Les journaux camerounais parus jeudi se sont penchés sur le dernier communiqué de la Conférence épiscopale nationale (CENC), au sujet de la disparition mystérieuse de l’évêque de Bafia (Centre), Jean Marie Benoît Bala, dont le corps a été repêché le 2 juin dernier dans les eaux de la Sanaga, à une centaine de kilomètres de la capitale, Yaoundé après trois jours de disparition.
«Mgr Bala a été assassiné», résume Le Jour qui note que c’est la première fois que le clergé réagit avec autant de spontanéité et de vigueur après le meurtre d’un de ses membres.
Le document, en 11 points de la CENC, note le quotidien à capitaux publics Cameroon Tribune, retrace les circonstances de la mort de celui qui était jusqu’au 31 mai 2017 l’évêque du diocèse de Bafia et qui, dans l’intime conviction de ses collègues éplorés et au regard des premiers constats, «écartent l’hypothèse du suicide».
Les évêques accentuent la pression sur le régime, selon Émergence pour qui la déclaration du clergé est un véritable réquisitoire contre le laxisme et une sorte d’impunité, dans laquelle semblent désormais se complaire les dirigeants du pays face à la série d’assassinats d’hommes d’Église.
La Nouvelle Expression reprend, mot pour mot et à son compte, ce sentiment de dépit : les évêques exigent que toute la lumière soit faite sur la mort de leur collègue, réclament les conclusions officielles de l’enquête et, surtout, que les coupables soient identifiés et livrés à la justice.
«L’Église gronde et menace», confirme l’hebdomadaire L’Essentiel qui voit chrétiens et Camerounais, sans distinction de tribu ou de confession, réclamer la même chose que la Conférence épiscopale pour sortir du désarroi. «Que l’enquête progresse et que la vérité se fasse sur la mort de Mgr Bala. Que la justice vienne mettre un peu de lumière dans ce brouillard dans lequel nous évoluons depuis la disparition de l’évêque. Dans ce contexte trouble, il n’y a effectivement que la justice qui puisse nous dire qui sont les anges et qui sont le démons.»
Pour InfoMatin, particulièrement remonté contre le clergé, l’Église catholique qui est au Cameroun «fuit le miroir», dénonçant avec vigueur la mort non élucidée des prélats, membres du clergé et personnes consacrées, abandonnant tout aux mains de l’État dont le rôle est certes régalien, mais se désengageant quant à toute obligation d’enquête parallèle, qui pourrait mettre la pression sur les autorités judiciaires publiques et contribuer à la manifestation de la vérité.
«Ce passéisme ne manquera point d’intriguer certains observateurs. Et la preuve que le clergé peut, voire qu’il en sait plus qu’il ne veut le laisser croire, se trouve dans cette affirmation sans appel : Mgr Bala ‘’ne s’est pas suicidé ; il a été brutalement assassiné’’.»
Mettre les pouvoirs publics face à leurs responsabilités, en protégeant les vies humaines, en général, et celles des autorités ecclésiastiques, en particulier, n’est que normal, mais les faits permettent de relativiser cette affirmation de la CENC, qui pourrait – à tort – laisser croire à un complot macabre contre les hommes de Dieu, toutes obédiences confondues : «On a en effet le fort sentiment que les assassinats susdénoncés – et qu’aucun humain normal ne peut tolérer – visent spécialement les bergers de l’Église catholique. Et aucun imam, ni pasteur d’une autre obédience. Une curiosité qui éveille d’autres curiosités.»