De passage au Cameroun récemment, la co-fondatrice du leader mondial du transfert d’argent digital, qui étend progressivement son réseau de partenaires dans le pays, a livré sa vision du marché local.
Investir au Cameroun : Vous êtes Co-fondatrice et Directrice exécutive de WorldRemit. Pouvez-vous brièvement présenter cette entreprise ?
Catherine Wines : WorldRemit est un service de transfert d’argent en ligne, qui permet à des expatriés de soutenir financièrement leurs proches restés dans leur pays d’origine. Nos clients sont en grande partie d’origine africaine.
La diaspora camerounaise installée en Amérique du Nord ou en Europe peut envoyer de l’argent au Cameroun en toute sécurité, à l’aide de l’application WorldRemit ou de son site web.
IC : En l’espace d’un mois, vous venez de conclure des conventions de partenariats avec trois entreprises en activité au Cameroun (Banque Atlantique, Express Union et MTN Cameroun). Quelle est la quintessence de ces différents partenariats ?
CW : Nous sommes ravis d’annoncer la signature de partenariats avec trois marques réputées au Cameroun.
Notre accord stratégique avec MTN Mobile Money permet au public de recevoir immédiatement des fonds en toute sécurité, directement sur un téléphone portable. Avec 2,6 millions de comptes Mobile Money enregistrés au Cameroun, MTN révolutionne déjà l’accès aux services financiers. Notre partenariat permet aux Camerounais d’utiliser leur téléphone portable pour recevoir de l’argent envoyé de l’étranger.
Express Union est l’une des institutions financières les plus réputées du Cameroun. Grâce à notre partenariat, le public peut récupérer de l’argent envoyé via WorldRemit auprès de l’une des 600 agences du pays.
Nous venons aussi de nous rapprocher de la Banque Atlantique, l’une des principales banques d’Afrique de l’Ouest. Les clients de WorldRemit ont ainsi la possibilité de récupérer l’argent en espèces auprès de l’une des agences de la Banque Atlantique.
IC : S’agit-il de vos premiers contacts avec le marché camerounais du transfert d’argent? Si oui, qu’est-ce qui explique cet intérêt subit et visiblement très offensif pour ce marché ?
CW : La diaspora camerounaise effectue déjà des milliers de transferts d’argent chaque mois vers le Cameroun via WorldRemit. Dans le détail, nous avons par exemple enregistré plus de 11 000 transferts au cours du mois de décembre 2015. Les principaux pays d’envoi sont le Canada, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France.
Ces nouveaux partenariats offrent à nos clients un large choix du point du vue du mode de perception de l’argent, ce qui nous laisse espérer une nette augmentation des volumes de transferts au cours des prochains mois.
Nous sommes ravis d’avoir signé un partenariat avec MTN Mobile Money. En guise de comparaison, depuis le lancement de notre offre avec MTN Mobile Money en Ouganda en début d’année (2016, Ndlr), nous avons déjà effectué pour nos clients près de 20 000 transferts chaque mois.
Nos partenariats avec Express Union et la Banque Atlantique vont par ailleurs permettre aux personnes vivant au Cameroun de récupérer des espèces dans des points de collecte situés dans l’ensemble du pays, auprès d’établissements en lesquels elles ont totalement confiance.
IC : Au-delà des trois conventions susmentionnées, avez-vous d’autres projets sur le Cameroun ?
CW : Nous pensons que l’accès aux services financiers doit être un droit humain à la portée de tous. Dans un contexte où 85% des adultes Africains sub-sahariens ne possèdent pas de compte bancaire, le téléphone portable et particulièrement les services Mobile Money jouent un rôle essentiel dans cette mission d’accès aux services financiers.
Nous souhaitons continuer à nouer de nouveaux partenariats aux quatre coins du monde avec des services de Mobile Money, des banques et des réseaux de remise d’espèces, afin de rendre notre service réellement universel.
IC : Au Cameroun, bien plus que dans les pays développés et même dans d’autres pays d’Afrique plus avancés dans lesquels vous opérez, la cybercriminalité constitue un risque majeur pour l’activité qui est la vôtre. Quelles garanties offrez-vous pour la sécurisation des transactions effectuées via vos différentes plateformes ?
CW : WorldRemit est un acteur entièrement numérique. Cette position lui permet de renforcer ses standards de vérification et de documentation sur les mouvements financiers, en comparaison avec les entreprises traditionnelles de transferts d’argent qui ont pignon sur rue.
