Actualités of Thursday, 29 December 2022

Source: Économies Africaines

Terrible nouvelle : ça sent mauvais pour Maurice Kamto et ses collègues pour 2025 dans la succession de Biya

L'opposition est mal partie pour 2025 L'opposition est mal partie pour 2025

Face à l’impressionnante machine électorale du régime actuel, l’opposition, qui entretient les rivalités entre les leaders et les querelles intestines au sein des partis politiques, n’a que peu de chances de s’imposer.

La question peut paraître superfétatoire, mais sur la scène politique camerounaise, elle a tout son sens: à qui s’opposent les opposants camerounais ? Réponse surprenante : aux autres opposants. Il est en effet courant de voir les chefs de partis camerounais s’invectiver sur la toile via leurs partisans et parfois même directement, multipliant sur les réseaux sociaux les clashs et les campagnes de calomnies vindicatives. Disposant de véritables armées sur les différentes plates-formes de médias Internet, les leaders de l’opposition se livrent une guerre sans merci dont se délectent bien sûr les tenants du pouvoir. Par exemple, fin octobre 2022, le député Cabral Libii, président du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (PCRN), s’est dit ouvert à un débat avec le Pr Maurice Kamto, président du Mouvement pour la réconciliation du Cameroun (MRC) et leader de l’opposition. Stupéfaction dans le camp de ce dernier, dont les partisans ont toujours insinué que Cabral Libii frayait avec le pouvoir: « Pourquoi un opposant voudrait-il, sans aucun prétexte d’actualité, porter la contradiction à son collègue plutôt qu’au parti au pouvoir ? », se demandent les partisans du Pr Maurice Kamto. Proche de lui, l’activiste Ndoumbe Nding confirme : «Un tel débat ne peut qu’amuser le régime, qui doit se dire « mes opposants sont en train de s’étriper au lieu de s’attaquer à ce qui les empêche d’accéder au pouvoir.» Cette polémique inutile entre les deux grandes formations du camp de l’opposition a tenu le public en haleine pendant quelques semaines, aggravant le dépit de ceux qui estiment que faute de parvenir à s’entendre sur un modus operandi minimal, l’opposition camerounaise n’a que peu de chances d’obtenir l’alternance, ce qui s’est d’ailleurs démontré lors des derniers scrutins.

Lors de la campagne pour l’élection présidentielle d’octobre 2018, les partisans de l’opposition ont passé le plus clair de leur temps à s’invectiver, s’accusant les uns les autres soit d’être à la solde du pouvoir, soit d’être corrompus, soit encore d’être tribalistes. Une attitude qui a ouvert la voie à une victoire sans bavure du candidat Paul Biya. Et même les allégations de fraudes électorales n’ont pas pu donner lieu à une contestation coordonnée de l’opposition, les uns étant toujours occupés savonner la planche aux autres. Ces antagonismes au sein de l’opposition atteignent une telle gravité que le chef du MRC, le Pr Maurice Kamto, arrêté et emprisonné lors des contestations post-électorales en 2019, n’a pas reçu le soutien des poids lourds de l’opposition.


Aujourd’hui encore, les militants emprisonnés à la suite des marches de contestation, et qui ont pour certains écopé de sept ans de prison, ne figurent pratiquement pas dans les revendications des partis politiques. Du temps où il était le leader incontesté de l’opposition, Ni John Fru Ndi, le président du Social Democratic Front (SDF), a en vain tenté des alliances avec ses compères de l’opposition, dans le but notamment de structurer une victoire du «peuple du changement» aux différents scrutins. Peine perdue car certains, comme Maigari Bello Bouba, le président de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès, ont choisi de rejoindre le camp du pouvoir: il est devenu depuis 1997 ministre d’État dans le gouvernement de Paul Biya. En mars 2021, les chefs de ces formations politiques rivales se sont réunis à plusieurs reprises pour lancer une initiative indépendante de révision du code électoral autour de Patricia Tomaïno Ndam Njoya, veuve et héritière politique d’Adamou Ndam Njoya, le fondateur de l’Union démocratique du Cameroun. Y participaient le député Joshua Osih pour le compte du SDF, Cabral Libii, le Pr Maurice Kamto ou encore le député Pierre Kwemo, transfuge du SDF qui a fondé l’Union des mouvements socialistes (UMS). « Nous, partis politiques signataires du présent communiqué, (..) avons décidé de travailler ensemble dans un cadre républicain inclusif, avec toutes les parties prenantes du jeu démocratique, afin de mettre en place un système électoral nouveau ou amendé pour la stabilité et la prospérité de notre pays », indiquaient-ils dans le document distribué aux médias. Un projet de code électoral consensuel a d’ailleurs été adopté à l’issue de leurs travaux. Et même si la présentation de ce document au grand public a été empêchée par le pouvoir, cette mise en commun des efforts de l’opposition a été saluée par l’opinion, qui y a vu la capacité de ces leaders à dépasser leurs rivalités. Dans la foulée, le SDF, le PCRN, l’UDC et l’UMS, qui disposent de députés à l’Assemblée nationale, ont fondé le 11 mars 2022 l’Union pour le changement, un groupe parlementaire censé mener un programme d’action politique commun au sein du Parlement. Mais ce groupe a aussitôt été mis à mal par les démarches solitaires d’un député du SDF visant à miner cette coalition. Même à l’intérieur des partis politique, la vie n’est pas un long fleuve tranquille, il s’en faut de beaucoup. Les batailles intestines sont rudes et débouchent même sur des postures irrationnelles. Par exemple, lors des dernières élections sénatoriales, les conseillers municipaux du PCRN que préside le député Cabral Libii ont voté pour les listes du RDPC, le parti au pouvoir, délaissant les candidats de leur propre parti. Quant à l’Union des populations du Cameroun, qui est le plus ancien parti politique encore actif sur la scène politique, il reste malheureusement plus réputé pour ses batailles judiciaires interminables que pour son ancienneté. Depuis 30 ans, différentes factions se disputent en effet le leadership du parti devant les tribunaux, et actuellement il existe au moins deux secrétaires généraux, chacun avec son bureau revendiquant sa légalité et sa légitimité à la tête du parti, sans compter les dissidents partis créer leur propre formation politique et se réclamant de l’idéologie des pères fondateurs de l’UPC.


Le SDF de Ni John Fru Ndi, figure emblématique de la lutte pour la restauration du multipartisme, ne fait pas exception. Ce parti traverse une énième crise interne sur fond de lutte pour la succession du fondateur, qui a déjà exprimé sa volonté de passer la main. Les nominations du 16 juin 2022 dans les instances du parti sont apparues comme une purge contre les adversaires supposés ou réels du vice-président et député Joshua Osih, qui a manifestement les faveurs du sortant. Les frustrés de ces nominations ont aussitôt fait bloc et signé une déclaration le 22 juin, sommant Ni John Fru Ndi d’annuler ses nominations, de convoquer un congrès, puis de rendre compte de la gestion financière du parti. Auparavant Jean Michel Nintcheu, l’un des plus farouches adversaires du vice-président Joshua Osih, avait réuni ses partisans à Douala pour exclure du parti le vice-président Joshua Osih. Une initiative qui n’a certes pas prospéré, mais qui a infligé de profondes blessures à la cohésion du parti.