Le départ du ministre René du Ministère de l’Administration Territoriale en mars dernier ne serait pas fortuit.
D’après les révélations de nos confrères de Cameroonvoice, l’ex-ministre du MINAT aurait été débarqué du poste qu’il occupait en 2011 sur manœuvre de Chief Esoh Itoh, le président du conseil des Chefs traditionnels du Sud-ouest assassiné le dimanche dernier par les combattants sécessionnistes.
Selon nos confrères, le ministre Sadi ne serait pas étranger à l’assassinat de celui que plusieurs considéraient comme « l’ami personnel de Paul Biya ».
Lire l’extrait de l’article de Cameroonvoice sur l’origine du « conflit » entre le ministre René Sadi et le défunt Chief Esoh Itoh :
Certaines de nos sources relèvent que sans les tirs en désordre des militaires qui ont eu le don de refroidir certaines ardeurs vengeresses, un plus grand drame se serait produit, car des partisans du chef assassinés, une fois qu'ils ont appris la nouvelle, ont aussitôt organisé une descente punitive sur le village Ngolometoko et les villages alentours, suspectés (sans preuve) d'être les villages d'origine des régicides.
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Une raison à cette suspicion, il y a quelques mois, Sa défunte Majesté Chief Esoh Itoh aurait plaidé avec insistance auprès des autorités administratives pour que soient suspendues purement et simplement les activités des moto-taximen dans cette ville de plus de 56.000 âmes dont il est le plus grand chef traditionnel et coutumier, avec sous son autorité plus d'une vingtaine de chefs de villages. Malgré les supplications des centaines de moto taximen résidant à près de 90% du village Ngolometoko et des villages environnants, chef n'a pas reculé, arguant que la circulation des motos facilitait le déplacement des sécessionnistes.
Les conducteurs de mototaxis lui proposeront également de dicter un modèle de chasuble de son choix à faire confectionner à leurs frais pour les rendre identifiables, de sorte que ceux ne l'arborant pas soient les seuls à être interdits d'activité, rien n'y fit.
Il se mettra ainsi à dos non seulement lesdits sécessionnistes, d'une part et les transporteurs par motos privés du moyen de vivre et de faire vivre leurs familles, mais aussi les populations privées de leur seul moyen de transport.
Eminent militant du Rdpc (parti au pouvoir au Cameroun) et grand ami du chef de l'Etat, Paul Biya, feu Chief Esoh Itoh ne se serait pas limité à tenir la bride aux mototaximen comme action forte de la manifestation de son hostilité à ses "frères" sécessionnistes anglophones dont il aurait juré d'avoir la tête.
En effet, alors que les affrontements entre groupes armés séparatistes et forces gouvernementales se déroulaient sur un fond de magie noire, ce chef traditionnel milliardaire avait à son tour mis sur pied un groupe de centaines de jeunes hommes et femmes d'Ekondo-Titi dont il pouvait jurer de la fidélité à son endroit, et était au Nigeria voisin acheter les mêmes fétiches dont il les dotera pour qu'ils puissent donner la réplique aux partisans de la création de l'Etat d'Ambazonie.
Le manège fonctionna un bon bout de temps pendant lesquels on vit des sécessionnistes tomber comme des mouches sous les balles de l'armée et celles de certains de leurs congénères. Jusqu'à ce que certains d'entre ses "boys", écœurés par cette situation qu'ils considéraient comme « une trahison vis-à-vis de leurs frères qui luttent contre l'assimilation et le martyre de leur peuple par "la République du Cameroun" », passent à l'ennemi et le dévoile.
Depuis lors, Chief Esoh Itoh vit son nom inscrit sur la liste des chefs anglophones traîtres qui devaient payer de leurs vies d'avoir pris parti pour "l'oppresseur".
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On comprend que les fidèles du chef défunt n'aient pas emprunté trente-six chemins pour désigner les coupables.
Des coupables qui pourraient finalement se révéler n'être que des bouc-émissaires, car une autre version -certes moins plausible mais ne manquant pas de fondement - qui a cour depuis le jour-même de son assassinat voudrait que les sécessionnistes ne soient pas les seuls à avoir dans un passé récent mis à prix la tête de chef Esoh.
Plus clairement à en croire nos sources, sa mort brutale aurait beaucoup plus à voir avec le leadership de la société de production d'huile de palme, Pamol Plc., et surtout son management par l'équipe dirigeante actuelle, que ses démêlés avec les militants sécessionnistes, avaient fini par révolter, y compris les chefs des villages placés sous son autorité.
Tout aurait commencé en 2016. Chief Etoh, nommé Président du Conseil d'Administration de la Pamol le 2 juin 2005 lors d'une session extraordinaire du conseil d'administration présidée à l'hôtel Hilton de Yaoundé par le ministre de l'Economie et des Finances (MINEFI) de l'époque, Polycarpe Abah Abah (aujourd'hui en prison), est débarqué de cette fonction lors d'une autre session extraordinaire du Conseil d'Administration de l'entreprise tenue le 10 août 2016 à Lobe, une localité où est établie une grande partie des plantations de palmiers à huile de la PAMOL.
