C’est le sujet qui fâche certains observateurs par rapport à l’endettement du Cameroun. On emprunte des fonds auprès des partenaires financiers internationaux, mais ces ressources financières sont peu utilisées. Selon les chiffres publiés au mois de mars 2017 par la Caisse autonome d’Amortissement (CAA), le gestionnaire de la dette publique du Cameroun, la masse des Soldes engagés et non décaissés (SEND’S) était de 5 000 milliards de FCFA sur une enveloppe globale de la dette estimée à 5 464 milliards de FCFA. En clair, ce ne sont que 464 milliards de FCFA qui ont véritablement été utilisés pendant cette période de référence. Mais pendant ce temps, le Cameroun qui doit assurer le service de la dette paye les intérêts pour les autres 5 000 milliards de FCFA qui ne sont pour autant pas utilisés. Cette accumulation des SEND’S est assez souvent justifiée par les pouvoirs publics comme émanant de la non maturité d’un certain nombre de projets engagés au Cameroun. Une situation qui, si elle n’est directement pas liée à l’incompétence des acteurs chargés de monter ces projets, reste peu tributaire d’un certain empressement à s’endetter.
Mais une chose reste curieuse, malgré les efforts mis en œuvre par les pouvoirs publics, notamment le ministère en charge de l’Economie, leur impact reste négligeable dans l’absorption par le Cameroun des fonds issus de la dette. Ce qui laisse croire que d’autres entraves persistent, c’est notamment le cas de la mise à disposition par le Cameroun des fonds de contrepartie. Dans la plupart des projets, ces fonds de contrepartie représentent très souvent 15% du montant global du projet. Et, le Cameroun peine toujours à débloquer ces fonds qui pourtant servent très souvent au paiement des indemnisations des populations impactées par l’emprise du projet. Par conséquent, l’on assiste à la mise en œuvre des projets perturbée par des grèves des populations. Les cas des projets de construction de l’autoroute Yaoundé- Douala, notamment sa première phase, tout comme celui de la route Sangmélima- Ouesso, devant relier le Cameroun au Congo, pour ne citer que quelques cas, qui ont pris sérieusement du retard du fait des revendications des riverains liées aux indemnisations.
Quand ce ne sont pas les fonds de contrepartie qui font problème, ce sont les conditionnalités de déblocage des fonds issus de la dette de certains partenaires financiers qui retardent des projets. La France et la Banque mondiale sont très citées comme ces partenaires financiers du Cameroun dont les conditionnalités de déblocage des fonds ne sont pas les plus aisées. Pour la Banque mondiale, on évalue à seulement environ 20%, le taux de déblocage des fonds empruntés par le Cameroun auprès de cette institution financière. Pour le cas de la France par exemple, une astuce semble avoir été trouvée pour augmenter sensiblement le taux d’absorption des fonds issus du Contrat de désendettement Développement (C2D), ce sont les allocations budgétaires. Une partie de ces fonds est désormais introduite dans le budget du Cameroun pour une utilisation très précise. La dette en elle-même ne serait pas un problème pour le Cameroun, c’est plutôt son utilisation.