Le directeur de la publication d’Afrik Racines, Pierre-Marie Pone, a commis une tribune. Dedans, il dit tout haut : « À chaque peuple sa tradition ! ».
Quel cirque ! Ce pays, où les traditions se bousculent comme des enfants dans une cour de récréation, vient, une fois de trop, de se plier en quatre pour honorer, en l’espace de quelques jours, d’autres dont on se demande bien ce qu'elles viennent faire chez nous. L'Aïd el-Fitr, Pessa'h, Pâque, Pâques... On dirait le tirage au sort d'un loto cosmique où chacun espère gagner un jour férié, chômé et payé. De là à penser que le calendrier religieux camerounais est un buffet à volonté où chacun vient piocher à sa guise, il n’y a qu’un pas que certains ont déjà franchi. Et, ma foi, on ne va pas s'en plaindre, n'est-ce pas ? Le travail, c'est bien, mais le farniente, c'est sacré, surtout quand il est sponsorisé par toutes ces croyances venues d'ailleurs.
Mais, attendez, je me perds ! L'Aïd, c'est la fin du ramadan, Pessa'h, c'est la sortie d'Égypte, Pâques, une fête chrétienne et une fête culturelle commémorant la résurrection de Jésus d'entre les morts, le troisième jour de son enterrement, après sa crucifixion par les Romains au Golgotha (lieu des crânes). Et nous, Camerounais, dans tout ça ? On est censé commémorer quoi exactement ? La sortie de la brousse ? La résurrection du manioc ?
Et puis, il y a cette histoire de tourisme religieux, une industrie florissante qui enrichit Jérusalem, Rome, Lourdes et La Mecque. Des milliers de pèlerins défilent, prient, achètent des souvenirs made in China et laissent des montagnes de billets derrière eux. Pendant ce temps, l'Afrique, notre belle Afrique, reste désespérément vide de lieux saints. On dirait que le Dieu nous a oubliés, ou alors, qu'il a décidé de faire de nous des athées sans s’en rendre compte.
Tiens ! En parlant de La Mecque, saviez-vous qu'il y a des températures à vous faire frire un œuf sur le bitume ? Plus de 50 degrés, mes amis ! On parle de plus de 1 300 morts en 2024 ! Mais, attention, ne vous y trompez pas ! Mourir en terre sainte, c'est un privilège, une bénédiction d'Allah ! Alors, vous voyez que tout est bien qui finit bien, même quand ça finit mal. C'est beau, la foi, non ? Surtout quand elle vous envoie ad patres avec le sourire.
Et le clou du spectacle, c'est le prix du pèlerinage. Pour le Hadj en 2025, les pèlerins camerounais, qui pour la plupart tirent le diable par la queue au quotidien, ont déboursé chacun la rondelette somme de 3 262 620 FCFA, dans un pays pauvre très endetté. Multipliez par 5000 pèlerins et vous obtenez une somme astronomique de 16 313 100 000 FCFA, qui ferait pâlir d'envie n'importe quel ministre des Finances. Imaginez le nombre de forages, de salles de classe… qu'on pourrait construire avec ça ! Et pendant ce temps, l'Arabie Saoudite se frotte les mains. Avant la Covid-19, le Hajj rapportait entre 10 à 15 milliards de dollars chaque année aux caisses de l'État saoudien.
Alors, la prochaine fois que vous croiserez un fidèle en route pour ces cieux étrangers, n'oubliez pas de vous demander ce que nous, Africains, avons à cirer dans tous ces labyrinthes religieux. La question mérite d'être posée, dans une Afrique qui se demande encore où se trouve son lieu saint ! Non ?
Béni soit le jour où l'on ne comprend plus rien ! Mais n'oublions pas de rire un peu de tout cela. Après tout, si Dieu a un sens de l'humour (et j'en suis sûr), il doit bien se moquer de nous, en voyant notre quête désespérée d'un lieu saint où se cache le vrai Dieu. Peut-être qu’un jour, nous aurons notre propre site sacré… un grand marché où l'on vendra des œufs en chocolat et des kebabs halal ! Qui sait ? À chaque peuple sa tradition !