• Viviane Ondoa Biwole est experte des questions de gouvernance
• Pour elle, le contrat de performance conclu avec le FMI est un outil de trop
• Viviane Ondoua Biwole doute également qu’une circulaire puisse être plus contraignante qu’une loi
Viviane Ondoa Biwole est claire, la signature du contrat de performance « a la même valeur que les résolutions des conseils d’administration ». Elle analyse que le contrat de performance introduit par le ministre des Finances indique que seule la signature formelle entre les parties est la seule nouveauté par rapport aux outils déjà existants. Or, les décisions des conseils d’administration sont des documents juridiques valables. « Donc, au fond, cet outil n’a pas de valeur ajoutée substantielle », conclut-elle.
Cette sortie de l’analyste fait suite à la circulaire signée le 5 juillet dernier par ministre des Finances, Louis Paul Motaze. Dans ce texte, le ministre informe que face aux contreperformances observées, le gouvernement va mettre les entreprises relevant du portefeuille de l’État sous contrat de performance dès le 1er janvier 2023. Le Cameroun se conforme ainsi à un engagement pris dans le cadre de son programme économique et financier triennal avec le Fonds monétaire international, débuté en 2021.
L’experte explique que « mon parti pris est sans équivoque : le contrat de performance est un outil de trop ». Cette prise de position de l’enseignante, experte en question de gouvernance et haut fonctionnaire de l’administration publique, est contenue dans une tribune libre rendue publique ce 13 juillet. Les raisons qui font de cet accord entre le gouvernement et les entreprises et établissements publics (EEP) un outil inopportun tiennent en quatre points.
« Le contrat de performance est un doublon voire une pâle copie du budget programme, déjà utilisé dans l’administration publique depuis 2013 et dans toutes les entités publiques depuis 2015 (…). À défaut d’être difficilement complémentaire, cet outil présente un doublon qui contribuera à entretenir une bureaucratie consommatrice de temps, d’énergie et d’argent et freinant ainsi la réforme dans ce secteur qui a déjà de la peine à produire les résultats escomptés », commence-t-elle.
Ensuite, l’universitaire ne croit pas dans le contexte actuel à l’efficacité du contrat de performance, car ce n’est pas la première fois qu’il est expérimenté. « L’expérience antérieure des contrats de performance, notamment dans le secteur public et parapublic, à l’exemple des contrats plan des entreprises en réhabilitation, n’a pas été un succès retentissant », pense-t-elle.
Viviane Ondoua Biwole doute également qu’une circulaire puisse être plus contraignante qu’une loi. Selon elle, les dispositions des lois de juillet 2017 portant statut général des EEP sont déjà suffisamment contraignantes, mais pas respectées. « Dans ce contexte de défiance juridique, rien ne garantit le succès des contrats de performance ».
Pour le ministre des Finances, « le contrat de performance s’entend comme un accord formel par lequel l’État d’une part et l’Établissement public ou l’Entreprise publique d’autre part, conviennent des objectifs à atteindre par ces derniers sur une période donnée, des moyens nécessaires, ainsi que des modalités d’évaluation des résultats obtenus conformément au plan de développement stratégique ou au plan d’entreprise et aux objectifs des politiques publiques ». Cet accord oblige les entreprises et établissements publics à « atteindre un niveau de performance souhaitable dans leurs secteurs d’activités respectifs et occuper une place centrale dans l’impulsion du programme de développement », justifie le ministre Louis Paul Motaze.