Peter Henry Barlerin demande des efforts dans le respect des droits de l’Homme et revendique le droit à la contradiction relate le quotidien à capitaux privés Mutations.
Mardi 03 juillet en fin de matinée à l’Assemblée nationale, un député, une pointe d’ironie dans le ton ; s’étonne du nombre de personnes invitées et le lieu choisi, pour la célébration de la fête nationale des Etats-Unis.
L’ambassade américaine a en effet choisi l’hôtel Hilton de Yaoundé, et invité pas moins de 300 personnes pour fêter le 242ème anniversaire de l’indépendance des Etats-Unis. Cet élu en est convaincu, le nombre de personnes et le lieu n’ont rien d’anodin : la mission diplomatique américaine veut « prendre le pouls ». « Elle a invité tout ce monde pour savoir comment on a pris ce qu’elle a dit », croit savoir ce député du parti au pouvoir.
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Une allusion aux derniers développements de l’actualité qui ont mis cette chancellerie au-devant de la scène, à savoir, les accusations du gouvernement américain sur des exactions de l’armée dans la guerre contre les sécessionnistes et la longévité du président Paul Biya au pouvoir, entre autres. Des sujets qui ne feront cependant pas partie, du moins explicitement, du speech de l’ambassadeur Peter Henry Barlerin, à l’occasion de l’« Independence Day ».
De fait, mardi dernier à Yaoundé, au milieu des invités qui se sont déplacés nombreux malgré la pluie qui a précipité la tombée de la nuit, l’on pouvait noter la présence de membres du gouvernement : les ministres des Finances ; de l’Economie ; du Travail et de la sécurité sociale ; de l’Agriculture, de la Communication, etc.
Mais également, le secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Santé publique, le ministre délégué aux Transports ou encore des personnalités telles le président du Conseil constitutionnel. C’est le ministre délégué auprès du ministre des Relations extérieures, chargé des Relations avec le monde islamique, Adoum Gargoum, qui représentait le gouvernement.
Gêne
Après les honneurs au drapeau par un détachement de Marines de l’ambassade, Peter Henry Barlerin, très décontracté et le ton souvent badin, prononce son discours de circonstance. Le diplomate (qui a serré la main à une longue file de convives avant le début de la cérémonie), revisite la coopération entre les deux pays, célèbre le volontariat américain à travers le Peace Corps.
Il va mettre un point d’honneur à exprimer ses « vives félicitations à trois étudiants camerounais admis dans des académies militaires aux Etats-Unis ». Tout comme il va relever la coopération dans la lutte contre la propagation du Vih/Sida ou encore le paludisme. « Nos efforts conjoints renforcent les systèmes de santé au Cameroun et améliorent la sécurité sanitaire au niveau mondial », va-t-il déclarer.
Plus loin, Peter Henry Barlerin évoque la coopération sur le plan militaire puis, parle de la crise sociopolitique dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Sur ce sujet, le représentant du gouvernement américain prend la langue de « Rochambeau et de Lafayette », et commence : « Nous reconnaissons tous l’importance du respect des droits de l’Homme notamment parce que cela renforce la confiance des citoyens d’une nation. Il est bon, de voir une ouverture au Cameroun en ce qui concerne les organisations nationales et internationales œuvrant dans le domaine des droits de l’Homme ».
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Mais lorsque le diplomate déclare par la suite, « nous ne sommes pas obligés de nous mettre d’accord sur tout pour discuter autour d’une table », et qu’il lève la tête et ajoute un « n’est-ce pas ? » qui n’apparait pas dans le discours ; c’est la gêne dans les rangs des officiels camerounais.
Certains ministres répriment une grimace, d’autres plongent le regard dans leurs chaussures. Et une fois le discours du chef de mission terminé, des ministres vont quitter la salle, l’un après l’autre. Fin mai dernier, l’ambassadeur des Etats-Unis, après une entrevue officielle avec le président de la République, Paul Biya, rendait public un communiqué qui fait l’économie de cette audience.
Le diplomate y déplore des exactions dont se seraient rendus coupables des militaires camerounais dans la guerre contre des groupes armés séparatistes ; de même qu’il suggère au chef de l’Etat, de songer à quitter le fauteuil qu’il occupe depuis 36 ans. Une sortie qui a agacé le pouvoir de Yaoundé qui, après une mise au point du ministre de la Communication qui rejetait les accusations américaines contre l’armée ; a convoqué l’ambassadeur américain au ministère des Relations extérieures pour lui faire part de la désapprobation du gouvernement quant à ces prises de positions qualifiées « d’ingérence » dans les affaires internes du Cameroun.