C’est un secret de Polichinelle. Franck Biya est aux portes d’Etoudi. Tout est mis en œuvre afin que le fils de Paul Biya assure une succession dynastique au pouvoir à l’instar du Gabon ou encore du Togo. ces derniers temps, les signaux se multiplient. Jeune Afrique enchaine les articles dans ce sens ce qui est loin d’être anodin. Dans un nouveau dossier, le Magazine panafricain plonge ses lecteurs dans les coulisses de cette aventure.
La dernière visite de Franck Biya fait toujours polémique. « Officiellement, il était organisé par le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC). Problème : l’invité d’honneur, fût-il le fils du président-fondateur, n’est membre d’aucun organe du parti. D’ailleurs, jusqu’à ce jour, personne ne l’avait vu arborer l’écharpe bleue et blanche. Voilà pourtant plusieurs mois que ses soutiens s’activent avec plus ou moins de finesse. Ils se sont baptisés « les franckistes » et constituent une mouvance hétéroclite, qui ne bénéficie pas de l’onction officielle du principal intéressé. Mais celui-ci ne les a pas désavoués non plus. », précise Jeune Afrique.
« Peut-être Franck Biya a-t-il entrepris le voyage à titre privé, le monarque ayant prétendu plus tard que son invité était venu lui présenter ses condoléances pour le décès de sa mère. Sauf que les obsèques ont eu lieu il y a plus d’un an… Quel que soit le bout par lequel on le prend, l’événement ressemble bien à une entreprise de communication politique conçue pour sonder les esprits. Et le tout-Yaoundé écarquille les yeux, plongé qu’il est dans un abîme de perplexité.Le scénario d’une mise en orbite pure et simple ne correspond pas au style Biya. Pendant quarante ans, et en dépit des pressions, le chef de l’État a toujours rechigné à pousser son fils dans le chaudron politique, lui qui n’ignore rien des attentes liées à une succession. On a longtemps scruté l’indice et cherché le signe qui indiquerait l’identité de celui à qui le président envisage de léguer les clés d’Etoudi. Mais, en politicien madré, il n’a jamais rien laissé transparaître. Il a multiplié les fausses pistes, se cachant derrière la Constitution pour déclarer qu’il n’avait pas de dauphin – « le Cameroun n’est pas une monarchie ! »., souligne le Magazine Panafricain.
Pour le moment, l’attitude de Paul Biya, qui devrait sans doute avoir le dernier mot semble ambiguë.
« La nature ayant horreur du vide, le marionnettiste désormais nonagénaire a souvent pris soin d’aiguiser lui-même les appétits de ses proches collaborateurs en leur abandonnant attributions, prérogatives et délégations de signature… Il a laissé la presse se perdre en conjectures sur l’avenir de « dauphins » finalement tombés en disgrâce, et dont quelques uns purgent des peines de prison de longue durée. Il est vrai que cet exercice de style ayant révélé toutes ses ficelles, les prétendants – évidemment non déclarés – ont appris à éviter le piège de l’impatience. Alors le président peut-il faire de Franck Biya son héritier sans se contredire ? », analyse Jeune Afrique.
« Député et président du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (PCRN), Cabral Libii prend date. « Ce voyage est pour nous, sans le moindre doute, la présentation publique du successeur souhaité [par Paul Biya], dit l’opposant. C’est donc le lancement larvé d’une précampagne électorale. La stratégie choisie est celle du fait accompli. Si, d’un point de vue juridique, le citoyen Franck Biya a le droit de faire ce qu’il veut, ce qu’il s’est passé le 6 novembre 2022 est, d’un point de vue politique, un délit d’initié. »
D’autres assurent que Paul Biya n’a aucun projet de succession dynastique, même s’il ne peut empêcher le citoyen Franck Biya de briguer la présidence. Le fils du président est éligible, certes, mais peut-il gagner sans le soutien de son père et les moyens de l’État ? Et, soudain, voilà que le Cameroun veut percer le mystère de cet homme si discret que même son baptême du feu politique s’est joué à la manière du cinéma muet. À Rey-Bouba, il n’a pas pris la parole ; la plupart de ses concitoyens n’ont même jamais entendu le son de sa voix. Il vit entouré de quelques amis d’enfance et fuit les mondanités.Pourtant, au début de 2020, lors d’un dîner-débat organisé à la Maison de l’Amérique latine, à Paris, par Olivier Zegna-Rata, un ex-directeur du cabinet d’Hervé Bourges, le fils Biya a discouru sur le thème du financement des investissements devant un parterre surpris de journalistes, de diplomates, de banquiers, de patrons de fonds d’investissement et de dirigeants d’organisme, dont le directeur général de l’Agence française de développement (AFD). Les convives du jour ne sont pas les seuls à penser qu’ils ont sous-estimé le quinquagénaire. « Il connaît bien le système bâti par son père, y compris dans ses pires travers, et formule de bonnes idées de réforme », prétend un ancien ambassadeur européen accrédité à Yaoundé », rapporte Jeune Afrique.