Actualités of Tuesday, 18 April 2023

Source: www.camerounweb.com

Sébastien Ebala raconte comment il a été torturé au SED sur ordre du colonel Bamkoui

Torture au SED Torture au SED

Le lanceur d’alertes et défenseur des droits de l'homme Sébastien Ebala a écrit une tribune sur sa détention au Secrétariat d’État à la défense (SED). Elle est pleine d’émotion. On peut alors se rendre facilement compte qu’on ne doit pas souhaiter à quiconque d’aller là-bas, même pas à son pire ennemi.

« Témoignage d'un ancien prévenu (Sébastien Ebala) ayant passé trois semaines au Secrétariat d'État à la défense. Ce que j'ai subi dans les geôles de la Sécurité militaire (Semil). Tout est parti de la réalisation de ma vidéo au lieu-dit arrêt bus du côté d'Accropole.

Nous sommes le 16 avril 2020. Il est 20 heures et 30 minutes, heure du Cameroun. J'appelle les Camerounais à me rejoindre le 18 avril 2020 à la poste centrale pour demander le départ de celui qui usurpe le pouvoir. Il s'agit du président national du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC).

C'est après la victoire volée du président élu Maurice Kamto. Il n'est plus question de bavarder sans agir. Je fais la vidéo accompagnée par les équipes thématiques qui travaillent avec moi.

Après cette annonce, je rentre chez moi le lendemain. J'ai une rencontre avec mes collaborateurs du groupe Média Tick Info. À l'époque c'était la page web que j'animais le 17 avril 2020, jour de mon arrestation avant la date butoir.

Je me rends à notre lieu de rencontre habituel, quartier Jamot dans le domicile de mon compagnon de lutte Tchebo Bernard. Il est 11 heures quand j'arrive chez lui. Nous sommes trois comme d'habitude. Nous devons déguster un repas traditionnel l'okok. Après le repas, je ressens une petite fatigue.

Le propriétaire des lieux, Tchebo, me conseille de m'allonger sur un canapé. J'y passe presque trois heures couché. Entre-temps, je dois faire le direct qui était prévu ce jour-là lorsque j'ai ressenti la fatigue. Nous sommes là à 16 heures. Tchebo me demande de laver mon visage pour être encore plus en forme. Ce que je fais.

J'ai retrouvé mon énergie habituelle, le matériel de production était déjà en train d'être installé pour le direct il est 16h30 minutes. Pendant que je demande à Tchebo de me passer mon bréviaire de prière et ma montre plus mon cache-nez nous entendons des bruits d'une violence terrible.

Nous apercevons des gens qui escaladent la clôture de la maison. Tous étaient cagoulés tenant des armes en main avec le matériel de destruction des lieux. Les habitants du quartier qui étaient dehors en train de vaquer à leurs occupations, sont immédiatement expulsés manu militari. Nous entendons seulement des pas alertes de ces assaillants.

Entre-temps, d'autres hommes ont déjà escaladé la grande clôture du duplex trois niveaux de Tchebo Bernard. Étant à l'intérieur, nous nous rendons compte que nous avons affaire à des individus non-identifiés venus nous embastiller. Illico presto, Tchebo nous demande de monter dans le plafond puisque les criminels en question étaient d'une violence sans précédent.

Nous voilà tous les trois au plafond les hommes cagoulés infiltrés dans le domicile en cassant la porte qui était faite en lambris vitres dessus une à l'intérieur. Voilà ce que tous ont dit : "ils sont où" en détruisant certains endroits de la maison dans tous les sens.

C'est là où Tchebo, qui était, presque à côté, sort sa tête et dit c'est moi qui suis là. Ils lui intiment l'ordre de descendre très rapidement. Une fois au sol, c'était seulement la bastonnade sur tout son corps infligée par des sauvages, qui lui demandent où sont les autres.

Sébastien Ebala est où ? J'entendais seulement comment Tchebo criait : "ils seront là à 18 heures". "Dis-nous où ils sont", fulminent-ils. Et Tchebo de lancer : "Je jure sur la tête de mes enfants que je ne connais pas. Ils m'ont dit qu'ils seront là à 18 heures".

En ce moment, n'ayant pas réussi à faire dire à Tchebo ce qu'il voulait, l'individu qui coordonnait l'opération, un certain Halilou, originaire de Noun, dit ceci étant déjà à la grande cour : "si on l'a pris au plafond, ça voudrait dire que les autres sont là-bas. Fouillez-moi ce plafond. C'est là où un des éléments du commando cagoulés monte avec la torche de son téléphone. Les autres lui indiquent étant en bas cherchent s’ils pouvaient repérer quelque chose d'humain.

Le voilà une fois arrivé où nous étions allongés. Il jeta un cri satanique : "il est là". Les autres de dire : "Fais-le descendre il ne connaît pas qui est là comme il le dit le voilà qui me dit ceci viens ici ". Entre-temps, le vendu a déjà retiré la sécurité de son pistolet. Je lui dis : "chers messieurs je ne suis pas armé". Il me dit encore d'un ton violent: "avance sinon je vais tirer j'avance à pas de tortue".

Voilà comment, grâce à Dieu mon pied gauche transperce un contre-plaqué du plafond après mes deux pieds sont immédiatement tirés vers le bas par les autres membres du commando. Une fois tombé comme un sac de riz vraiment j'ai subi l'inacceptable.

Première question : pendant que je reçois les coups violents de tous les côtés, où sont tes téléphones, où tu causes avec Maurice Kamto. Je réponds dans la douleur je n'ai pas son numéro de téléphone jusque-là, on ne sait pas à qui on a affaire.

Voilà donc comment ils insistent à voir mon deuxième téléphone. Je leur ai dit alors je l'ai laissé à la maison et un d'entre eux de poser la question : ta maison est où ? J'ai répondu deux chevaux. L'autre de dire c'est vrai le colonel nous a dit qu'il habite là-bas. C'est en ce moment que nous découvrons qu'il s'agissait des éléments de la Sécurité militaire. Direction : le ministère de la Défense où est logée la Semil.

Une fois arrivés sur les lieux, voilà la question que va leur poser le chef de l'unité Bamkoui Joël Émile. C'est quoi ? Ils ont voulu bagarrer avec vous ? L'un d'eux répond : "non on les a pris au plafond". Bamkoui leur dit : "amenez-les au labo". Il s'agit là du lieu de torture. La suite vous la connaissez.

Le but principal était de me faire mentir que c'était le président élu Maurice Kamto qui était derrière moi. J'ai assumé mon action sans état d'âme. J'ai été torturé, humilié sauvagement pendant plusieurs heures. Voilà mon calvaire subi ce jour-là dans les locaux de la Semil.

Trois (03) ans après, je me rappelle de tout ce que j'avais subi comme torture. Voilà pourquoi la justice internationale que j'ai saisie doit me rendre justice afin que ceux qui m'ont torturé répondent de leurs actes graves et inhumains.

Quel récit authentique. Que le seigneur Dieu tout puissant, à qui je rends grâce de m'avoir permis d'être encore vivant, continue à veiller sur moi », dit Sébastien Ebala.