«Je ne peux plus continuer…». Seul dans le box des accusés ce vendredi 13 novembre 2015, Yves Michel Fotso n’a pas pu supporter. Agité et visiblement irrité par les propos du Procureur général qui venait de lui faire comprendre que «sa» demande d’arrêt de poursuite n’influence pas la poursuite de la procédure, l’ex. Administrateur Directeur Général (ADG) de la Camair a été victime d’un malaise au cours de l’audience relative à la «Liquidation Camair».
Heureusement, ses avocats et son épouse étaient-là, très attentifs à ses gestes. Ceux-ci ont accouru pour le soutenir et le conduire hors de la salle d’audience. La dame et les avocats ont retiré sa veste, sans doute pour lui permettre de mieux respirer. Peu de temps plus tard, le Président suspendait l’audience, tandis que c’est en bras de chemise qu’Yves Michel Fotso a regagné le mini bus du secrétariat d’Etat à la défense (Sed).
Yves Michel Fotso crie à l’arnaque
La dernière audience relative à ce volet a en effet été assez houleuse. La collégialité du Président Moukouri Francis Claude a usé de son savoir et du savoir faire pour calmer les esprits surchauffés. L’expérience de ce magistrat hors hiérarchie et de ses deux juges a été mise à rude épreuve, sans pour autant être malmenée. Dès l’entame de l’audience, Me Achet, avocat attitré d’Yves Michel, a soulevé un certain nombre d’exceptions et autres observations. Parmi lesquelles, l’arrêt des poursuites contre Yves Michel Fotso et la demande de sursis à statuer. La demande est fondée sur la restitution totale du corps délit, soit la somme de 1.750.661.315 Fcfa, conformément à l’article 3 du Protocole d’Accord Transactionnelle signé le 14 Août 2013 entre Yves Michel Fotso et le liquidateur Emile Christian Bekolo.
La restitution du corps du délit est réglementée par l’article 18-1 (nouveau) portant la loi organique du TCs. Le décret d’application du 04 Août 2013 fixe en son article 4 les modalités de restitution du corps du délit. Celle-ci peut être faite en numéraire ou en nature. Me Achet ne s’est pas contenté seulement de parler, mais a produit toutes les pièces liées à la restitution, faite en totalité en numéraire. Pour la défense, l’ancien ADG de la défunte Cameroon Airlines s’est acquitté, en totalité, de la somme de 1.750.661.315 FCFA due à la liquidation Camair.
La lumière du Protocole
L’article 3 portant Règlement des réclamations acceptées stipule en son 1er paragraphe : « Les Parties conviennent que l’Inculpé (Yves Michel Fotso) paiera à titre de solde de tout compte à la Partie Civile le montant total en francs Fcfa de 1.750.661.315 (un milliard sept cent cinquante millions six cent soixante un mille trois cent quinze). L’article 4 de la même convention précise : L’inculpé s’engage irrévocablement à payer les sommes mentionnées à l’article 3 du Protocole à la Partie Civile selon les modalités ci-après :- a) La somme de Fcfa 165.000.000, à la signature du présent Protocole d’Accord Transactionnel par l’émission de deux Chèques remis à la Liquidation Camair (Chèque UBA du 12 Août 2013 d’un montant de Fcfa 95.000.000, chèque UBA du 12 Août 2013 d’un montant Fcfa 70.000.000).
Tous les chèques ont été émis par Fotso Group Holding SA, à l’ordre de Cameroon Airlines Liquidation ; b) La somme de francs Suisses 500.000 (cinq cent mille), soit environ Fcfa 250.000.000 qui sera prélevée sur le montant déposé par Yves Michel Fotso au titre de sa caution personnelle auprès du Ministère public de la Confédération Suisse ; c) La somme de Fcfa 1.335.661.315 sera payée conformément à la procédure de restitution du corps du délit prévue par la loi régissant le Tribunal Criminel Spécial (TCS). L’article 5 sur la Renonciation affirme : La Partie Civile accepte les sommes susvisées sans aucune réserve.
Le présent Protocole produit effet extinctif immédiatement et emporte renonciation expresse et irrévocable par Camair SA en liquidation et le Liquidateur de la Camair à maintenir, engager ou soutenir, toutes actions présentes et/ou futures, de quelque nature que ce soit, contre Yves Michel Fotso, devant toutes juridictions camerounaises et/ou étrangères (y compris les juridictions Suisses).
Aussi, pour Yves Michel Fotso, le Protocole d’Accord Transactionnel reste la seule loi qui lie les deux parties. Mais, le couac est vite survenu lorsque l’avocat de la partie civile a soutenu que la somme de 250.000.000 Fcfa versée, au biais de deux chèques UBA, avant la signature de la convention ne représentait que les charges et autres frais de justice. La réplique de l’ex. ADG de la Camair ne s’est pas fait attendre. Il a fustigé l’attitude du liquidateur qui, dit-il en passant, fut commissaire aux comptes de la Camair du temps où il occupait les fonctions de l’ADG. Bref, par ces manœuvres, le liquidateur tente de lui extorquer l’agent gagné à la sueur de son front.
Sur les deux exceptions majeures soulevées par la défense, l’arrêt des poursuites et le sursis à statuer fondées sur la restitution totale du corps du délit, le Procureur général, très accroc, a répondu que les deux demandes n’influencent pas la poursuite des débats. Dans la mesure où, a-t-il martelé, le monopole des poursuites appartient au Ministère public. L’audience reprendra le 26 novembre 2015 aux mêmes fins. C’est dire que le feuilleton «Liquidation Camair» est loin d’être terminé