Après une période de ralentissement observée dans la filière cotonnière du Cameroun au deuxième trimestre 2024, la Banque des États de l'Afrique centrale (Beac) entrevoit une reprise de la production d'ici la fin de septembre. Selon les prévisions conjoncturelles de la Beac, cette embellie serait soutenue par une conjoncture favorable, tant à l'interne qu'à l'externe.
L'un des principaux moteurs de cette reprise potentielle réside dans la situation monétaire du Nigeria, voisin et partenaire commercial stratégique. Habituellement, une part significative de la production de coton camerounaise est détournée vers le Nigeria, en dépit des accords entre les producteurs locaux et la Société de développement du coton (Sodecoton). Ces accords stipulent que les producteurs doivent vendre leur récolte à la Sodecoton en échange d'intrants agricoles, mais les prix attractifs proposés par les acheteurs nigérians incitent souvent les producteurs à privilégier ce marché parallèle. Ce phénomène entraîne des pertes pour la Sodecoton et affaiblit les capacités de production du Cameroun.
Toutefois, la situation pourrait changer au troisième trimestre 2024. En effet, la chute vertigineuse du Naira nigérian, conjuguée à la hausse de la taxe d'exportation de la fibre de coton, passée de 1% en 2022 à 2% en 2023, pourrait dissuader les producteurs camerounais d'écouler leur coton au Nigeria. Le Centre d'étude et de réflexion sur le monde francophone (Cermf) souligne que le Naira a perdu 40% de sa valeur depuis le début de l'année 2024. À la date du 21 juin 2024, la monnaie nigériane valait 2 282 fois moins que le dollar américain par rapport à sa valeur initiale lors de sa création en 1973. Cette dévaluation massive a considérablement réduit le pouvoir d'achat des Nigérians, rendant le marché local moins attractif pour les producteurs camerounais.
En plus de cette conjoncture économique défavorable au Nigeria, d'autres facteurs internes pourraient également stimuler la production cotonnière au Cameroun. Selon les experts, l'amélioration du climat de confiance entre la Sodecoton et les groupements de producteurs, la disponibilité en temps voulu des intrants agricoles, malgré leur coût élevé, et l'introduction de nouvelles variétés de semences à haut rendement sont autant d'éléments susceptibles de favoriser une meilleure récolte.
Pour rappel, les prévisions conjoncturelles trimestrielles de la Beac reposent sur des enquêtes réalisées auprès des chefs d'entreprises, des responsables administratifs et d'autres acteurs clés des différentes filières économiques de la zone Cemac. Ces prévisions offrent une perspective sur l'évolution attendue de l'activité économique au cours du prochain trimestre et identifient les principaux facteurs qui influenceront cette évolution.