Actualités of Tuesday, 13 August 2024

Source: www.camerounweb.com

Tikar et Bamoun : ces faits que vous ignorez

Au moins 6 personnes ont perdu la vie lors des derniers affrontements Au moins 6 personnes ont perdu la vie lors des derniers affrontements

Les appels au calme de part et d’autre ont fini par produire des résultats. Les tensions entre Tikar et Bamoun à Magba dans le Noun sont finalement maitrisées même si le bilan en termes de perte en vie humaine reste lourd (au moins 6 morts). Le journaliste et lanceur d’alerte Boris Bertolt remonte aux origine de la crise entre Tikar et Bamoun.

Le 02 novembre 1955 est créée la commune mixte rurale de Magba dont le ressort territorial se recoupait avec celui du « Groupement Magba-Tikar ». Le chef supérieur d’alors est Ngangouap, cumulativement avec ses fonctions de Chef du village de Manté. Il décède en 1958.

Comme celui-ci durant son règne s’était rendu coupable, selon ses propres notables, de nombreuses dérives dictatoriales et managériales, lors de la « palabre » tenue en Magba le 9 février 1959, sous la coordination administrative du chef de la « Région Bamoun » (ancienne dénomination du département du Noun), les différents chefs traditionnels et notables vont jeter leur dévolu sur Mallam Pokassa Adamou, qui était par ailleurs premier adjoint au sultan Njimoluh Seidou. Sa désignation comme chef supérieur de Magba sera homologuée par un arrêté du 23 avril 1959, signé du premier ministre du Cameroun autonome, Ahmadou Ahidjo.

Nji Pokasa Adamou décèdera à son tour le 23 juillet 1975. Il sera remplacé à la tête de la chefferie supérieure de Magba par Nji Vessah Amadou.
Après le décès de ce dernier, la chefferie supérieure de Magba restera vacante pendant quelques temps.

Face à la situation de vacance qui devenait assez problématique, le Sultan Ibrahim Mbombo Njoya décida de faire « revenir » l’un des enfants naturels de Nji Vessah Amadou, en la personne de Vessah Tiani Olivier, qui était un homme d’affaires prospère installé à Douala, afin de redonner vie à la chefferie supérieure de Magba. Celui-ci en l’honneur de son père va procéder à une importante restauration et rénovation de la chefferie supérieure de Magba, ainsi qu’à la construction d’importants équipements sociaux dans cette localité.
Les populations de Magba seront si heureuses que lorsqu’il se présente comme candidat à la mairie en 2002, c’est tout naturellement qu’il est élu haut la main. Devenant ainsi le tout premier maire RDPC du département du Noun depuis le retour du multipartisme en 1991.

Par ailleurs, à la suite de la création d’une circonscription législative à Magba en 2007, il a été conclu une entente entre les communautés selon laquelle, lorsque le maire est Bamoun, le député de Magba est Tikar ; et vice-versa.
Mais curieusement en 2013, le gentlemen agreement est brisé. En effet, quelques temps avant le double scrutin législatives et municipales de 2013, le maire Vessah Tiani Olivier est victime d’un accident. De commun accord, les Bamoun et les tikar s’entendront qu’il sera plutôt investi comme député en 2013 et que Mbouen Dieudonné, un Tikar sera investi pour la mairie de Magba.
Une fois Mbouen Dieudonné investi comme candidat RDPC à la mairie, les Tikar vont s’élever contre l’entente qui avait été passée.

Résultats des courses à l’issue du double scrutin municipales et législatives du 30 septembre 2013 :
- Maire de la commune de Magba : Mbouen Dieudonné – Tikar
- Député de Magba : Nsa Moussa – Tikar
En 2020, les Tikars feront une fois de plus front et bouteront définitivement les Bamoun de tous les postes électifs de premier plan à Magba.
Ainsi l’on aura comme à l’issue du double scrutin municipales et législatives du 09 février 2020 :

- Maire de Magba : Mbouen Dieudonné – Tikar
- Député de Magba : Ngnegue Simon – Tikar
Dans la même veine de monopolisation de toutes les fonctions sociopolitiques par les Tikar au détriment des Bamoun, la mort de Vessah Olivier ayant entrainé une autre vacance à la tête de la chefferie supérieure de Magba, certaines élites bien connues de la ville de Magba vont décider de « récupérer » cette chefferie, en mettant au-devant le chef de troisième degrés Soulé.

Ainsi, les enjeux consistent précisément pour ces élus de conserver leurs postes lors des prochaines élections, en rompant une fois de plus le consensus politique qui datait de près de deux décennies, et de caporaliser la chefferie supérieure de Magba.

Et pour être sûrs d’atteindre leurs desseins personnels, des élites Tikar ont alors décidé d’instrumentaliser certains jeunes Tikars de la localité de Magba, afin qu’ils chassent ou terrorisent de manière permanente les Bamoun qui y vivent depuis des siècles. Ceci pour se prémunir contre un éventuel vote-sanction des populations Bamoun dans la lutte de pouvoir .

Il faut surtout noter qu’avec la mort du Sultan Ibrahim Mbombo Njoya, beaucoup ont cru que plus que jamais le temps est venu pour eux de passer à l’offensive, puisqu’ils estiment qu’ils ont désormais en face un jeune Roi, un « enfant » (comme ils aiment bien à l’appeler), qui n’a pas le même poids sociopolitique que son défunt père qui refrénait quelque peu leurs ardeurs.