La déclaration de Bruno Bidjang, Directeur Général des Médias du Groupe l'Anecdote, lors du journal télévisé de 20 heures ce 21 octobre 2024, n'est pas passée inaperçue. Face aux caméras, le journaliste s'est lancé dans une description presque lyrique de l'apparition du Président Paul Biya à son retour au Cameroun : "J'ai vu un Paul Biya frais, rassurant, élégant et très bien portant, marchant sans tituber."

Cette description dithyrambique intervient dans un contexte particulièrement sensible. Après sept semaines d'absence du territoire national, le retour du Président, âgé de 92 ans, était scruté avec attention par l'opinion publique camerounaise. Les spéculations sur son état de santé s'étaient multipliées, alimentées par une communication gouvernementale jugée opaque par de nombreux observateurs.

L'emphase mise par Bruno Bidjang sur la démarche présidentielle - "marchant sans tituber" - révèle en creux les inquiétudes qui pesaient sur la santé du chef de l'État. Cette précision, censée être rassurante, souligne paradoxalement le caractère inhabituel d'un tel constat pour un dirigeant en exercice.
L'accueil organisé à l'aéroport international de Yaoundé illustre la volonté du pouvoir de transformer ce retour en démonstration de force. Des militants en tenues traditionnelles ornées du portrait présidentiel, une foule massée le long du parcours, la présence des hauts dignitaires dont le Ministre d'État Ferdinand Ngoh Ngoh : rien n'a été laissé au hasard dans cette chorégraphie du pouvoir.
La déclaration de Bruno Bidjang s'inscrit dans une longue tradition de couverture médiatique complaisante des apparitions présidentielles au Cameroun. Elle pose la question de l'indépendance des médias et de leur rôle dans la construction d'une image présidentielle parfois déconnectée des réalités.
Si la mise en scène de ce retour et les commentaires qui l'accompagnent visent à rassurer l'opinion publique, ils ne répondent pas aux interrogations de fond sur la capacité du président nonagénaire à gouverner le pays. L'absence d'explications sur ces sept semaines passées hors du territoire national laisse également en suspens de nombreuses questions.