La tension monte entre Orange Cameroun, filiale du géant français des télécoms, et Cameroon Telecommunications (Camtel), l’opérateur public camerounais. Les deux acteurs s’affrontent une nouvelle fois sur fond de perturbations récurrentes du service internet dans le pays. Selon des révélations exclusives de Jeune Afrique, Orange Cameroun accuse Camtel d’être responsable des interruptions de ses services, tandis que l’opérateur public rejette fermement ces allégations.
Dans un communiqué récent, Orange Cameroun a pointé du doigt « des coupures répétées des liaisons de transmission en fibre optique, fournies par Camtel », pour justifier les lenteurs et les dégradations de ses services de télécommunications. L’opérateur privé affirme avoir enregistré pas moins de 15 coupures de fibre optique en février 2025, affectant des segments stratégiques de son réseau et privant ainsi ses clients, particuliers comme entreprises, d’un accès stable à internet et aux services mobiles dans plusieurs régions du pays.
Cependant, Camtel a rapidement réagi pour contrer ces accusations. Dans une communication datée du 17 février, l’opérateur public s’est dit « offusqué des affirmations visant à lui faire porter la responsabilité de la dégradation de la qualité des communications électroniques du réseau Orange Cameroun ». Judith Yah Sunday, directrice générale de Camtel, a dénoncé une tentative de « discréditer la qualité de son réseau de transport ».
Selon des informations exclusives obtenues par Jeune Afrique, Orange Cameroun loue des « fibres noires » auprès de Camtel pour son réseau haut débit 4G. La fibre noire désigne des câbles de fibre optique non activés, que l’opérateur privé équipe pour fournir ses services. Cependant, Camtel reproche à Orange de refuser « délibérément » d’utiliser des solutions alternatives, comme les capacités managées, qui offriraient une redondance en cas de panne et garantiraient une meilleure stabilité des services.
Camtel insiste sur le fait qu’il ne peut être tenu responsable des problèmes rencontrés par Orange, arguant que l’opérateur privé a choisi une solution technique limitée. « Orange Cameroun s’appuie sur la fibre noire pour bâtir son propre réseau, fibre sur laquelle Camtel n’a aucune visibilité », précise le communiqué de l’opérateur public.
Ce différend n’est pas nouveau. Depuis des mois, les relations entre Camtel et les opérateurs privés, dont Orange et MTN, sont tendues. En septembre 2024, MTN avait déjà dénoncé une « dégradation désastreuse » de la qualité de la fibre optique, avec une augmentation de 40 % des coupures en un an. Un audit mené par l’Agence nationale de régulation des télécommunications (ART) avait alors pointé du doigt le vieillissement des infrastructures et les coupures fréquentes d’alimentation électrique comme principales causes des dysfonctionnements.
Malgré ces tensions, Orange Cameroun assure « s’efforcer à assurer une bonne qualité de service à ses clients en prenant les mesures nécessaires qui lui incombent ». De son côté, Camtel réaffirme son engagement à maintenir la qualité de ses infrastructures, tout en appelant les opérateurs privés à adopter des solutions techniques plus robustes.
Ces perturbations récurrentes du service internet ont des répercussions majeures sur l’économie camerounaise, notamment pour les entreprises et les particuliers dépendants d’une connexion stable. Alors que le Cameroun cherche à se positionner comme un hub numérique en Afrique centrale, la guerre des fibres optiques entre Orange et Camtel risque de freiner ces ambitions.
Jeune Afrique révèle que ce conflit met en lumière les défis structurels du secteur des télécommunications au Cameroun, où la collaboration entre opérateurs publics et privés reste un enjeu clé pour garantir un service de qualité. Dans un contexte où la demande en connectivité ne cesse de croître, la résolution de ces tensions sera cruciale pour l’avenir du numérique dans le pays.