Les banques de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) pourraient perdre leurs correspondants à l’étranger. Le phénomène s’appelle « de-risking ». Même si cela n’a pas fait l’objet d’une communication particulière, le sujet a été évoqué au cours du Comité ministériel de l’Union monétaire de l’Afrique centrale (Umac) tenu à Brazzaville, au Congo, le 12 avril dernier. C’était sous la présidence de Régis Immongault Tatangani, ministre gabonais de l’Economie.
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« Le Comité ministériel s’est également penché sur la problématique de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme dans les relations de correspondance bancaire pour cause d’inadéquation des dispositifs en vigueur, autrement appelé ‘’de-risking’’ », indique le communiqué final des travaux.
L’Umac établit ainsi une corrélation entre les activités de blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et le risque pour les banques de la sous-région de perdre leurs correspondants à l’étranger, si rien n’est fait pour inverser la donne.
Pour comprendre l’inquiétude de l’Umac, il faut se rappeler que le Groupe d’Action contre le blanchiment d’argent en Afrique centrale (Gabac) tire la sonnette d’alarme, depuis plusieurs années déjà. Le lundi 09 octobre 2017, par exemple, Teodoro Obiang Nguema, président de la République de Guinée équatoriale, a accordé une audience à l’ex-secrétaire permanent du Gabac, le Camerounais Désiré Geoffroy Mbock.
Avec Teodoro Obiang Nguema, M. Mbock avait procédé à l’évaluation du dispositif juridique et institutionnel de la République de Guinée équatoriale en 2016. Evaluation dont les résultats ont conduit le Gafi (Groupe d'action financière) à inscrire le pays sur la liste des Etats non coopératifs en matière de lutte anti-blanchiment et contre le financement du terrorisme. Par conséquent, comme pays à risque.
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Désiré Geoffroy Mbock avait alors rappelé à son interlocuteur qu’à l’instar des sociétés de messagerie financière telles que Western Union et Moneygram qui ont arrêté leurs activités en Guinée équatoriale, des institutions de la place financière internationale ont aussi suspendu leurs opérations. Ce qui traduit la rupture des services de correspondants que certains établissements de crédit internationaux offraient aux banques de Guinée équatoriale pour assurer la couverture en devises des ordres reçus de leur clientèle.
Par ailleurs, une étude de la Commission bancaire d’Afrique centrale (Cobac) citée par l’ex-secrétaire permanent du Gabac révèle qu’en zone Cemac, 4 484 milliards FCFA ont été vendus (période 2013-2016) dans le change manuel en contrepartie d’euros et de dollars US.
Ce qui fait dire à M. Mbock : « certaines origines et/ou destinations de ces fonds permettent d’envisager que ces derniers aient pu faire l’objet de blanchiment ou aient servi au financement du terrorisme, d’autant qu’il faut reconnaître que l’activité de transfert de fonds est essentiellement exercée par les sous-agents, généralement des établissements de microfinance, dotés de personnels peu formés et plus préoccupés par les commissions engrangées que par la prévention du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme ».