A l’occasion de la célébration de la 51ième édition de la fête de la jeunesse, les organisations de la Société Civile actives au Cameroun, de droit Camerounais, NDH-CAMEROUN et OS-Humanitaire, saisissent l’occasion de la fête de la Jeunesse pour exprimer des préoccupations concernant l’épanouissement de la Jeunesse dans l’Etat de Droit. Et considérant que de par sa Constitution et son positionnement sur la scène internationale, le Cameroun s’aligne au rang des Etats de droit, la Société Civile camerounaise, par la voie de ces organisations s’interroge sur la réalité de l’Etat de droit dans la pratique gouvernementale actuelle.
D’emblée, NDH-CAMEROUN et OS-Humanitaire se joignent à l’ensemble de la jeunesse camerounaise pour célébrer cette fête centrée sous le thème « jeunesse et défis de la construction d’une nation exemplaire, indivisible, forte et émergente ». Incontestablement cette thématique qui du point de vue de la syntaxe est structurée et auditivement attrayante, ne devrait toutefois pas contextuellement occulter les situations dramatiques dans lesquelles la jeunesse camerounaise est ancrée notamment dans les domaines des droits de l’Homme, de la sécurité, de son identité voir même dans l’expression de ses droits les plus élémentaires.
Par ailleurs, cette même semaine, nous avons été témoins de deux faits majeurs relatifs au péril sur les droits de l’homme au Cameroun.
*Lundi 13 février, le tribunal Militaire de Yaoundé a abrité le procès des leaders des revendications Anglophones, l’avocat Félix Agbor Nkongho, l’Enseignant Neba Fontem et le journaliste Mancho Bibixy. Ces leaders, arrêtés pourtant dans des localités où existent des Tribunaux militaires sont déportés à Yaoundé pour être jugés
*Le jeudi 16 février, se tenait le procès en appel du jeune élève Ivo Fomusoh Fah, condamné à 10 ans de prison pour avoir « forwardé » un SMS.
Tout en réitérant le soutien à l’Etat du Cameroun dans le chantier de la lutte contre le terrorisme, les organisations de la société Civile tiennent toutefois à rappeler au Gouvernement que cette jeunesse est paradoxalement exposée aux violations criardes et répétés de leurs droits par le gouvernement pourtant censé la protéger. Cette exposition est vérifiable, entre autre, dans une mesure juridique prise l’Etat camerounais, en l’occurrence la loi N°2014/028 du 23 Décembre 2014 portant répression des actes de terrorisme. Cette loi qui est sensée réguler la lutte contre le terrorisme au Cameroun apparait à bien des égards comme un handicap à l’épanouissement des jeunes, à l’expression de leurs droits et libertés fondamentaux. Le fait est que cette loi reste floue et institue de fait l’arbitraire ; elle créée une zone d’incertitude qui conduit à des violations flagrantes des droits des jeunes camerounais. C’est sous cette loi n°2014/028 que l’on assiste impuissant à la récurrence des disparitions forcées, à des allégations d’exécutions extra-judiciaires ou encore aux morts en détention des jeunes camerounais soupçonnés de terrorisme. Les cas de disparition à Magdeme et Double, ceux de Bornori dans le Grand Nord Cameroun illustrent davantage la situation des droits de l’homme dans la lutte contre le terrorisme.
Après avoir répertorié, informé et dénoncé les manquements, les écarts et les effets de la loi N°2014/028 du 23 Décembre 2014, nous continuons de demander l’amendement de cette législation qui, à bien d’égards consacre la négation de l’Etat de droit. Nous affirmons qu’il est urgent que les articles 2, 3 et 11 soient revus de manière profonde. Au demeurant, il est nécessaire de revoir la définition des expressions « terroriste ou acte terroriste » dans un processus consensuel afin de limiter les abus et violations des droits des jeunes camerounais qui, selon le gouvernement, tombent malicieusement sous le coup de cette loi comme nous l’avons observé lors des manifestations et revendications dans les régions du Sud et du Nord –Ouest.
Le 11 février marque incontestablement la fête de la jeunesse au Cameroun. Toutefois, nous tenons à signaler que historiquement cette date a également été choisie en souvenir du referendum du 11 février 1961 qui a vu la partie méridionale opter pour le rattachement au Cameroun francophone.
A l’heure où la crise dans les zones anglophones du pays a atteint le niveau le plus élevé, et au regard de la thématique de la 51ième édition de la fête de la jeunesse, on ne peut qu’être que dubitatif sur le réalisme de ce thème. Comment conforter ou mieux construire une nation exemplaire et surtout « indivisible » si les jeunes camerounais des régions anglophones sont exposés aux violences policières quotidiennes, s’ils sont écartés du système éducatif et de l’espace public ; si les jeunes leaders des organisations de la société civile sont arbitrairement détenus ?
Pire encore, comment parler sereinement d’un Cameroun « un et indivisible », lorsque par une violation du principe constitutionnel d’égalité des citoyens et de non-discrimination, l’on discrimine les jeunes camerounais anglophones, en privant OFFICIELLEMENT ceux-ci de l’accès à internet ? Enfin, Comment peut-on prétendre à une émergence s’il n’y a pas un DIALOGUE NATIONAL VERITABLE sur la situation des jeunes dans les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest ?
Loin de déprécier certaines importantes résolutions qui ont été prises par l’Etat camerounais à l’instar de la création d’une Commission Nationale pour la Promotion du Bilinguisme et du Multiculturalisme pour résoudre certains aspects de la crise, nous sommes convaincus que la mise en œuvre d’un véritable dialogue inclusif, participatif/libre qui réunira autour d’une même table, et abordera toutes les questions concernant le vivre ensemble, les jeunes camerounais leaders des régions anglophones et les instances gouvernementales est plus qu’impérative.
En définitive, NDH-Cameroun et les OSC partenaires de la Société Civile :
• Exigent la libération du Jeune Ivo Fomusoh Fah qui croupit en prison pour un simple problème de SMS
• Demandent la désignation d’un MEDIATEUR dans la crise anglophone ;
• Exigent le rétablissement urgent de l’accès à internet dans les régions Anglophones du Cameroun.
• Considèrent qu’il est impératif, dans un souci d’apaisement et de réconciliation, de libérer les leaders anglophones actuellement détenus, qui, de plus en plus apparaissent comme des interlocuteurs incontournables dans la résolution globale de la crise qui secoue cette partie du Pays.
• Exigent la fin des actes de répression et la levée des interdictions d’activités de la Cameroon Anglophone Civil Society Consortium (CACSC) et de la Southern Cameroons National Council (SCNC),
• Réitèrent la revendication principale concernant l’amendement indispensable de la loi N°2014/028 du 23 Décembre 2014 portant répression des actes de terrorisme
NDH-CAMEROUN entend donc soutenir la jeunesse camerounaise en lui apportant un plus dans le cadre de la défense de ses droits afin de relever les défis de construction d’une Nation exemplaire, indivisible, forte, émergente et davantage dans la lutte contre le terrorisme.
Fait à Yaoundé le 17 février 2017