Infos Business of Thursday, 4 May 2023

Source: Le Jour du 02-5-2023

Cameroun: Paul Biya veut racheter Eneo

Le Jour a voulu en savoir plus sur ces négociations en cours Le Jour a voulu en savoir plus sur ces négociations en cours

Plus que jamais sur le départ, le Fonds d’investissement britannique, actionnaire majoritaire, est rentré en négociations avec le gouvernement pour se désengager de la compagnie en charge de la distribution d’énergie électrique dans le pays.

Difficile de croire que l’on entend simplement jouer l’orchestre d’une entreprise. Des virtuoses tiennent les cordes et les sonorités qui s’échappent de cet espace vert d’Eneo Koumassi à Douala ne trompent point. L’heure est à la fête ! La 137e édition de la fête Internationale du travail, célébrée au Cameroun sur le thème « résilience et travail décent ».

Comme un pied de nez à ceux qui n’ont eu de cesse de le tancer, le distributeur d’énergie électrique peut enfin souffler s’amuser. Les délestages et autres coupures intempestives ont drastiquement baissé depuis quelques semaines et des consommateurs abusés prennent désormais en grippe certaines multinationales de la téléphonie mobile accusées de spoliation géante sur le territoire national. Eneo peut donc souffler mais pour combien de temps ? En interne, le climat social n’est pas des plus sereins malgré des avancées notables entérinées par la convention de novembre 2022 qui octroie plusieurs avantages aux travailleurs d’Eneo. « La fête du travail est le moment indiqué pour les partenaires sociaux, de passer en revue la situation de l’entreprise et le climat social », fait justement remarquer Alexis Makembe, le représentant du personnel, qui s’est à l’occasion autorisé un discours particulièrement musclé. Dès l’entame de son propos, l’orateur a mis sur la table un sujet brulant qui pourrait grandement influencer le futur de l’entreprise : « au moment où nous rentrons dans les festivités, les travailleurs et travailleuses de notre entreprise voudraient être informés de l’avenir de l’entreprise à la suite des informations relatives aux négociations qui seraient en cours entre l’Etat du Cameroun et l’actionnaire stratégique et majoritaire qui est Actis, ceci en vue d’un rachat des parts qu’il détient dans le capital de l’entreprise ENEO ».

Le rachat ? Une affaire d’actionnaires

Impossible de faire plus clair. Le sieur Makembe a quasiment officialisé une nouvelle qui couvait : l’Etat du Cameroun veut racheter Eneo. Et pourquoi donc ? Dubitatif sur les réels motifs de ce deal en négociations, M. Makembe a mis les pieds dans les plats : « ces mêmes travailleurs qui détiennent 5 pour cent des parts dans le capital de notre Eneo national, aimeraient comprendre les motivations de ce revirement à 190e soit par l’Etat du Cameroun ou l’actionnaire majoritaire. Ce changement de paradigme n’est-il pas le résultat du non-respect des engagements pris par l’un des acteurs ? Ou alors s’agit-il des contre-performances de l’entreprise ? ». Dubitatif, car comme l’a rappelé le représentant du personnel, « les travailleurs souhaitent vivement que leurs représentants soient pleinement impliqués dans ce processus tout en espérant que leurs intérêts seront préservés et que lesdites négociations trouveront un dénouement rapide et heureux pour les parties, ainsi qu’un retour rapide à la sérénité ». Une garantie que le Directeur général n’est pas en mesure de lui fournir en l’état actuel des choses. Répondant aux préoccupations exprimées par le porte-voix des travailleurs, le patron de Eneo a d’abord confirmé les négociations en cours avant de préciser le modus operendi. « Vous avez évoqué les négociations en cours au sujet des parts de l’actionnaire majoritaire Actis et du rôle que des Travailleurs. Comme je l’ai déjà dit, c’est une affaire qui se joue au niveau de l’actionnariat. Quelles qu’en soient la forme et la tendance, cela ne change rien dans la gestion et les opérations actuelles de l’entreprise. Si jamais cette transaction est conclue, la participation des représentants des Travailleurs sera effective, et cela fera l’objet d’une communication approprié », a déclaré Patrick Eeckelers.

La CNPS à la manœuvre

Le Jour a voulu en savoir plus sur ces négociations en cours. Ainsi, nous avons appris qu’elles se déroulent à la présidence de la République (la dette du gouvernement envers Actis est aussi évoquée) et que c’est la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS), l’une des entreprises d’Etat les plus performances, qui devrait financer l’opération et les modalités de reprise. Le ministre des finances, Louis Paul Motaze, serait aux manettes pour faire aboutir le projet. « Si on assiste à la gestion en vigueur dans plusieurs sociétés d’Etat au Cameroun il est évident que Eneo va régresser. Dans ce sens la présence de la CNPS qui est un modèle de gestion publique est rassurant. Mais le vrai problème est de mobiliser les financements nécessaires pour garantir le futur énergétique du Cameroun », commente un cadre de Eneo. Pour Actis, propriétaire de 51% du capital de l’électricien camerounais, il s’agirait là de l’aboutissement d’un processus entamé depuis plus de 04 ans. Fidèle à sa politique d’investissement, le Fonds britannique n’a pas vocation à faire de vieux os au Cameroun. Son objectif était de redresser financièrement l’entreprise pour ensuite la céder au plus offrant. Et c’est le Cameroun qui est aujourd’hui en pole position. On peut fêter ça