BBC Afrique of Thursday, 1 August 2024

Source: BBC

Massacre du 28 septembre en Guinée : réactions partagées entre organisations de défense des droits de l’homme et avocats de Dadis Camara après le verdict du procès

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Soulagement, déception, contestation, inquiétude, les réactions sont partagées au lendemain du procès de près de deux ans qui a vu la condamnation du chef de la junte, Moussa Dadis Camara et 7 de ses coaccusés.

« Aujourd’hui nous sommes très contentes à la suite au verdict rendu », se réjouit une victime interrogée par la BBC au sortir de l’audience.

Pour elle, l’heure de la réparation est venue. « Puisque ce qu’on nous a fait est très choquant. Nous espérons que les indemnités fixées par le président du tribunal seront payées. » Poursuit-elle.

Cette autre victime ne cache pas sa joie, après une longue période d’attente. « Depuis des années, nous attendons que justice soit faite. En ce qui concerne le dédommagement des victimes, j’ai des inquiétudes. »

Elles sont nombreuses les victimes de violences corporelles ou sexuelles qui n’ont pas osé témoigner à la barre lors du procès.


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Pendant la lecture des procès-verbaux, avant de rendre son verdict, le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara a révélé des cas qui ont conduit à des divorces ou à la stigmatisation des victimes dans leur propre entourage et dans la société.

Présents dans la salle d’audience au moment du délibéré, des militants des droits de l’homme confient leur soulagement après la décision rendue, mais se disent également heureux d’avoir pu « convaincre » le tribunal sur une « nécessité de requalification des faits en crimes contre l’humanité ».

Le secrétaire général de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) Maitre Drissa Traoré estime que « ce verdict est une victoire pour les femmes et les hommes qui se battent depuis près de 15 ans pour que justice soit rendue. »

Le président de la FIDH ajoute que la décision qui a été rendue est conforme à la loi, malgré la douleur des victimes.

De son côté, le président de la ligue pour les droits et la démocratie en Afrique, Mamady Kaba, a confié à la presse guinéenne, qu’il se réjouissait de la sérénité du procès et la clémence dont la justice a fait preuve.

Pour avoir perdu son fils lors de la manifestation politique de l’opposition guinéenne le 28 septembre 2009, au stade du même nom à Conakry, Asmaou Diallo, s’est engagée dans la préparation du procès.

Présidente de l’Association des Victimes, Parents et Amis du massacre du 28 septembre 2009, elle œuvre depuis une dizaine d’années avec ses partenaires dans la prise en charge médicale des femmes violées.

Elle a milité pour « l’organisation d’un procès juste et équitable censé aboutir à la condamnation des présumés commanditaires du massacre ».

Pour elle, le verdict prononcé le 31 juillet est l’aboutissement d’un combat de 15 ans. « Celui de la recherche de la vérité et de la justice pour les victimes des événements tragiques du 28 septembre 2009 », a-t-elle confié à la presse locale.

Dadis Camara « n’a pas de patrimoine » pour indemniser les victimes

Ce jeudi, le collectif des avocats du président Moussa Dadis Camara a rendu public un communiqué dans lequel il se dit surpris de la condamnation de leur client pour crimes contre l'humanité sur la base de la responsabilité du supérieur hiérarchique « en violation des règles juridiques les plus élémentaires qui gouvernent tout procès criminel, notamment celles relatives aux droits de la défense. »

Joint par la BBC, le principal avocat de l’ex chef de la junte guinéenne, trouve la décision du tribunal illégale, injuste et incompréhensible.

Me Jocamy Haba, déclare qu’il sera fait appel de la décision du tribunal auprès de la Cour d’Appel.

Sur la question de la condamnation de son client au paiement des indemnités aux victimes, Me Haba est sceptique.

« Le président Dadis n’a pas un patrimoine qui lui permet de payer le montant fixé. Les parties civiles auraient dû se battre pour que l’Etat soit condamné. C’est l’Etat qui aurait dû payer ces indemnités. Cette décision a été dictée au tribunal. C’est une journée noire pour la justice guinéenne. »

Me Alpha Amadou DS Bah, coordonnateur du pool d’avocat des parties civiles ne voit pas les choses de la même manière que l’avocat du capitaine Dadis.

« Nous sommes soulagés et pensons que la décision a été rendue conformément à la loi. Un tel verdict doit être dissuasif. Nous pensons, dès lors qu’un tel verdict a été rendu, cela doit servir de leçon à ceux qui ont des parcelles de pouvoir. Puisqu’au moment des faits, Moussa Dadis Camara et ses acolytes, ne pouvaient imaginer qu’un jour, ils allaient répondre de leurs actes. Dès lors que ce jugement a été rendu, cela devrait sonner le glas de l’impunité dans notre pays et servir de leçons à ceux qui exercent le pouvoir ou qui sont amenés à l’exercer », se réjouit l’avocat.

Un signal fort selon la CPI

La Cour Pénale Internationale (CPI), spécialisé dans le jugement des faits susceptibles de constituer des crimes contre l’humanité s’est réjouie de l’aboutissement de la procédure.

Dans un communiqué rendu public ce 1er août, le bureau du procureur a estimé que ce verdict marquait un tournant dans l’établissement de la vérité sur les événements du 28 septembre 2009 et dans la reddition des comptes par ceux qui portent la plus grande responsabilité dans les atrocités qui ont été commises.

En le rendant, « les juges guinéens ont envoyé un signal clair selon lequel personne n'est au-dessus des lois et ceux qui commettent des crimes visés par le Statut de Rome feront face à la justice », déclare le bureau du procureur de la CPI dans son communiqué.

Il dit espérer d'autres actions concernant d'autres procédures en cours en relation avec les événements du 28 septembre, et promet de continuer à suivre de près les événements qui se déroulent en Guinée.


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