Pourtant sévèrement réprimée par la loi, la pratique a fait son nid dans le secteur routier, n’indisposant même plus les usagers.
Dans la vie, on a le choix entre faire plusieurs allers-retours et tout emmener en un seul voyage. Plein de Camerounais sont plutôt pour la seconde option. D’où le spectacle permanent des mototaxis, taxis jaunes et autres clandos débordants d’occupants, personnes et biens.
Non loin du carrefour Coron, dans une gare routière de fortune. Un petit véhicule ralliant la capitale à de petites bourgades enclavées des environs s’apprête à partir. A l’intérieur, 11 adultes et un bébé. Sans compter les bagages à l’arrière et sur le toi. « C’est tout à fait normal pour nous qui desservons ces lignes. Je porte trois personnes devant et je partage mon siège avec l’une d’elle. C’est ce qu’on appelle « petit chauffeur ».
Comme la voiture est large à l’arrière, je fais asseoir quatre personnes adultes. Et elles portent les autres clients. C’est comme cela que nous nous débrouillons. Les voyageurs et nous n’avons pas le choix : les routes qui vont chez eux sont mauvaises et rares sont les voitures qui les desservent », explique tranquillement le chauffeur. Cela se voit pourtant qu’il est mal installé et doit faire une gymnastique inappropriée entre les jambes de ses clients pour passer les vitesses.
La surcharge, cause de nombreux accidents de la circulation sur nos routes, est l’activité la mieux partagée des automobilistes. Dans le transport urbain ou interurbain. Un tour dans les artères de nos villes et campagnes, et chacun peut constater que la pratique est bien incrustée.
« C’est une véritable gangrène sociale. A Yaoundé par exemple, il est quasiment impossible d’effectuer le voyage, installé tout seul sur le siège passager d’un taxi. Même si vous vous proposez, on vous « bâche » ou alors on vous demande de vous installer à l’arrière pour éviter ces désagréments », assure Madeleine Kam, étudiante habituée des taxis. Interpellés, les chauffeurs de ces véhicules rejettent les torts sur les clients. « Ils ne paient pas bien le taxi dont le tarif est fixé à 250 F. Les gens paient 100 F à la place.
Et donc pour faire recette, nous sommes obligés de surcharger les clients », avoue Jacques T., chauffeur de taxi. Du côté des mototaxis, la situation n’est guère plus reluisante. Sur les courtes distances comme sur les longues, les clients sont mis par trois, quatre, voire cinq quand il s’agit d’enfants ou de déplacements familiaux.
« Dernièrement, j’ai emprunté une moto dans mon quartier. J’ai proposé au conducteur de ne pas surcharger parce qu’il pleuvait. Il m’a demandé si j’ai déjà vu une moto qui ne surcharge pas. Il a fallu que je lui paie les deux autres places pour pouvoir voyager à l’aise », témoigne Marcelline Eyenga, fonctionnaire. Hélas, la surcharge n’est pas que physique et relative aux individus. Elle est aussi structurelle.
« 70% des gros porteurs au Cameroun sont concernés par cet aspect. Concrètement, il s’agit de ces promoteurs qui refont l’installation des sièges de bus pour en augmenter les capacités. Ainsi, un bus où le constructeur avait monté 50 sièges se retrouve au final avec 70 places voire plus », dénonce un responsable du ministère des Transports.
La quatrième Semaine des Nations unies pour la sécurité routière est l’occasion d’alerter à nouveau sur un phénomène qui provoque régulièrement de graves et mortels accidents sur nos routes. Surtout quand elle s’accompagne de l’excès de vitesse. Car ceux qui choisissent de tout emmener en un seul voyage sont évidemment toujours pressés.