Avant d’accepter une transaction, notre système analyse un nombre de données important afin d’identifier potentiellement des comportements d’utilisateurs douteux, et ainsi vérifier auprès des bases de données Know-Your-Customer (KYC). Nos opérations laissent une piste de vérification numérique pour le suivi des comportements inhabituelles, repérer les fraudes potentielles et assurer efficacement le sourçage de données pour répondre aux exigences réglementaires.
Nous n’acceptons pas de cash de la part des expéditeurs. Le cash a cette faiblesse d’être anonyme et vulnérable au blanchiment d’argent. Nous nous assurons que les transactions proviennent d’un compte bancaire et que les utilisateurs passent par des réseaux légitimes.
IC : La qualité des infrastructures des télécoms au Cameroun et le faible taux de pénétration de l’Internet (25% selon l’UIT et Ericsson Mobility Report de juin 2016), malgré les avancées observées depuis l’avènement du mobile, ne peuvent-ils pas constituer des obstacles au déploiement optimal de vos activités dans le pays ?
CW : Nous sommes persuadés que l’avenir des services financiers passera par les téléphones mobiles pour la majorité de la population au Cameroun. Les transferts d’argent vers les portefeuilles Mobile Money dans ce pays représentent un immense potentiel.
Aujourd’hui, seuls 12 % des adultes au Cameroun détiennent un compte en banque (source : Banque mondiale), un chiffre inférieur à la moyenne relevée dans les pays d’Afrique subsaharienne. Pourtant, le pays compte 19,5 millions de connexions mobiles pour une population d’un peu moins de 23 millions de personnes (source : GSMA).
Les comptes Mobile Money permettent au public d’accéder pour la première fois à des services financiers sécurisés, de les aider au quotidien et de participer activement au dynamisme économique du pays.
Les comptes Mobile Money sont un mode de réception sûr et ultra-rapide de fonds vitaux envoyés par des proches expatriés.
WorldRemit s’investit en nouant des partenariats avec des fournisseurs leaders de comptes Mobile Money dans le monde entier. Nous sommes le leader du transfert d’argent vers des comptes Mobile Money, fort d’un réseau comptant au total 34 services différents dans 26 pays.
Plus d’un tiers des 500 000 transferts que nous effectuons chaque mois sont destinés à des comptes Mobile Money, et plus de la moitié des transferts ciblent le continent africain.
IC : Vous arrivez sur un marché du transfert d’argent sur lequel opèrent déjà d’autres mastodontes de cette activité tels que Western Union ou encore MoneyGram. Que proposez-vous de particulier par rapport à eux ?
CW : Notre service est à 100% en ligne, ce qui permet d’envoyer de l’argent bien plus vite qu’avec les services traditionnels. Et il est nettement plus pratique !
La grande majorité des transferts d’argent sont réalisés par le biais d’agences dédiées situées au cœur des villes. Beaucoup d’expatriés jonglent entre plusieurs emplois, ce qui leur complique la vie car ils sont contraints de trouver du temps en journée pour s’y rendre, tout en étant soumis à des commissions exorbitantes.
Avec WorldRemit, les Camerounais peuvent envoyer une somme à des proches en quelques instants depuis leur smartphone ou en quelques clics sur notre site web. L’opération est totalement sécurisée, très pratique et réalisable 24h/24 et 7j/7.
Le bénéficiaire a le choix pour récupérer l’argent : virement bancaire, collecte d’espèces ou virement sur un portefeuille électronique Mobile Money. Chacun choisit le mode qui l’arrange le plus.
IC : Des partenaires de l’opérateur du transfert d’argent Western Union dans le pays rechignent depuis quelques semaines à effectuer des opérations de transfert du Cameroun vers l’extérieur, à cause de l’inadéquation entre les prélèvements imposés par le fisc depuis l’année 2016 (33,33%) et les commissions jugées modiques reçues des opérateurs (15 à 20 %). Avez-vous tenu compte de cette question dans le cadre des conventions que vous venez de signer au Cameroun ?
CW : WorldRemit est un service de transfert d’argent en ligne, qui permet à des expatriés d’envoyer de l’argent vers le Cameroun, et ce, dans ce sens uniquement. Nous sommes au courant de cette situation concernant Western Union, mais nous préférons ne pas commenter les sujets qui concernent les concurrents, car ça ne nous concerne pas du tout.