La population camerounaise se tourne de plus en plus vers les produits issus du marché local pour le bonheur des transformateurs qui ont vu leur chiffre d’affaire doubler au fil des ans
C’est à son domicile familial situé à Okala, dans le Centre du Cameroun, que Léopold Nama a installé sa petite usine de transformation du cacao.
Il s’agit, en réalité, d’un petit pressoir pour graines et quelques autres petits appareils d’utilisation courante. A partir de diverses techniques artisanales apprises « sur le tas » et au cours de quelques séminaires de formation, Nama a appris à transformer le cacao dans une petite cuisine sombre et sur un feu de bois.
« Avec quatre kilogrammes de cacao, j’obtiens un litre de beurre de cacao, et deux kilogrammes de poudre de cacao », renseigne fièrement le transformateur, rencontré par Anadolu.
« En fait, lorsqu’on presse le cacao pour obtenir le beurre, il en reste ce qu’on appelle le tourteau de cacao. C’est ce tourteau qu’on écrase et qu’on tamise pour obtenir la poudre de cacao », explique encore Nama.
Ce tourteau de cacao, est utilisé en pâtisserie pour la fabrication des gâteaux, celle des amandes torréfiées non sucrées ainsi que dans la cosmétique, comme masque facial par exemple ou pour des gommages corporels. Il peut enfin servir de base pour la fabrication du chocolat, ajoute l’artisan.
Mais en réalité, le produit phare de cet entrepreneur de 48 ans, est « le caramel de cacao ».
« Quand on consomme ce caramel de cacao, il a dans la bouche un goût de chocolat noir légèrement sucré », explique Thierry Mbogol, un consommateur friand de ce caramel.
« Les gens préfèrent notre caramel au chocolat noir car dans leurs esprits, le chocolat reste avant tout un produit occidental alors qu’avec le caramel de cacao, ils ont vraiment la sensation de consommer un produit africain », précise Nama qui s’est lancé dans la transformation du cacao en 2012.
A l’instar de nombreux habitants de la planète, la population camerounaise aime beaucoup le chocolat et les autres produits dérivés du cacao, mais le prix élevé de ces aliments importés, la freine.
C’est pourquoi elle se tourne de plus en plus vers les produits issus du marché local pour le bonheur des transformateurs locaux qui ont vu leur chiffre d’affaire doubler au fil des ans.
Léopold Nama confie ne pas avoir une quantité précise de production journalière ou mensuelle. « Je transforme le cacao au fur et à mesure que mon stock s’épuise », dit-il.
Avec un capital de départ de 3 mille FCfa (5 usd) en avril 2012, il dit avoir atteint un chiffre d’affaires de deux millions FCfa (3320 usd) pour l’année 2014.
« Depuis le mois de janvier 2015 jusqu’à aujourd’hui, j’ai obtenu, chaque mois en moyenne 200 mille Fcfa (332 usd). Un chiffre qui est toutefois variable, puisqu’au mois de novembre dernier, j’ai vendu pour près de 400 mille Fcfa de cacao transformé (664 usd) », détaille-t-il.
« Et cette année, je pense que mon chiffre d’affaires atteindra au moins quatre millions de Fcfa (6640 usd) », révèle-t-il à Anadolu.
Sur le marché local, un litre de beurre de cacao fabriqué localement coûte 20 mille FCfa (33,2 usd), contre 40 mille (66,4 usd) pour le litre importé.
Les 100 grammes de caramel de cacao coûtent, quant à eux, 1 000 FCfa (1,66 usd) et il n y a aucune concurrence avec les produits importés puisqu’il n’y en a pas, selon Nama.
En revanche, les produits locaux, prisés des consommateurs, ne sortent pas du territoire puisque la plupart des transformateurs ne peuvent exporter leurs produits faute de certificat de conformité, un document qui atteste qu’un certain processus a été respecté, notamment en ce qui concerne les règles d’hygiène ou la provenance de la matière première, déplore l’entrepreneur.
Au Cameroun, sixième producteur mondial de cacao, près de 80% de la production de cacao est exportée et seule 20% est transformée localement, d’après les chiffres fournis par le Conseil interprofessionnel du cacao et du café (Cicc), le plus grand regroupement de producteurs de ces filières du Cameroun.
Pour aider les transformateurs à augmenter ce pourcentage et surtout à se professionnaliser, le CICC les accompagne dans la phase d’industrialisation.
« Aujourd’hui le marché de la première transformation du cacao est énorme et accessible au producteur. Encore faut-il qu’il y ait du bon matériel », explique à Anadolu Omer Maledy, le secrétaire exécutif du CICC.
Un programme dénommé « Transfol » a donc été mis sur pied pour faciliter l’organisation des producteurs et leur faciliter l’acquisition du matériel.
Au Cameroun, il existe environ 300 petits transformateurs répertoriés, mais sans doute beaucoup plus qui exercent dans l’informel, selon Nama.