A force d’avoir des ennuis avec les ménagères, Alain Ze a dû se résoudre à acheter une nouvelle balance, automatique et plus fiable. Gestionnaire d’une poissonnerie au marché du Mfoundi à Yaoundé, le nouvel instrument va lui servir de preuve.
« Les clients peuvent vérifier si le poids du produit qui leur a été servi est conforme à leur demande. Je possède deux balances, lorsque je pèse du poisson avec la balance à aiguille, je suggère maintenant aux ménagères de vérifier le poids sur place afin de dissiper les doutes», explique le poissonnier. Une méthode adoptée par plusieurs autres poissonniers rencontrés lundi dernier sur le même site.
Ali Adoum, boucher a préféré aménagé son étal de viande de bœuf dans une poissonnerie équipée de ces deux types de balance. « Certaines ménagères exigent souvent qu’on les rassure lorsqu’elles achètent de la viande», confie-t-il. Ces dispositions lui ont valu une clientèle sure.
Madeleine Bidjoka est de celle-là. Elle dit avoir longtemps été flouée. « Chaque fois que je croyais avoir acheté un kilogramme de viande, j’avais des doutes », explique la ménagère. A raison, puisque bon nombre de marchands continuent de truquer les instruments.
Abdel Bouba, boucher, reconnaît qu’il existe beaucoup de malhonnêtes. « La plupart des masses ou poids sont des malfaçons. Les clientes devraient les vérifier vu que le faux a un trou en bas », explique-t-il. Fidele Ntsama, cliente, dit être devenue très prudente. « Je vérifie toujours que l’aiguille soit bien à zéro avant l’opération ».
Concernant les bouteilles de gaz domestique, c’est le même chapelet de plaintes qui est égrainé. Bon nombre de ménagères se sont une ou deux fois rendu compte qu’une bouteille de gaz, à peine achetée, ne mettait pas plus de trois semaines. Madeleine Sontang, rencontrée dans un dépôt au quartier Tsinga à Yaoundé, en est une victime.
« Une fois la bouteille a mis à peine 2 semaines », se plaint-elle. De son côté, le détaillant dudit dépôt reconnaît que les bouteilles de gaz ne sont pas toujours pleines à l’achat. Mais, Rolic Fotsing, pointe un doigt accusateur vers les livreurs.
« Lorsqu’on me dépose 40 bouteilles au même moment, comme vérifier que les 12.5 kg sont effectivement respectés », s’interroge-t-il. Par ailleurs, il indique que le ministère du Commerce avait proposé il y a deux ans d’offrir des balances fiables aux détenteurs de dépôt afin de vérifier si le poids des bouteilles de gaz était conforme. « Malheureusement l’opération n’a jamais eu lieu », regrette-t-il.
Un espoir subsiste cependant. Un communiqué du ministre du Commerce (Mincomerce) publié le 12 octobre 2015, annonce dans les prochains jours, l’ouverture d’une campagne de vérification périodique des instruments de mesure.
Berthollet Tchami, sous-directeur de la métrologie au ministère du Commerce explique :
Le ministre du Commerce vient de signer un arrêté portant ouverture de la campagne de vérification périodique des instruments de mesure pour l’exercice 2015/2016. En quoi consiste cette campagne?
La campagne consiste en un mouvement au sein des administrations de la métrologie vers les détenteurs des instruments de mesure. C’est l’Etat qui va vers les détenteurs, à la différence d’autres contrôles. Elle vise à s’assurer que tous les instruments utilisés dans les transactions commerciales sont conformes à la réglementation.
Autrement dit, si ce sont des instruments par gamme de pesage que sont les balances, il faudrait que lorsqu’elles pèsent les marchandises, les écarts par rapport à ce qui est marqué correspondent aux tolérances fixées par la loi. Au finish, il est question de protéger le consommateur. Ce qui est courant dans le pesage, c’est que chez le boucher, chez le vendeur de poisson ou de farine, on a de petites balances de comptoirs disséminées et il faut qu’on s’assure qu’elles fonctionnent très bien.
Pour les compteurs, on doit s’assurer que les volu-compteurs ou pompes à carburant qu’on retrouve dans les stations-service sont justes. Nous le vérifions avec des étalons pour s’assurer que le pompiste a effectivement mis le nombre de litres de carburant achetés dans le réservoir et que s’il y a un écart, il faudrait que celui-ci soit dans la tolérance permise.
Comment être sûr que les commerçants ne truqueront pas leurs balances une fois les contrôles effectués ?
Une fois que la campagne a été réalisée dans une localité, les unités sur place sont chargées de la veille. La délégation départementale assure la surveillance du marché pour éliminer tout instrument défectueux ou frauduleusement manipulé. Les commerçants peuvent détraquer une balance.
Par exemple, ils peuvent régler le point zéro de la balance en comptant le poids du plateau ou du seau. Dans ce cas, le poids du seau sera déduit de la marchandise. Il y a des seaux de 300g, par exemple. Cela veut dire qu’à chaque pesée, ils soustraient 300g de marchandise au client. Les équipes en charge de la surveillance vérifient la position zéro normale qui correspond au seau sur la balance.
Quelles sont les sanctions prévues ?
Il y aura des sanctions. Un commerçant peut subir plusieurs sanctions à cause d’une faute. On va calculer la quantité de marchandise pesée en trop. Si c’est du poisson, nous allons évaluer la masse de poisson soustraite au client. En vérifiant le chiffre d’affaires, on verra la quantité de poisson vendue. Si à chaque pesée, 300g de poisson étaient comptés en trop, pour un vendeur qui a écoulé 200 kg en un mois, on va multiplier ces 300g de poisson par le nombre de clients et le soustraire des 200 kg du départ.
Cela représente le trop perçu du vendeur. On lui adresse un ordre de recettes avec la mention « Trop perçu » et on déposera la somme au Trésor public avec quittance. Ensuite, un procès verbal va être adressé au fautif. Pour la défectivité, c’est une amende réglementaire qui peut aller jusqu’à 50% du montant volé. La balance sera saisie. Si la balance a été manipulée, elle sera scellée de telle sorte qu’elle soit toujours juste et on s’assurera qu’elle sera maintenue dans cet état.