Actualités of Tuesday, 5 April 2022

Source: www.bbc.com

Santé mentale : pourquoi trop d'empathie peut être néfaste pour vous

Santé mentale : pourquoi trop d'empathie peut être néfaste pour vous Santé mentale : pourquoi trop d'empathie peut être néfaste pour vous

Vous êtes-vous retrouvé irritable, triste ou au bord des larmes en regardant les informations ces derniers temps ? Si c'est le cas, vous n'êtes pas seul.

L'expérience de l'empathie a ses avantages, mais aussi de nombreux inconvénients. Nous devons donc apprendre à pratiquer une empathie saine.

L'empathie est la capacité à se synchroniser émotionnellement et cognitivement avec une autre personne ; c'est une capacité à percevoir le monde de son point de vue ou à partager ses expériences émotionnelles.

Elle est essentielle pour établir et entretenir des relations, car elle nous aide à nous connecter aux autres à un niveau plus profond. Elle est également associée à une plus grande estime de soi et à un meilleur sens de la vie.

De manière générale, il existe deux types d'empathie : l'empathie cognitive et l'empathie émotionnelle.

L'empathie émotionnelle consiste à partager des sentiments avec les autres, dans la mesure où l'on peut ressentir de la douleur en voyant une autre personne souffrir, ou de la détresse en voyant une personne en détresse.

C'est ce qui arrive à de nombreuses personnes lorsqu'elles voient des nouvelles inquiétantes à la télévision, surtout lorsqu'elles concernent des personnes spécifiques et leur vie.

Mais l'empathie émotionnelle ne consiste pas seulement à ressentir des émotions négatives. Les personnes empathiques peuvent éprouver beaucoup de positivité.

L'effet sur le corps

Si cette contagion émotionnelle est propice aux états positifs, le fait d'avoir trop d'empathie lorsque nous voyons d'autres personnes souffrir peut être très pénible et même entraîner des problèmes de santé mentale.

Une trop grande empathie pour les autres, en particulier lorsque nous faisons passer les émotions des autres avant les nôtres, peut conduire à des expériences d'anxiété et de dépression, ce qui explique pourquoi nous sommes nombreux à nous sentir mal lorsque nous regardons les informations sur la guerre en Ukraine.

L'autre type d'empathie, l'empathie cognitive, consiste à voir le monde à travers les yeux des autres, à le voir de leur point de vue, à se mettre à leur place sans nécessairement ressentir les émotions qui y sont associées et, par exemple, à regarder les informations et à comprendre, à un niveau cognitif, pourquoi les gens ressentent du désespoir, de la détresse ou de la colère.

Ce processus peut conduire à une empathie émotionnelle ou même à une empathie somatique, qui a un effet physiologique (somatique, du mot grec ancien "soma", qui signifie corps).

L'effet de l'empathie sur le corps est bien documenté. Par exemple, les parents qui éprouvent des niveaux élevés d'empathie envers leurs enfants ont tendance à avoir une inflammation chronique de faible intensité, ce qui entraîne une baisse de l'immunité.

En outre, notre cœur bat au même rythme lorsque nous éprouvons de l'empathie pour les autres. L'impact de l'empathie lorsqu'on regarde les informations est donc à la fois psychologique et physiologique. Dans certaines circonstances, cela peut entraîner ce que certains appellent une "fatigue de la compassion".

Un terme mal choisi

L'épuisement ressenti par une empathie excessive est traditionnellement appelé fatigue de la compassion.

Mais plus récemment, à l'aide d'études d'IRM, des neuroscientifiques ont affirmé qu'il s'agissait d'une erreur et que la compassion ne provoquait pas de fatigue.

Cette distinction est importante car il s'avère que la compassion est l'antidote à la détresse que nous ressentons lorsque nous nous identifions à des personnes qui souffrent. Nous avons besoin de moins d'empathie et de plus de compassion.

Émotions négatives et positives

L'empathie et la compassion sont des événements différents dans le cerveau.

L'empathie pour la douleur d'une autre personne active les zones du cerveau associées aux émotions négatives. Parce que nous ressentons la douleur de l'autre, la frontière entre soi et les autres peut s'estomper si nous n'avons pas de bonnes limites ou de bonnes capacités d'autorégulation, et nous subissons une "contagion émotionnelle".

