La ville de Nzérékoré, à près de 900 kilomètres de la capitale Conakry, est presque déserte ce lundi, au lendemain d’un incident qui a fait 56 morts selon les autorités, lors de la finale d’un championnat portant le nom du président de la transition.
Portails de l’hôpital régional de Nzérékoré barricadés, difficile d’y entrer ce lundi matin. Paul Sakouvogi, un journaliste exerçant dans la ville, a déclaré à la BBC que l'Internet avait été coupé dans la région.
Il explique également que la police a pris des mesures pour restreindre l'accès à l'hôpital régional où sont soignés les blessés.
"J'ai vu six pick-ups de la police positionnés devant les trois entrées de l'hôpital. Ils n'autorisaient que le personnel médical à accéder à l'hôpital, tandis que les autres étaient priés de repartir comme ils étaient venus".
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Les écoles sont fermées, le grand marché et tous les commerces également fermés. Dans l’ensemble, la ville est calme et porte le deuil. Au téléphone, Enock Loua, oncle d’une jeune fille qui a rendu l’âme, a expliqué que la famille était inconsolable.
Hôpital de Nzérékoré bondé
Jusqu’à ce matin, des familles de victimes convergent vers l’hôpital régional, devenu l’attraction de la ville depuis hier soir.Mamoudou Sadan Keita, responsable régional de Dabo Media, un groupe de média local, a été parmi les premiers à s’y rendre après les événements, pour prendre des nouvelles d’une de ses collaboratrices.
« Les médecins étaient dépassés, ils ne savaient pas quoi faire, face aux différents malades qui affluaient. Figurez-vous, de 18h jusqu’à 21h, les ambulances ne faisaient qu’amener des corps et les blessés », confie-t-il à la BBC.
Il ajoute que les familles et proches de potentielles victimes ont afflué au même moment, rendant la prise en charge très difficile, ce qui l’a poussé à déplacer sa collègue dans une clinique privée.
Madame Maikan Fofana tentait de sortir du stade, lorsqu’elle a été prise dans la bousculade. « Elle est tombée, des gens l’ont piétinée, puisqu’elle est une figure connue, un jeune l’a secourue », explique M. Sadan Keita.
Il déclare que le stade de Nzérékoré « n’a qu’un portail principal et une petite porte », deux issues vers lesquelles la foule s’est massivement dirigée.
Parmi les victimes, Jean Alphonse Traoré. Il a eu la vie sauve parce qu’il a pu escalader la barrière. Après avoir aidé d’autres personnes à escalader ce mur du stade, il a pu le faire à son tour, et s’en est tiré avec quelques blessures sur les bras, selon ce qu’il a confié à la BBC.
Une chance que n’a pas eu sa voisine, Aline Olivier Loua, une jeune élève de 11 -ème année. M. Traoré l’a retrouvée à l’hopital régional de Nzérékoré.
« Elle est tombée au stade, mais lorsque nous l’avons retrouvée à l’hôpital, sa tête présentait un large creux, comme si c’était une balle qu’elle avait reçue », explique-t- il.
Pour l’instant, la BBC n’a pas pu confirmer si des balles réelles ont été tirées, le communiqué du gouvernement publié ce matin n’en parle pas non plus.
Ce qui s’est passé au stade de Nzérékoré
Selon les témoins sur place, tout se déroulait normalement dans ce match de la finale du championnat "Mamadi Doumbouya", organisé par "l’Alliance des jeunes de la forêt", un groupe de soutien au général Doumbouya, qui a renversé en 2021, le président Alpha Condé.Ceci jusqu’à ce qu’un pénalty soit sifflé contre l’équipe locale, vers la fin de la rencontre.
C’est alors qu’une rixe éclate entre les joueurs, ce qui a « entrainé des jets de pierres provoquant des bousculades mortelles », explique un communiqué du gouvernement, publié ce lundi en fin de matinée, par le premier ministre Amadou Oury Ba.
Il précise que les services médicaux ont fait état de 56 morts et de plusieurs blessés, sans en déterminer le nombre.
M. Ba ajoute que le gouvernement a ouvert une enquête pour situer les « responsabilités de ce tragique évènement » et annonce que « les pouvoirs publics s’engagent à accompagner les familles endeuillées, y compris un accompagnement psycho-médical aux blessés ».
Violences repétées dans les stades en guinée
Les scènes de violences sont assez récurrentes dans les stades en Guinée, notamment lors du championnat de première division, la presse locale en fait régulièrement cas dans ses colonnes.En juin dernier, le problème a suscité l’inquiétude du président de la Ligue guinéenne de football professionnel, Lucien Bendou Guilao, qui a reconnu que "la source du problème est complexe".
"Il est difficile d’éradiquer complètement la violence dans les stades, mais il est important que nous mettions tous les moyens disponibles à notre niveau pour réduire au maximum les incidents. Il est vrai que la manière dont les stades sont construits peut jouer un rôle dans la canalisation de la violence", avait-il expliqué dans la presse guinéenne.
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