Un scandale de corruption d'envergure secoue actuellement les forces armées camerounaises, mettant en lumière un réseau présumé impliquant des officiers supérieurs de la gendarmerie et un cadre bancaire de haut rang. Face à l'ampleur de l'affaire, le ministre de la Défense, Joseph Beti Assomo, a pris la décision de confier l'enquête à la Sécurité militaire, marquant ainsi une nouvelle étape dans cette affaire qui ébranle l'institution depuis plusieurs mois.
L'affaire, qui a éclaté il y a quelques mois, porte sur un présumé pot-de-vin d'environ 30 millions de francs CFA au sein du groupement de gendarmerie du Centre. Selon les informations recueillies par nos sources, l'argent aurait été remis au colonel Otoulou Jean Pierre, commandant de la légion de gendarmerie du Centre, par Jean Gakam, un banquier influent d'Afriland First Bank. Ce qui semblait être au départ une transaction discrète s'est rapidement transformé en un scandale aux ramifications multiples, impliquant plusieurs officiers de haut rang.
L'enquête préliminaire a révélé un schéma de distribution de l'argent qui met en cause plusieurs officiers. Le colonel Otoulou Jean Pierre, figure centrale de l'affaire, aurait reçu la somme initiale de 28 millions de francs CFA de la part de Jean Gakam. Par la suite, il aurait procédé à une redistribution, allouant 6 millions de francs CFA au capitaine Megouem, en service au groupement de gendarmerie, et 7 millions de francs CFA au colonel Ekani, alors commandant du Poste de Commandement Opérationnel (PCOPS).
Suite à la découverte de ces agissements, la hiérarchie militaire a rapidement pris des mesures disciplinaires. Le colonel Ekani s'est vu infliger 45 jours de sanctions et a été démis de ses fonctions au PCOPS. De son côté, le capitaine Megouem a été sanctionné et muté dans le Nord du pays, une affectation perçue comme une forme de mise à l'écart.
Cependant, l'affaire a pris une nouvelle tournure lorsque le colonel Ekani a décidé de contester fermement les accusations portées contre lui. Clamant son innocence, il a dénoncé ce qu'il considère comme un "règlement de comptes" et a nié catégoriquement avoir reçu le moindre franc dans le cadre de cette affaire. Sa décision de faire appel auprès du ministre de la Défense a conduit à la réouverture du dossier.
Face à la complexité de l'affaire et aux contestations soulevées, le ministre de la Défense, Joseph Beti Assomo, a pris la décision de confier une nouvelle enquête à la Sécurité militaire. Cette décision marque une volonté d'éclaircir tous les aspects de ce scandale et de faire toute la lumière sur les allégations de corruption.
Dans le cadre de cette nouvelle phase d'investigation, Jean Gakam, le banquier au cœur de l'affaire, a été convoqué le 1er octobre 2024 à la direction de la Sécurité militaire. L'audition s'est déroulée le lendemain, le 2 octobre, dans une configuration peu conventionnelle : le lieutenant-colonel Samnick, commandant adjoint de la Sécurité militaire, s'est déplacé dans les bureaux d'Afriland First Bank pour interroger Gakam sur son rôle dans cette affaire.
Un élément particulièrement troublant de cette affaire est le lien présumé avec une autre affaire qui a secoué le Cameroun : l'assassinat du journaliste Martinez Zogo. Selon nos informations, Jean Gakam aurait été recommandé auprès du colonel Otoulou Jean Pierre et du capitaine Megouem par un certain Martin Savom, lui-même inculpé dans l'affaire de l'assassinat du journaliste. Cette connexion inattendue ajoute une dimension supplémentaire à ce scandale déjà complexe, soulevant des questions sur l'étendue réelle du réseau impliqué.