Nous nous empêtrons dans la détresse et avons du mal à calmer nos émotions.

Nous voulons nous dépersonnaliser, nous engourdir et détourner le regard. En revanche, la compassion est associée à l'activité des zones du cerveau associées aux émotions et aux actions positives.

La compassion peut être définie simplement comme une empathie accompagnée d'une action visant à soulager la douleur d'une autre personne.

La partie action de la compassion nous aide à désengager notre système émotionnel des autres et à voir que nous sommes des individus distincts.

Nous ne sommes pas obligés de ressentir leur douleur lorsque nous en sommes témoins. Au contraire, nous avons le sentiment de vouloir aider. Et nous vivons une expérience émotionnelle positive et gratifiante lorsque nous éprouvons de la compassion pour une autre personne.

Voici quatre façons de pratiquer la compassion en regardant les informations.

1. pratiquer une méditation d'amour bienveillant

Lorsque vous vous sentez dépassé par les informations, pratiquez une méditation d'amour bienveillant, où vous vous concentrez sur l'envoi d'amour à vous-même, aux personnes que vous connaissez et à celles que vous ne connaissez pas et qui souffrent.

Si nous parvenons à créer un tampon d'émotions positives grâce à la compassion, nous pouvons réfléchir à la manière d'aider et d'agir de manière pratique dans des situations accablantes. L'entraînement des "muscles de la compassion" permet d'amortir les émotions négatives afin d'être plus motivé pour aider et de ne pas se sentir submergé par des émotions pénibles.

La méditation de l'amour bienveillant ne réduit pas les émotions négatives. Au contraire, elle augmente l'activation des zones du cerveau associées aux émotions positives telles que l'amour, l'espoir, la connexion et la récompense.

2. Pratiquez l'autocompassion

Vous vous culpabilisez de ne pas pouvoir aider, ou vous vous sentez coupable de la vie que vous menez alors que d'autres personnes souffrent ? Essayez d'être gentil avec vous-même.

Rappelez-vous que si notre souffrance est toujours spécifique à nous, elle n'est pas inhabituelle. Nous partageons une humanité commune où nous faisons tous l'expérience d'une certaine forme de souffrance. Tout en étant conscient de votre souffrance, essayez également de ne pas vous identifier à elle de manière excessive.

Ces actes d'autocompassion contribuent à réduire la détresse ressentie lors de l'épuisement empathique et à renforcer le sentiment de bien-être.

3. Action

La détresse empathique évoque des sentiments négatifs, comme le stress, et nous pousse à nous replier sur nous-mêmes et à devenir insociables. En revanche, la compassion produit des sentiments positifs d'amour pour l'autre.

Il nous incite à agir. Plus précisément, la compassion contribue à motiver la sociabilité. Une façon de (contrecarrer la détresse empathique) est de s'impliquer : donner, faire du bénévolat, organiser.

4. Arrêtez le doomscrolling

Il est compréhensible que nous recherchions des informations en période de crise. Cela nous aide à nous préparer.

Toutefois, le "doomscrolling" (le fait de naviguer continuellement sur Internet pour lire des contenus déprimants ou inquiétants sur un site de réseau social ou d'information, en particulier sur un téléphone) n'est pas utile.

Les recherches sur l'utilisation des réseaux sociaux pendant la pandémie ont montré que nous devons être conscients de notre consommation de information pour éviter une augmentation du stress et des émotions négatives.

Il n'est pas réaliste d'éviter complètement les informations, mais il est utile de limiter notre consommation. Une autre suggestion consiste à équilibrer notre consommation de médias en recherchant des histoires d'actes de bonté, qui peuvent nous remonter le moral.

*Trudy Meehan et Jolanta Burke sont respectivement professeur et maître de conférences au Centre de psychologie positive et de santé, Université de médecine et des sciences de la santé, Royal College of Surgeons of Ireland.

*Cet article est paru dans The Conversation et est publié ici sous licence Creative Commons..Cliquez sur ce lien pour lire la version originale en anglais.