Le président de la transition gabonaise, Brice Clotaire Oligui Nguema, a entamé un véritable marathon diplomatique afin de tenter de rassurer les partenaires du pays sur la bonne conduite de la transition. Une posture qui a tranché à la tribune de l’ONU avec celle, très incisive, du Mali. Selon un haut fonctionnaire de l’Union africaine en déplacement à New York pour la 79e Assemblée générale des Nations unies, fin septembre, « Le Gabon est clair sur ses objectifs de retour à l’ordre constitutionnel », rapporte Jeune Afrique.
À l’en croire, la trajectoire empruntée par Libreville pourrait même valoir au Gabon une levée de la suspension des instances de l’organisation panafricaine, décidée à la suite du coup d’État du 30 août 2023. Mais pour cela, de nouveaux gages sont attendus de la part de Brice Clotaire Oligui Nguema. Le président de la transition gabonaise, Brice Clotaire Oligui Nguema, aux Nations unies le 26 septembre 2024. © Présidence de la République gabonaise.
Le président de la transition gabonaise, Brice Clotaire Oligui Nguema. © Présidence du Gabon. À commencer par l’adoption d’une nouvelle constitution d’ici à la fin de l’année. En la matière, les premiers jalons ont été posés par les autorités gabonaises. Le 22 septembre, la représentation parlementaire de la transition clôturait une assemblée constituante visant à examiner le projet de nouvelle loi fondamentale, indique Jeune Afrique.
Quatre jours plus tard, Brice Clotaire Oligui Nguema a déroulé, à la tribune des Nations unies, les objectifs de la transition. Pour sa première Assemblée générale, il s’est voulu rassurant. Quelques jours après le premier anniversaire du putsch, le tombeur d’Ali Bongo Ondimba a égrené les « promesses tenues » par le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI). Ainsi a-t-il salué la « mise en place des institutions de la transition, la libération des prisonniers d’opinion, l’inclusivité permanente et la tenue d’un dialogue nationale inclusif », rapporte Jeune Afrique.
Le chef de l’État gabonais, qui avait troqué le treillis militaire pour un costume bleu nuit, a promis « dans les prochains mois » la tenue d’un référendum, l’adoption du code électoral et la révision du fichier électoral, en vue d’un « retour progressif à l’ordre constitutionnel ». Jugé « rassurant » par plusieurs diplomates africains interrogés par Jeune Afrique, son discours a été d’autant plus remarqué que certains y opposent le style, bien plus incisif, des juntes sahéliennes. À la tribune, le Mali, notamment, n’a pas manqué de solder ses comptes avec certains pays jugés hostiles.
Le président de la transition du Gabon, Brice Clotaire Oligui Nguema, reçu au palais de l’Élysée par le chef de l’État français, Emmanuel Macron, le 31 mai 2024. © Présidence de la République du Gabon. Là où Brice Clotaire Oligui Nguema a tenu à « remercier l’ensemble des partenaires, les pays amis et bailleurs de fonds, nationaux et internationaux qui accompagnent [le Gabon] dans ce processus de transition », le colonel Abdoulaye Maïga, porte-parole du gouvernement malien, a réitéré les accusations de « soutien au terrorisme international » adressées à l’Ukraine, rapporte Jeune Afrique.
Il n’a pas non plus épargné le représentant permanent de l’Algérie à l’ONU, qui, quelques semaines plus tôt, dénonçait les frappes de drones ayant ciblé des civils à Tinzawaten, à la frontière entre les deux pays. « En plus d’offrir le gîte et le couvert, certainement avec de succulents plats de chakchouka et de chorba à des terroristes et des renégats en débandades, le rôle [du représentant permanent algérien] d’estafette désorientée ne contribue guère à la promotion des relations de bon voisinage », vilipendait le ministre d’État dans son allocution, selon Jeune Afrique.
Acclamé par une délégation de supporters maliens dont les vivats résonnaient dans le hall du siège de l’ONU, où l’ambiance est d’ordinaire plus protocolaire, le discours d’Abdoulaye Maïga a été perçu comme un signe « de la stratégie d’emmurement du Mali », déplorent certains diplomates, rapporte Jeune Afrique.
Brice Clotaire Oligui Nguema, lui, a poursuivi son opération reconquête à Washington, où il était convié par l’administration de Joe Biden. Au menu des discussions, le retour à l’ordre constitutionnel au Gabon et la levée de l’exclusion du pays de l’African Growth and Opportunity Act (Agoa), qui facilite les exportations des pays africains vers les États-Unis, indique Jeune Afrique.
Troisième étape de ce marathon diplomatique : Villers-Cotterêts en France, où se tient le sommet de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) ces 4 et 5 octobre. Bien que réduite, la pléthorique délégation gabonaise dépêchée à l’ONU devrait de nouveau tenter de convaincre les partenaires africains et internationaux, rapporte Jeune Afrique.
Il s’agit du troisième séjour français du président de la transition gabonaise. En juillet, Brice Clotaire Oligui Nguema avait fait le déplacement pour l’ouverture des Jeux olympiques de Paris, à peine deux mois après sa participation à Paris au Forum économique Gabon-France. Venu finaliser plusieurs accords entre les deux pays, le général de brigade s’était donné pour objectif de rassurer les investisseurs et les partenaires politiques du pays, indique Jeune Afrique.
Une fois qu’il sera de retour à Libreville, le président de la transition est attendu sur plusieurs annonces, avec, en tête, la date du référendum constitutionnel, dernière étape importante avant l’organisation d’une élection présidentielle. S’il ne s’est pas encore déclaré, Brice Clotaire Oligui Nguema a récemment mené une tournée républicaine à travers les neuf provinces du Gabon. Il pourrait donc espérer remiser définitivement le costume de chef d’État putschiste pour endosser celui de président élu, conclut Jeune Afrique.