gouverner. On n’a pas d’eau, ni d’électricité et il n’est pas au courant», a-t-elle conclu lors d’un discours d’une trentaine de minutes.

Elle reproche au président de la République d’avoir laissé piller le pays par les dignitaires de son parti. «Tout se passe comme s’il y avait une danse appelée ‘danse des milliards’», s’est-elle émue. Sur la question de la guerre contre Boko Haram, elle a annoncé avoir personnellement contribué à hauteur de 100.000 F CFA pour soutenir les forces de défense du Cameroun.

Et à propos, elle a précisé que «le soutien du SDF et de ses militants ne doit pas se confondre à un soutien au RDPC et sa mauvaise gouvernance». Elle en a profité pour condamner, au nom des femmes du SDF, «avec la dernière énergie, le vol des bébés au Cameroun. C’est un cancer». Tout ceci avant de demander «aux mamans et à leurs enfants de regarder la chaine de télévision Afrique média. C’est une chaine panafricaine intéressante».

Dans son discours du 26 mai 2015 à la place des fêtes de Dschang, Rachel Sonkin a également dressé un bilan de l’existence du SDF. «25 ans de lutte où le SDF propose une idéologie où l’Homme est au centre des préoccupations. Le péage routier est une initiative proposée par le SDF, même si les fonds sont détournés.

Nous avons proposé le retour au fédéralisme. Le RDPC a gauchement appliqué en mettant sur pied une décentralisation non effective. Malgré le vol dans les urnes, le SDF a tenu bon et il tiendra bon. Le SDF se porte bien, contrairement à ce que pensent les oiseaux de mauvais augure. On n’est pas content de critiquer, on veut simplement que les choses avancent», a-t-elle conclu.

Parcours

C’est en 1998, alors qu’elle étudiante de première année à l’université de Dschang, que Rachel Sonkin prend une carte de membre au SDF. Le contexte dans cette ville de la Région de l’Ouest s’y prête un peu. La commune urbaine de la ville estudiantine et les sièges de députés à l’Assemblée nationale sont occupés à ce moment-là par le SDF. Elle justifie tout de même cette entrée par «le désir de changement, de voir les choses aller de l’avant. Je suis née et jusque-là, je ne connaissais vraiment qu’un seul président. C’est frustrant, surtout qu’à côté, je voyais des pays changer de président d’une manière ou d’une autre. Les idées du SDF me paraissaient nouvelles».

En 2000, elle épouse Etienne Sonkin, maire de la commune urbaine de Dschang entre 1997 et 2007, aujourd’hui sénateur et trésorier national du SDF. Elle tient à préciser que son mariage avec M. Sonkin n’a rien à voir avec la politique. Elle obtient quatre enfants de cette union et un style en politique: celui de son mari. Car, «tu ne peux pas avoir pour mari un homme politique chevronné et expérimenté comme Etienne Sonkin, sans être influencé».

Cette dame au style glamour affirme ne bénéficier d’aucun lobbying de la part de son mari. Les choses s’arrêtent au stade des conseils et des prises en compte des expériences de Monsieur. Elle se fait donc d’abord toute seule. Elle ne souhaite pas être une simple mascotte de ce sénateur au discours virulent. Par exemple, en 2011, sans requérir l’avis de son époux, Rachel Sonkin se fait élire comme coordinatrice nationale des femmes socialistes du Cameroun, à l’issue d’un congrès qui se tient à Yaoundé. Elle bat deux concurrentes. Le sieur Sonkin l’apprendra par téléphone. Sa réaction: «Tu blagues. Est-ce que tu réalises l’importance du poste qu’on vient de te confier?».

Et sur son poids au sein du SDF, Mme Sonkin pense que «le poste que j’occupe est important au sein de cette formation politique. Mes rapports avec la hiérarchie du parti sont conviviaux. Avec les femmes, nous mobilisons nos idées pour un plan d’action que nous allons mettre en place». À propos des changements sur lesquels pourrait déboucher le prochain congrès du parti et ce qu’elle en obtiendrait, elle se contente d’affirmer qu’ «on ne perd rien».

Profil

Troisième enfant d’une famille qui en compte huit, elle est née le 30 mai 1976 à Ndoungué, dans le département du Moungo, région du Littoral. Originaire de Fondonera dans l’arrondissement de Santchou, Rachel obtient son Certificat d’études primaires et élémentaires en 1988. Ses études secondaires, elle les fait au lycée de Manengouba, à Nkongsamba, une ville réputée pour forger les esprits frondeurs. Là, elle obtient successivement le BEPC en 1993, le probatoire A4 allemand en 1996 et le baccalauréat A4 allemand en 1997.

Elle met le cap sur l’université de Dschang où elle s’inscrit en Lettres trilingues (Français-Anglais-Allemand), contre le point de vue de son oncle qui entend bien lui faire prendre le chemin du mariage. Après la Licence en 2003, elle change de couloir et opte pour un second cycle universitaire en littératures africaines. Elle soutient la Maîtrise en 2007 et le Diplôme d’études approfondies en 2010. Depuis 2011, elle prépare une thèse de doctorat Ph/D dans le même domaine.

Au plan professionnel, Rachel Sonkin travaille depuis 2005 à l’université de Dschang, comme cadre contractuel d’administration. Après avoir reçu deux lettres de félicitation du secrétaire général de cette organisation, elle est nommée en 2013, par le ministre de l’Enseignement supérieur au poste de de chef de service de l’administration générale et du personnel à la Faculté des Sciences juridiques et politiques.

Depuis le 16 décembre 2014, elle occupe les fonctions de chef de service de la Coopération et des Affaires extra-africaines au rectorat de cette université. Une promotion au vu de l’étendue de ses responsabilités au sein de cette universitaire qui entretient une dense coopération avec les universités nord-américaines, européennes et asiatiques. Membre du syndicat des personnels d’appui des universités d’Etat, ancienne délégué du personnel, elle affirme être surprise de ce que ses collègues aiment toujours à la saisir de leurs problèmes, dans le but de bénéficier de son lobbying.

Rachel Sonkin occupe également des responsabilités au sein de l’administration de l’université de Dschang.

Mère de quatre enfants dont l’aîné a 14 ans, Rachel Sonkin affirme jouer pleinement son rôle dans son foyer. «J’essaye de les sensibiliser sur les dangers qu’ils peuvent encourir au quotidien», confie-t-elle. Malgré l’attention qu’elle leur accorde, ses rejetons la trouvent un peu trop voyageuse. En dépit de ses occupations, elle arrive à avoir du temps pour leur cuisiner le eru et le koki, les deux plats préférés de la maison. En matière de consommation de la télévision, ces tout petits estiment que «maman aime trop le journal». Difficile de faire autrement quand on a des responsabilités dans l’arène politique. Des devoirs qui pourraient augmenter à l’issue du congrès du SDF de 2016.