Face au recul de la monnaie commune européenne, les effets se font ressentir sur le franc CFA dont elle est liée par une parité fixe.
Face au dollar américain, l’euro, une monnaie commune de 19 pays européens, a reculé ces dernières semaines de 1,5 %, pour atteindre son niveau le plus bas depuis deux décennies. Les raisons de cette nouvelle baisse divergent. Selon les experts, il n’est pas toujours évident d’expliquer des mouvements brusques de marché sur une période courte. Les analyses constantes semblent indiquer que les agents économiques craignent que la zone euro ne soit en récession.
Mais un fait constant qu’on peut relever, c’est que l’inflation a atteint à fin juin, le niveau de 8,6%, principalement tirée par les prix de l’énergie dont les factures au niveau mondial se paient principalement en dollar US. Cette hausse généralisée des prix sur le marché mondial profite à la monnaie américaine qui est très sollicitée et sa valeur augmente.
En raison de la parité entre le franc CFA et l’euro, les pays de la zone franc de l’Afrique subissent l’impact des variations de la monnaie européenne. Depuis le début de l’année, la devise africaine est en baisse de 10 %. Elle s’est négociée, le 6 juillet, à 640,1 F CFA pour 1 dollar US, son niveau le plus faible depuis deux décennies. Un scénario imprévu par les banques centrales des deux régions de l’Afrique centrale et ouest-africaine (Cemac et Uemoa).
Pour les pays exportateurs de matières premières ( pétrole, or, gaz, cacao, coton), il s’agit d’une aubaine permettant d’accroître les revenus d’exportation. La Banque centrale des pays de l’Afrique de l’Ouest par exemple a récupéré ses réserves de change pour les placer majoritairement sur des actifs en dollars US, pour générer des plus-values.
Mais les deux régions sont aussi importatrices de biens et services, et la zone euro, en proie à l’inflation, est un partenaire clé. Nul ne peut prédire combien de temps va durer cette situation. Si la crise en Ukraine et les ruptures sur la chaîne d’approvisionnement mondiale sont évoquées comme principales raisons de la chute de l’euro, celle-ci a débuté en janvier 2021.
Pendant .que la banque centrale des États-Unis a commencé à donner des signaux d’une suspension de son programme, les pays européens ont tenté de trouver des mesures d’adaptation pour soutenir la dette de certains pays (France et Italie) pour permettre une relance post-Covid.
Cette stratégie ne semble pas avoir eu que des implications positives. Les agents économiques de la Cémac et de l’Uemoa sont aujourd’hui obligés de subir les effets de ces choix, sans que leurs avis, et surtout leurs intérêts, ne puissent compter dans la recherche des solutions aux défis actuels.
Déjà en avril, la valeur de l’euro avait reculé de 14,2 % face au dollar US, entraînant dans son sillage la baisse du franc CFA. La situation ne semble pas prête de s’arranger. La difficulté provient du fait que la Banque centrale européenne continue de maintenir une politique de rachat des actifs sur le marché de la monnaie.
Les conséquences du recul de la valeur du FCFA
Le recul de la valeur du franc CFA face au dollar a un avantage pour les exportations. En monnaie locale, le chiffre d’affaires des entreprises devrait augmenter. Le défi pour les régions qui l’utilisent réside au niveau du volume des importations, car il faudra dépenser plus en monnaie locale pour le paiement des factures internationales.
Seulement, pour l’économiste togolais Yves Ekoué Amaïzo cité par RFI, les Etats africains pourraient également avoir des difficultés à rembourser leur dette et à payer pour les importations. Cependant, les exportateurs africains de matières premières seraient alors gagnants de cette parité monétaire Euro-F CFA.
L’autre conséquence du repli du franc CFA face au dollar est le recul de sa valeur face au yuan, la monnaie chinoise, et au dirham des Emirats arabes unis, deux pays des gros fournisseurs des zones Uemoa et Cémac. Cette perte de valeur a pénalisé les performances de l’année 2021, se traduisant par des résultats plutôt stables.
Ce qui est de nature à alerter les investisseurs, attentifs aux risques de perte de change lorsqu’ils évaluent les opportunités de placement dans les deux régions. La situation actuelle a poussé la Banque centrale européenne (BCE) à envisager de relever ses taux pour la première fois depuis 11 ans, lors de sa réunion du 21 juillet prochain.