Infos Business of Tuesday, 9 November 2021

Source: La Voix du Centre

Cameroun - Contentieux : Somdiaa dans le box des accusés

En cause, les activités de Sosucam, sa filiale camerounaise En cause, les activités de Sosucam, sa filiale camerounaise

La multinationale française fait actuellement l’objet d’une plainte, déposée par des associations camerounaises à l’Organisation de la coopération et de développement économique (OCDE). En cause, les activités de Sosucam, sa filiale camerounaise.

La Société sucrière du Cameroun (Sosucam) est sur le banc des accusés à l’Organisation de la coopération et de développement économique (OCDE). S’il est courant de voir des multinationales appelées dans ce box, c’est bien la première fois que des Camerounais-sont du côté des plaignants.

Au commencement de cette occurrence il y’a la plainte d’un collectif d’associations camerounaises composé du Centre d’actions pour la vie et la terre (CAVT) et de 14 comités riverains de veille (CRV) de la zone sucrière, exploitée par Sosucam dans les villes de Mbandjock et de Nkoteng (département dé la Haute-Sanaga). Comme le veut l’usage, une plainte contre une multinationale d’un pays membre de l’OCDE est déposée au Point de contact .national (PCN) du pays concerné. C’est donc au secrétariat du PCN français que la saisine contre la Société d’organisation, de management et de développement des

industries alimentaires et agricoles (Somdiaa), propriétaire de Sosucam à 72 %, a atterri pa[ courrier le 23 novembre 2020. Le PCN a accusé réception du dossier le 25 novembre 2020 en transmettant au plaignant des informations sur la procédure.

Nuisances sonores

Méfiantes, les parties plaignantes ont choisi jusqu’ici de garder le silence sur cette affaire. Elles attendent le dénouement final, pour organiser une campagne de communication. Toutefois, dans un communiqué rendu public par le PCN le 12 mars dernier, on apprend que la saisine contre Somdiaa « évoque des allégations d’impacts négatifs sur l’environnement et les populations riveraines des plantations de cannes à sucre et des usines de transformations de la Sosucam ».

Le même communiqué indique que les impacts relevés par les 14 CRV et le CAVT « consisteraient en des puissances sonores et olfactives, des impacts sociaux (destructions de récoltes, détérioration des tôles, etc.) et sanitaires (santé), des perturbations et diminution de la faune, la pollution de l’air et des eaux. La saisine évoque des allégations de conflits entre les riverains et l’entreprise sur plusieurs sujets (emploi local, gestion des espaces, etc.) ».

Offre ses bons offices

En clair, il est reproché à la filiale camerounaise de Somdiaa une gestion environnementale et sociale à la petite semaine. Les plaignants n’hésitent non plus à contester la politique RSE (Responsabilité

sociale des entreprises) de Sosucam. Autant de faits qui violent les principes directeurs édictés par l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales. C’est bien pourquoi le PCN a fait savoir que « la saisine est suffisamment précise et suffisamment documentée pour qu’il débute son examen et offre ses bons offices aux parties ».

Quelques confidences proches de ce dossier laissent entendre que le PCN a demandé aux 14 CRV et au CAVT d’ajouter une plainte contre Copagef, le groupe qui réunit depuis 2010 les multinationales françaises Somdiaa et Castle. L’explication est double : d’abord à cause de la gravité des accusations, ensuite parce que les populations riveraines centrafricaines ont, elles-aussi, déposé une plainte contre Somdiaa et Copagef.

Le 4 janvier dernier, Somdiaaafaitsavoirau PCN quelle serait l’interlocuteur principal dans cette affaire qui l’oppose aux riverains de Nkoteng et de Mbandjock. La multinationale détenue par la famille Vilgrain est tout de suite passé de la parole aux actes. « Somdiaa s’est montrée proactive et attachée au dialogue avec le PCN dès la réception du dossier et au cours de l’évaluation initiale du dossier. En effet, le 4 janvier, Somdiaa a fait savoir au PCN son souhait d’accéder au dossier et son ouverture à dialoguer pour en comprendre la teneur ».

Caractère spécifique

A la suite de cette correspondance du 4 janvier, Somdiaa est remonté au créneau une semaine plus tard. « En réponse aux allégations formulées par les organisations plaignantes, Somdiaa a par courriers des

11 et 29 janvier fournit au PCN français des premiers éléments de réponse puis lui a ensuite adressé le 4 février un dossier détaillé dans lequel elle conteste les éléments de la saisine », comme on peut le lire dans le communiqué du PCN du 12 mars dernier.

Après avoir pris connaissance de la saisine, Somdiaa a fait valoir ses éléments de réponse. La multinationale émet une série de réserves. « Vis-à-vis du respect des critères de bonne foi et du caractère spécifique des questions soulevées, celles-ci devraient être étayées d’éléments permettant d’en attester la véracité.

Une première revue non exhaustive de ces allégations a permis d’évaluer que 76 % des allégations ne seraient pas fondées et que les autres feraient d’ores et déjà l’objet d’une prise en charge par la Sosucam soit de façon avancée (17 %) soit en cours de mise en œuvre (7 %).

Cette revue détaille pour chaque item évoqué par la saisine quelle serait la matérialité de l’impact, son analyse et ses conséquences ainsi que les nombreuses mesures prises par la Sosucam pour y répondre », écrit les responsables de Sosucam à l’endroit du PCN.

Procès-verbaux

En face’, cet^e explication de Somdiaa fait pester. Sous te couvert de l’anonymat, quelques riverains proches de ce dossier indiquent qu’une plateforme

d’échange et de dialogue entre les CRV et Sosucam a été créée en octobre 2Q14. Des rencontres se tenaient tous les trois mois entre les deux parties. « Il y a eu un ensemble de résolutions et d’engagements qui ont été pris assortis de procès-verbaux. Mais Sosucam n’a jamais rien respecté », s’énerve un riverain. Qui ajoute, avec le même ton : « le cahier de charges de Sosucam était philosophique et inopérable ».

En septembre 2018,’ cette plateforme d’échange et de dialogue arrête d’exister. C’est à cette époque que les 14 CRV décident de s’allier au CAVT, une excroissance de l’ONG Justice et paix de l’archidiocèse de Yaoundé. La suite- c’est la plainte déposée à l’OCDE pour forcer Sosucam à respecter ses engagements.

Les CRV peuvent donc se frotter les mains. Car si- le groupe Somdiaa a apporté de nombreux éléments de réponse au cours de l’évaluation initiale du PCN, il n’a pas pu empêcher au dossier *de prospérer. « Conformément à *-son règlement intérieur, le PCN entame maintenant la phase de bons offices et d’examen de la saisine. Ses bons offices débuteront par des entretiens séparés des parties. Le PCN pourra proposer aux parties d’entrer en médiation. Il publiera un communiqué final ou un rapport à l’issue de la procédure ».