Si sa nomination avait été instruite en 2005 par le chef de l'Etat dont il serait un très grand ami, au point de se voir commis un temps –sur le plan politique- à la prestigieuse fonction de Chef de la Délégation Permanente du Comité Central du Rdpc pour le département du Ndian, son limogeage de manière cavalière 11 ans après, aurait en revanche participé d'un complot que de mauvaises langues dirent avoir été ourdi depuis le cabinet du ministre de l'Administration territoriale de l'époque, René Emmanuel Sadi, actuellement ministre chargé de missions à la présidence depuis le remaniement gouvernemental du 2 mars 2018.
Si cette information largement répandue à l'époque n'a toujours pas été vérifiée, quoique les séparatistes l'aient reprise à leur compte ces derniers jours par opportunisme, une coïncidence un peu curieuse allait captiver l'attention de l'observateur : pour remplacer Chief Esoh Itoh à la tête du Conseil d'Administration de la Pamol considéré dans une certaine mesure comme la chasse gardée des notabilités traditionnelles anglophones de la région du Sud-ouest en général et du département du Ndian en particulier, le gouvernement, ne trouva personne d'autre que le gouverneur de la région du Sud-ouest, Bernard Okalia Bilai, un francophone de la région du Centre, ressortissant du département du Mbam et Kim comme le ministre de l'Administration territoriale. Réné Sadi est présenté par d'aucuns comme le parent, le mentor, le parrain et le moniteur de la fulgurante carrière de Bernard Okalia Bilai depuis ses débuts dans le corps des cadres de l'administration préfectorale.
Remonté contre son éjection, le chef tombé en déchéance aurait exprimé sa profonde amertume auprès de ses pairs chefs supérieurs du Sud-ouest et dans certains milieux décisionnaires, faisant même valoir que son ami Paul Biya l'aurait laissé humilier par des jeunes. Par "jeunes", il faut entendre ici le ministre de l'Administration territoriale et son neveu gouverneur. En vain !
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De guerre lasse, il aurait entrepris d'adresser des rapports sur la situation de la Pamol au président de la République. Des rapports dont la teneur a généralement fait l'objet de fuites dans le sérail et qui évoqueraient de gigantesques hold-up fonciers perpétrés par le ministre Sadi qui se serait ainsi arrogé quelque 150 hectares dans les plantations de la Pamol dont la superficie est estimée à un peu plus de 10.000 hectares.
On apprend également par le canal du téléphone arabe que depuis l'arrivée dans le Sud-ouest de Okalia Bilai qui y aurait été envoyé en 2012 « pour veiller sur les intérêts de son oncle ministre à la Pamol », celui-ci se serait constitué pour son propre compte un capital foncier de 80 hectares.
Les dénonciations de Chief Itoh, ajoute-t-on, pourraient avoir décidé Paul Biya, en mars dernier, à éjecter du ministère de l'Administration territoriale René Sadi qu'une bonne frange de l'opinion présentait comme ayant une grande côte auprès du Prince dont il était l'homme des missions secrètes.
Au lendemain du remaniement du 2 mars 2018 et du confinement de René Sadi qui « passait d'un ministère de souveraineté à un strapontin à la présidence où il est un peu comme sous surveillance » (Sic), des menaces auraient commencé à fuser contre le chef supérieur d'Ekondo-Titi dont les bavardages épistolaires en direction de Yaoundé commençaient à montrer leur nocivité. Il aurait même été sommé de se la boucler et d'attendre qu'on lui trouve quelque chose d'autre. L'a-t-il entendu de cette oreille ? Il semble visiblement que cela n'a pas été le cas, et qu'il aurait plutôt continué de "monter les enchères".
Peut-on établir entre ces dernières révélations -à prendre bien sûr avec des pincettes- et son assassinat un lien de cause à effet. ? Une piste risquée pour tout journaliste soucieux de ne pas trahir la déontologie de son métier, mais que s'évertuent à explorer ceux qui prétendent avoir une certaine idée de l'étendue des pouvoirs mystiques de ce vénérable chef qui a été pendant deux ans le président du Conseil des Chef Supérieurs du Sud-ouest.
Pour eux, de jeunes séparatistes, fussent-ils initiés à la haute magie, n'auraient pas pu venir à bout de l'homme sur son propre territoire, lui qui se moquait de savoir que son nom figurait sur une liste des tueurs du mouvement séparatiste, conscient que pour les renvoyer à leurs premières leçons de pratiques occultes, il se donnerait à peine la peine qu'on se donne pour balayer un fétu de paille.
« Pour quelqu'un qui a déjoué bien de tentatives d'assassinat en crachant simplement sur le sol pour disparaître sur le champ et réapparaitre au Nigeria ou dans une autre ville du Cameroun, qui pouvait d'un seul regard empêcher une arme à feu de fonctionner, il est difficile de croire que de petites têtes brûlées de sécessionnistes aient réussi à le tuer, à moins que la colère des ancêtres se soit appesantie sur sa personne. .. » concluent-ils.
Pour certains propagandistes du mouvement séparatiste, voilà encore un crime commis par des proches du régime de Yaoundé qui ont un intérêt à perpétuer la guerre contre les anglophones en leur faisant endosser des abominations dans lesquels les sécessionnistes ne sauraient se reconnaitre.
Affaire à suivre.