Infos Business of Thursday, 6 January 2022

Source: www.camerounweb.com

Dion Ngute et Célestin Tawamba : la paix des braves

La paix des braves La paix des braves

Après des semaines de bras de fer entre les opérateurs économiques et le gouvernement, le président Paul Biya veut parvenir à un consensus qui demeure précaire.

La bataille que se livrent les opérateurs économiques et le gouvernement essentiellement liée aux mesures d’accompagnement des pouvoirs publics au secteur privé depuis la survenue de la pandémie de Covid-19 sur l’économie nationale, pourrait rentrer en gare dans les prochains jours.

En effet, dans son traditionnelle adresse à la nation le 31 décembre, le chef de l’Etat Paul Biya a instruit le gouvernement d’identifier des pistes pouvant soutenir les activités du secteur privé dans un environnement fiscal très contraignant.

«Dans un environnement macro-économique fortement perturbé par la pandémie du Covid-19, il a fallu continuer à garantir la compétitivité du secteur privé. Il n’échappe à personne que cette pandémie a entrainé un renchérissement du fret maritime, avec pour incidence immédiate, une inflation du coût des produits de première nécessité », a déclaré Paul Biya le 31 décembre 2021.

« C’est donc conscient des sacrifices considérables que les opérateurs économiques nationaux ont consenti pour atténuer tes effets de la pandémie, que j’ai instruit le gouvernement de réduire de 80%, le montant du fret maritime à intégrer dans le calcul des droits de douane », a ajouté le locataire du palais d’Etoudi.

Pour lui, ces mesures gouvernementales ne devraient pas s’arrêter là. Il instruit le gouvernement de poursuivre les échanges avec le secteur privé, à l’effet d’identifier les mesures supplémentaires susceptibles d’être mises en œuvre. Jusqu’à présent, aucun commentaire n’a été enregistré du côté du patronat camerounais à la suite de l’annonce du président de la République.

Des sources concordantes annonce tout de même une sortie dans les prochains jours de Célestin Tawamba, président du Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam). Le patron des patrons s’exprimera pour donner une position officielle et concertée, apprend-on.

Surenchère

Toutefois, l’on se souvient que le dialogue entre l’Etat et le secteur privé avait été rompu par le patronat sur fond de menaces d’arrêt de production des denrées et autres produits de grande consommation à la faveur de l’explosion des coûts des intrants, de la crise des containers et de l’envolée des cotations du fret maritime international.
Les patrons avaient d’ailleurs refusé de participer au Cameroon Business Forum le 15 décembre 2021 au motif de la non-prise en compte par le gouvernement de leur plaidoyer pour l’organisation de cette rencontre et surtout sa refondation.
« Face aux nombreux défis sociaux et économiques auxquels fait face le gouvernement et à la grogne croissante des entreprises, l’urgence à refonder le cadre de partenariat entre l’Etat et le secteur privé est plus que jamais réelle », indiquait-on au Gicam.
Pour le patronat, il faut une structure novatrice dénommée Cameroon Business Council placée sous l’autorité du chef du gouvernement voire du président de la République. Le Cameroon Business Forum a finalement été reporté à une date ultérieure.

Derrière ce bras de fer peu flatteur entre le pouvoir de Yaoundé et les créateurs de richesses, de nombreux analystes estiment qu’il y a une excessive surenchère. D’ailleurs, pense l’économiste Dieudonné Essomba, le discours du chef de l’Etat le 31 décembre ne tranche pas en faveur du Gicam et rappelle au gouvernement la posture méthodologique à adopter.

«II est normal que lorsque la dyna mique des prix augmente à l’international du fait de facteurs extérieurs que le Cameroun ne maîtrise pas, que les contrecoups soient atomisés et supportés par les trois acteurs : le gouvernement doit ajuster ses prévisions fiscales, les entreprises doivent abandonner une partie de leurs bénéfices et les consommateurs doivent accepter de payer un peu plus cher les produits. Il n’appartient pas à un seul acteur de tout subir et de l’abandonner. Et dans cette situation, ta posture du Gicam est la plus raisonnable et non celle d’un gouvernement dont la vision est étriquée et obnubilée par les gains fiscaux qu’il peut réaliser», analyse l’économiste.
Les clivages sont désormais à nu. Quelle que soit l’issue de cette bataille gouvernement-secteur privé, le pays aura fort à faire pour redorer son image dans le climat des affaires.